• Aucun résultat trouvé

L’accessibilité des systèmes de santé se définit de plusieurs manières. La revue de la littérature définit quatre grands types d’accessibilité. Les quatre types d’accessibilité causent problèmes dans le système de santé haïtien: l’accessibilité géographique, la disponibilité des services (sur le plan qualitatif et quantitatif), le financement et l’acceptabilité.

3.1. L’accessibilité géographique

La géographie escarpée du pays rend particulièrement difficile la localisation des points de service. L’état des infrastructures routières, les conditions de vie précaires laissent peu envisager que les gens puissent payer de grands déplacements pour se rendre dans les centres de dispensation de soins. Il n’y a jusqu’à présent aucun effort des responsables pour placer les points de service dans des points de plus grande accessibilité, bien qu’il existe des logiciels géo-spatiaux pouvant aider. Après examen des données, il n’est pas possible d’affirmer que cet aspect de la question ait été pris en considération. Les professionnels cubains travaillent dans des centres préexistants au programme. Il est question de construire des dizaines de nouveaux centres, mais si les CDI sont des indications de ce qui est à venir, on ne peut être certain que cette composante sera effectivement prise en compte. L’accessibilité géographique demeure une composante essentielle de l’accessibilité du système de santé, d’ailleurs les professionnels de santé haïtiens estiment que c’est le facteur le plus important dans l’accessibilité aux soins de santé en Haïti.

3.2. La disponibilité des services

La disponibilité des services est l’élément sur lequel ce programme vise à agir en priorité. Il y a un effort réel d’équiper certains centres en technologies adéquates, mais le chemin à parcourir est énorme et les premières indications ne

laissent pas entrevoir de grands changements à venir. Bien sûr tout un ensemble de structures ont été prévues pour améliorer la qualité des services, mais l’Institut de Médecine Tropicale n’a jusqu’à présent pas encore vu le jour, ni les centres de réparation des matériels médicaux, ou pour les prothèses. Quant aux CDI, il n’en existe pas beaucoup. Le programme n’a jusque là pas été en mesure de créer toute une série de structures prévues pour assurer une disponibilité à la fois qualitative et quantitative des services médicaux. Pour ce qui est de la disponibilité des professionnels médicaux, la pérennité est un enjeu majeur du programme. Le gouvernement n’est pas en mesure de recruter les professionnels qu’il a lui-même fait former à Cuba, et on imagine mal qu’il puisse retenir les autres dans les milieux sous-desservis. Des questions se posent sur l’éventualité de la construction des 30 hôpitaux promis par les gouvernements vénézuélien et brésilien, tenant compte des difficultés actuelles à recruter le peu de professionnels formés. L’impact des médecins cubains sur le système de santé est énorme, ils assurent une disponibilité continue de services de santé de qualité dans des coins très reculés. L’éventuel remplacement de ces derniers par les médecins nouvellement formés n’est pas très sûr tenant compte des possibilités de l’État. L’augmentation du nombre et la présence continue des médecins a grandement amélioré l’utilisation des services dans des endroits où elle était très faible. Le programme a donc dans une certaine mesure réussi à augmenter l’utilisation des services, mais d’autres facteurs limitent le plein potentiel de ce programme.

3.3. Le financement

Le financement du système de santé juxtapose plusieurs modèles de financement. Le modèle privé individuel pour ceux qui ont les moyens de payer pour leurs soins de santé. Cependant ils sont très peu nombreux à pouvoir effectivement se prendre en charge complètement lors d’un épisode de maladie. Le modèle privé collectif ou assurances privées, est de plus en plus répandu mais ceux qui peuvent se le payer ne sont pas légion non plus. Le modèle public d’assurance

emploi, est réservé aux employés de l’État et leurs dépendants. Finalement le modèle fiscalisé centralisé, est réservé à la population dans son ensemble, plus particulièrement les plus démunis. En théorie la couverture est globale, mais la réalité est tout autre. Il existe aussi un grand nombre d’organisations caritatives qui essaient de combler les absences de l’État. Cette juxtaposition de tous ces modèles témoigne d’une absence de leadership du système, et surtout de l’incapacité de l’État de répondre aux attentes en termes de santé publique. Le système de santé haïtien est très centralisé, toutes les décisions sont prises au niveau du ministère, et dans le cas de ce programme les décisions sont prises par la présidence du pays.

Le problème de financement tient surtout du fait qu’il n’y pas de définition du système de santé. À savoir ce qu’il y a comme ressources, comme besoins, ce que le système peut se payer? Le programme d’augmentation de l’accessibilité lui non plus n’a jamais été pensé en fonction de la capacité à payer et les besoins de la population. Ceci créé le problème de viabilité du programme qui présentement vit du financement du gouvernement vénézuélien. Il est vulnérable à tout changement de politique étrangère de ceux qui présentement le finance.

3.4. L’acceptabilité

L’éducation et certains aspects de la culture haïtienne limitent l’utilisation des ressources sanitaires. La médecine traditionnelle occupe une position privilégiée dans le quotidien haïtien, d’une part à cause de facteurs historiques, d’autre part à causes des circonstances économiques particulières du pays. Dans sa configuration actuelle le programme néglige d’intégrer cette composante culturelle qui aurait pu aider cet effort d’accessibilité. Le niveau d’éducation très faible de la population limite également l’utilisation des services. L’acceptabilité doit être un souci pour réussir dans le contexte haïtien, toute intervention dans le domaine de la santé doit tenir compte de ce facteur qui jusqu’à présent n’est pas suffisamment bien compris.

Le programme n’a pas totalement réussi à augmenter l’accessibilité de façon importante, mais la fréquentation des centres de santé a définitivement augmenté. L’utilisation des services de santé est fonction de l’état de santé et les besoins, des caractéristiques démographiques, de la disponibilité du personnel médical, des caractéristiques organisationnelles et des mécanismes de financement. Le programme actuel mise sur la disponibilité des services, mais plus de considération doit être accordées aux autres déterminants de l’utilisation des services de santé.