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Juillet 1928, la Convention Sellier : une réussite selon la Ligue, un échec pour

Chapitre 8: 1928, un contexte particulier : la naissance de l’urbanisme dirigé, la lo

8.3 Juillet 1928, la Convention Sellier : une réussite selon la Ligue, un échec pour

En juin 1928, Henri Sellier, conseiller général SFIO de la Seine et maire de Suresnes, présente au conseil municipal parisien un projet de convention relatif à la zone militaire. L’objectif de ce projet est d’abandonner la loi de 1919 de déclassement de la zone militaire en établissant un plan d’aménagement définitif de ces terrains. Henri Sellier est à l’origine de la création d’une dizaine de cités-jardins dans l’entre- deux-guerres. Ce défenseur de l’amélioration du logement populaire est également président de l’Office départemental des habitations à bon marché de la Seine. Son projet de convention est voté le 30 juin par le conseil municipal. Selon Sellier, il faut remédier au caractère approximatif de la loi d’avril 1919. Pour aboutir enfin à un véritable aménagement des terrains zoniers, son projet comporte plusieurs modifications de la loi relative au projet Dausset de 1919. D’une part, la zone sera expropriée dans sa totalité mais, en attendant la demande de quitter leurs habitations, les zoniers pourront rester sur la zone en versant des allocations à la Ville pendant 25 ans et deviendront en ce sens des locataires de la capitale. L’aménagement et le découpage de la zone expropriée sont similaires aux propositions formulées par la loi précédente : il s’agit d’organiser les terrains en parcs, espaces libres, terrains de sports et d’en consacrer le quart aux constructions HBM. Enfin, le jury exceptionnel d’expropriation prévu par la loi de 1919 est abandonné au profit du jury ordinaire267

.

                                                                                                               

267 BRISSET Pierre, La zone de Paris et la loi du 10 avril 1930, thèse pour le doctorat (sciences

politiques et économiques), Melun, imprimerie administrative, 1932 « la convention de 1928 et la loi du 19 avril 1920 »

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Les chefs de file de la Ligue de défense des zoniers ne sont pas opposés au projet Sellier. En effet, dans L’Écho des zoniers du 19 octobre 1928, Pointier explique qu’il est préférable de modifier cette construction plutôt que de la détruire268

. Quelques mois plus tard, le même journal liste ce que les zoniers obtiendront par le biais de cette nouvelle convention : « 1. Le Jury de droit commun. 2. La Fixation et obtention de délai d’évacuation. 3. La possibilité de passer des baux avec la ville pour eux voulant rester. 4. La jouissance complète des immeubles, commerces, industries. Les droits de cession. 6. Toutes ces choses sanctionnées par un texte gouvernementale ». Les chefs de file de la Ligue développent ensuite les amendements proposés pour cette convention. D’une part, si l’indemnité future délivrée par la Ville est une victoire pour l’organisation de défense, ses dirigeants proposent néanmoins que les zoniers soient indemnisés du prix de leurs terrains sans prendre en compte la servitude qui les grève car celle-ci impliquerait une dévalorisation implicite sur laquelle la capitale s’enrichirait au moment de la revente des terrains. Par ailleurs, la convention prévoit que seuls les zoniers d’avant 1919 soient indemnisés. La Ligue s’y oppose en suggérant que la totalité des zoniers d’avant la Convention Sellier touchent une indemnité. Les dirigeants de la Ligue indiquent également qu’ils souhaitent que les commerçants et industriels d’après 1919 puissent bénéficier d’un délai minimum de 10 ans avant de passer des baux avec la Ville au-delà de ce délai. En revanche, la Ligue accepte que les zoniers deviennent locataires de la Ville pendant 25 ans. En effet, pour la première fois il est fait mention d’un délai d’expropriation, absent dans la loi précédente qui ne livrait aucune échéance. La Ligue propose que les constructions conformes à la loi Loucheur soient conservées ou alors que l’indemnité concédée par la Ville prenne en compte cette plus-value. Plus précisément, la Ligue demande à ce que les habitants des logements de la zone conformes aux normes d’hygiène, de constructions et de logement social, aient accès à une aide de l’État dans l’accession à la propriété ou qu’ils soient indemnisés par la Ville qui devrait prendre en compte la plus-value de ces logements aux normes. Enfin, concernant l’article 13, et les indemnités qu’un propriétaire doit verser à la Ville, la Ligue veut le préciser en indiquant qu’un propriétaire ne sera jamais mis

                                                                                                               

268 L’Écho des Zoniers des quartiers périphériques de la banlieue suburbaine, Directeur Général

L. POINTIER, 19 octobre 1928, n° 114, publication en série imprimée, Archives Municipales de Levallois-Perret, carton 1T1

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dans l’obligation de verser à la Ville de Paris une somme supérieure à la moitié de celle qu’il recevra de ses locataires.

Ainsi, la Convention Sellier est le premier texte concernant la question zonière voté par l’administration que la Ligue de défense des zoniers ne désapprouve pas dans sa totalité. Il est nécessaire de rappeler qu’en 1913, cette même Ligue s’opposait à la personne d’Henri Sellier. Parallèlement, cette convention est difficilement contestable par la Ligue. En effet, ce texte est la première solution à la question de la zone proposée par un maire de banlieue membre de la SFIO, parti majoritaire au sein de l’organisation zonière. Il ne s’agit plus d’un projet de loi élaboré par des édiles parisiens tout à fait indifférents à la cause zonière. La convention de 1928 prend en considération les revendications principales et historiques de la cause zonière que sont le jury ordinaire et l’indemnisation par exemple. Enfin, le statut d’Henri Sellier, président de l’Office départemental de la seine des habitations à bon marché, laisse espérer aux adhérents de la Ligue que les zoniers seront relogés dans de bonnes conditions. En novembre 1929, Henri Sellier explique dans L’Écho « que cette nouvelle convention doit être adoptée le plus vite possible pour éviter le statuquo de 1919 »269

. Le projet d’Henri Sellier est alors soutenu par les chefs de file de la Ligue, comme le démontre les propos de Louis Marsais qui demande aux zoniers d’accepter la convention « car si elle n’existait pas, on retomberait à la loi de 1919 et leur sort serait moins enviable »270

.

                                                                                                               

269 L’Écho des Zoniers des quartiers périphériques de la banlieue suburbaine, Directeur Général

L. POINTIER, 19 novembre 1928, n° 114, publication en série imprimée, Archives Municipales de Levallois-Perret, carton 1T1

270 BRISSET Pierre, La zone de Paris et la loi du 10 avril 1930, thèse pour le doctorat (sciences

politiques et économiques), Melun, imprimerie administrative, 1932, « la convention de 1928 et la loi du 19 avril 1920 »

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Chapitre 9 : 1928-1930 : le parti communiste français entre