• Aucun résultat trouvé

SECTION I : ÉTAT DE L’ART BIBLIOGRAPHIQUE

3. L’ ÉTAPE PHYSICO CHIMIQUE DE TRAITEMENT DES EAUX

Nous avons précédemment montré qu’il existe un arsenal de méthodes de traitement des eaux usées pouvant être utilisées par les filières de traitement de surfaces. Cependant, peu de méthodes sont réellement utilisées à l’échelle industrielle pour des raisons à la fois techniques mais surtout économiques.

3.1.LA PHYSICO-CHIMIE POUR TRAITER DES EFFLUENTS

Le procédé de décontamination qui fait référence dans le secteur est le traitement par voie physico-chimique. On parle d’insolubilisation ou de précipitation chimique. Dans les stations industrielles, on utilise souvent le terme de « neutralisation chimique ». La principale caractéristique du procédé est la précipitation-fixation des polluants en utilisant des produits chimiques et la séparation des produits formés, par une étape de décantation par exemple. La Figure 17 décrit le schéma général de principe de traitement des eaux usées d’un atelier TS.

104 Figure 17. Schéma général de principe du traitement des eaux issues d’un atelier TS.

Le traitement physico-chimique consiste à insolubiliser les substances polluantes par ajout de réactifs chimiques (chaux, soude, aide-précipitants, insolubilisants...) et à séparer les deux phases eau- boue par un procédé physique de décantation ou de filtration. L’insolubilisation d’un certain nombre d’éléments dissous dans l’effluent consiste à réguler son pH dans la zone optimale de précipitation des polluants avec ajout de réactifs permettant leur élimination par précipitation. Les deux principaux objectifs de la précipitation sont d’une part d’éliminer les métaux sous formes d’hydroxydes peu solubles et d’autre part d’éliminer certains anions comme les phosphates, les fluorures ou les sulfates. Un autre objectif de la « neutralisation » est d’amener au rejet les eaux à un pH ne présentant pas de danger pour l’environnement.

Les Figures 18 et 19 montrent respectivement des exemples d’insolubilisation de polluants : i) d’anions par du lait de chaux (Figure 18) et ii) des hydroxydes métalliques par alcalinisation par de la soude dans le cas du Ni et par du lait de chaux dans le cas du Cu (Figure 19). Afin d’améliorer l’efficacité de la réaction, on peut utiliser des insolubilisants spécifiques comme le borohydrure de sodium (réduction des ions métalliques, Cu par exemple), des insolubilisants organiques (TMT 15) ou encore des insolubilisants d’anions comme les phosphates par l’ion calcium (Figure 18) ou par le chlorure ferrique.

Effluents acido-basiques Effluents

chromiques Effluents cyanurés

CUVE TAMPON

ATELIER DE TRAITEMENT DE SURFACES

DÉCHROMATATION DÉCYANURATION

INSOLUBILISATION FLOCULATION

DÉCANTATION filtre presse BOUES

mise à pH Valorisation Mise en décharge EAU CLARIFIÉE Rivière Station d’épuration

105 Figure 18. Exemples d’insolubilisation d’anions par du lait de chaux.

Figure 19. Exemples d’insolubilisation des hydroxydes métalliques par alcalinisation par de la soude dans le cas du Ni et par du lait de chaux dans le cas du Cu.

Il est important de noter qu’une partie des polluants à insolubiliser subissent au préalable un prétraitement nécessaire afin d’améliorer la précipitation ultérieure des polluants, notamment des métaux, ou de détruire des composés hautement toxiques comme les cyanures. Les prétraitements les plus utilisés sont la déchromatation (transformation des CrVI en CrIII moins toxique et insolubilisable), la décyanuration, l’oxydation ou la réduction de composés particuliers (réduction des nitrites, oxydation du FeII en FeIII mieux décantable, etc...) ou encore la coagulation qui facilite l’agglomération des particules solides, fines et des colloïdes. Il existe deux grands types de techniques physico-chimiques, le traitement par bâchée et le traitement en continu. Ce sont deux grandes pratiques de décontamination différentes mais qui aboutissent, en général, à des résultats identiques. Le traitement en continu consiste à épurer les différents effluents au fur et à mesure de leur production et à les rejeter à débit permanent. Par contre, le traitement physico-chimique en discontinu décontamine les effluents par bâchées, c’est-à-dire par volumes constants et successifs dans un même réacteur, selon des séquences adaptées. En général, le traitement en continu est le plus utilisé en raison notamment des importants volumes journaliers à traiter. Les traitements par bâchées sont, en effet, « réservés » au traitement de bains particuliers qui n’excèdent pas une dizaine de m3 et qui nécessitent une mise en œuvre d’un traitement spécifique.

sulfates 2F- + Ca(OH) 2 fluorures 2PO43- + 3Ca(OH) 2 phosphates SO42- + Ca(OH) 2 CaSO4 + 2OH- CaF2 + 2OH- Ca3(PO4)2 + 6OH- Ni2+ + 2NaOH Cu2+ + Ca(OH) 2 soude chaux Ni(OH)2 + 2Na+ Cu(OH)2 + Ca2+

106

Les Figures 20 et 21 illustrent les stations physico-chimiques de décontamination des quatre partenaires industriels.

Figure 20. Station de traitement utilisée par Zindel Industrie (Devecey) et Silac Industrie (Champlitte) pour décontaminer leurs eaux usées.

Figure 21. Station de traitement utilisée par Électrolyse Abbaye d’Acey (Vitreux) et Cœur d’Or Industrie (Maîche) pour décontaminer leurs eaux usées.

107

Les stations physico-chimiques de Devecey et de Champlitte sont pratiquement identiques, seuls les volumes de cuves de traitement changent. Les effluents chromatés sont d’abord prétraités et ensuite mélangés aux effluents alcalins, et l’ensemble est alors insolubilisé, floculé et décanté. Les stations de Vitreux et de Maîche fonctionnent également sur le même principe mis à part la présence de deux étapes supplémentaires à savoir une étape de décyanuration et une étape de coagulation dans la cuve d’insolubilisation (Figure 21). Tous les effluents traités sont rejetés directement dans le milieu sauf celui de Maîche qui est envoyé en station d’épuration.

3.2.AVANTAGES DE L’INSOLUBILISATION

L’insolubilisation est une technique de décontamination qui se retrouve pratiquement dans toutes les filières TS car elle présente plusieurs avantages. C’est une méthode à la fois simple, efficace, économiquement très intéressante (réactifs chimiques usuels, faible maintenance en personnel...) et qui demande un équipement simple et automatisé et peu de maintenance. Associé à une étape de floculation, la précipitation est, en effet, très efficace pour éliminer les MES, les particules colloïdales et les hydroxydes métalliques et permet également une réduction significative de la DCO.

3.3.INCONVÉNIENTS DE L’INSOLUBILISATION

L’insolubilisation assistée par une étape de floculation présente néanmoins quelques inconvénients :

 les réactions chimiques nécessitent l’utilisation de produits chimiques non réutilisables et pouvant présenter une certaine toxicité ; on utilise des polymères anioniques de synthèse (polyacrylamides, polyacryliques) pour faire floculer les hydroxydes métalliques ; or, le monomère acrylamide est fortement toxique (Renault et al., 2009) ;  le contrôle physico-chimique de l’effluent, en particulier le choix du

pH, est indispensable au bon fonctionnement des réactions ; le pH se situe dans la fourchette 6,5 à 9 pour avoir une élimination correcte du mélange d’ETM présents dans l’effluent ; en pratique, le pH se situe

108

entre 8 et 8,5 sauf pour le nickel et le cadmium dont la valeur doit être supérieure à 11 ;

 et la formation d’importante quantités de boues fortement concentrées en pollution métallique (gestion, traitement et devenir).

Cependant, l’inconvénient de la physico-chimie le plus souvent cité provient du fait que l’abattement chimique résultant n’est pas total. En effet, en raison de la complexité des mélanges à traiter, les réactions de précipitation chimique ne sont pas totales et donc l’insolubilisation ne permet pas d’abattre la totalité de la charge polluante. Sur ce dernier aspect, il existe de nombreuses recherches pour améliorer les abattements chimiques.