Si la lutte est un combat mené par tous les Etats et acteurs de la shipping
industry, le problème est une « pépite d’or » pour les assureurs – les P&I Clubs.
Aussi dur que ce soit à admettre lorsque les armateurs perdent, les assureurs eux ne peuvent jamais vraiment faire de pertes.
En effet si les montants qu’ils ont du débourser au titre des rançons et des polices souscrites ont été trop élevés sur l’année encourue, il leur suffit de
répercuter le coût de leur perte sur les primes annuelles que paieront les armateurs.
Le risque assuré. Comme le rapporte les auteurs de l’étude « The economics of
piracy. Pirate ransoms and livehoods off the coast of Somalia »128 :
« Il n’y a pas de scénario du pire pour les compagnies d’assurance puisqu’elles répercutent simplement leurs pertes sur le montant des primes ».
§ 1 : Les chiffres de l’assurance maritime
Le risque assuré a des conséquences définitivement non négligeables sur les primes payées par les armateurs. A titre d’exemple129, une police d’assurance couvrant un navire pour un voyage traversant la HRA en 2007 coûtait 500 $ US. Ce même navire et même voyage coûtait 20 000 $US en 2008. Enfin, en 2010 le coût de la police était de 150 000 $ US.
Les primes sont toujours fixées au cas par cas, trajet par trajet.
Vu l’accroissement du coût sur les primes d’assurances, il est compréhensible que les armateurs aient voulu placer une protection sur leurs navires. Même si cela implique les questions techniques juridiques et opérationnelles qui ont été soulevées.
§ 2 : L’assurance « anti-‐pirates de la mer » de la Lloyd’s
La Lloyd’s dont la renommée n’est plus à faire a su s’adapter à ce risque et proposa une couverture d’assurance « anti-‐pirate de la mer ».
128 http://www.geopolicity.com/upload/content/pub_1305229189_regular.pdf
129 Chiffres extraits du document UNODC: « United Nations Office on Drugs and Crime : The
Le correspondant à Londres du Monde130 Marc Roche relate très précisément la couverture proposée par la Lloyd’s :
« Jusqu'à l'été 2008, les armateurs opérant en haute mer se contentaient d’assurer le navire, la cargaison et l'équipage. Pionnier de la couverture des risques de guerre couvrant la piraterie, le Lloyd's s'est adapté à la multiplication des incidents en proposant un nouveau produit : l'assurance "anti-‐pirates de la mer". La police type offre le remboursement de la rançon, le paiement des frais légaux ou l'acheminement de l'argent aux ravisseurs. Par ailleurs, les armateurs peuvent se protéger contre le manque à gagner dû à l'immobilisation de leur navire. Aussi, les propriétaires peuvent bénéficier de l'assistance d'experts extérieurs pour gérer la crise ».
§ 3 : L’assurance « Kidnap & Ransom »
A l’instar des primes d’assurance, les sommes demandées par les pirates pour les rançons ont incroyablement augmentées.
A titre d’exemple, elles sont passées de 150 000 $ US à 5 400 000 $ US en 2010. Le total des paiements des rançons sur les années 2009 et 2010 est estimé à 415 millions de $ US.
Police française d’assurance. La police française d’assurance maritime sur
corps de tous navires tous risques131 exclut spécifiquement la piraterie de sa couverture.
Waterborne. La garantie « Waterborne »132 est une des Conventions spéciales de l’assurance maritime. Elle a pour champ d’application les marchandises
130 http://www.lemonde.fr/economie/article/2009/04/16/la-‐piraterie-‐fait-‐exploser-‐les-‐
primes-‐d-‐assurances_1181520_3234.html
transportées par voie maritime contre les risques de guerre, de terrorisme et de grève.
Elle couvre en son article 2 la « piraterie ayant un caractère politique ou se rattachant à la guerre ».
K&R. Il existe par ailleurs une assurance spécifique « enlèvements & rançons »
qui couvre entre autres les extorsions de fonds, le versement et la perte de rançons mais également les éléments accompagnant une demande rançon. Par exemple le voyage pour aller remettre la rançon sera couvert, le détournement du navire, la détention, les dommages corporels et encore les frais déboursés pour les experts en la matière. Le mécanisme va jusqu’à couvrir la perte d’exploitation133.
Si l’assurance K&R couvre largement tout ce qui a trait aux rançons et aux enlèvements, le défaut qui peut lui être apporté est celui d’agir « après coup ». C.à.d. une fois la capture effectuée et le danger encouru. C’est d’ailleurs le défaut qui peut être relevé à l’égard de toutes les polices d’assurance.
Les assurances sont indubitablement nécessaires mais elles ne peuvent qu’agir en aval, laissant une fois encore la place à la protection privée sur les navires comme la meilleure solution ou en tout cas comme la solution la plus viable pour le commerce et les opérateurs maritimes, bien qu’elle ne soit pas forcément la plus pragmatique.
132Pour voir le spécimen :
http://www.ffsa.fr/sites/upload/reprise/docs/application/pdf/2010-‐03/m13_016_spe.pdf
133 Un exemple d’assureur parmi d’autres pour la police « K&R » :
http://www.catlin.com/en/unitedkingdom/insurance/war-‐political-‐risk/kidnap-‐ransom-‐ insurance
§ 4 : Les clauses du contrat GARDCON
Le contrat type stipule en sa « Section 6 : Insurance, fees and Taxes » impose à la société de protection privée d’être couverte par une assurance tout au long de l’exécution du contrat.
La « section 7 : Legal and Liabilities » prévoit une clause « Knock for knock » dégageant chaque partie de ses responsabilités envers l’autre.
La BIMCO conseille par ailleurs de ne pas modifier le contrat type sauf modification importante, eu égard à l’attention portée dans les détails de la rédaction de ce contrat.