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Le jardinage et ses animateurs comme déterminants interpersonnels des comportements alimentaires

2.3 Relations entre les programmes éducatifs de jardinage et les déterminants des comportements alimentaires des jeunes

2.3.2 Le jardinage et ses animateurs comme déterminants interpersonnels des comportements alimentaires

Le fait de pratiquer le jardinage en groupe expose les jeunes aux connaissances, croyances, attitudes et pratiques alimentaires de leurs pairs et, selon le contexte, d’un enseignant, d’un moniteur, d’un expert en jardinage ou de toutes autres personnes présentes (Batuk, 2013; Blair, 2009). De ce fait, les programmes d'intervention alimentaire, nutritionnelle et sensorielle combinés au jardinage chez les jeunes peuvent agir sur les déterminants interpersonnels de leurs comportements alimentaires. Ce type d'activité

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permet un apprentissage par exemple d'attitudes et de comportements en lien avec les aliments (Ozer, 2006).

Comme vue précédemment, la grande disponibilité alimentaire qui résulte de l'établissement de jardins potagers crée des environnements facilitant le développement et le maintien d’attitudes et de comportements alimentaires sains chez les jeunes qui participent aux activités de jardinage. Toutefois, pour avoir un réel impact sur l’accessibilité puis la consommation des aliments nutritifs au sein des ménages, il importe d’aider les jeunes à choisir, manipuler et préparer les aliments disponibles. Le jardinage combiné à des apprentissages en nutrition et le développement des habiletés culinaires s’avère un outil pratique pour y arriver (FAO, 2009). En utilisant efficacement ces contextes propices aux apprentissages alimentaires, nutritionnels et sensoriels, les différents éducateurs auprès des jeunes (parents, enseignants, moniteurs, etc.) peuvent encourager et rendre agréable la consommation d’aliments nutritifs en collations et aux repas (Bédard & Dubois, 2010).

Ainsi, en plus d’agir en tant que modèles en lien avec la nourriture auprès des participants, les animateurs dans les jardins pédagogiques ont l’occasion de faire de l'éducation alimentaire, nutritionnelle et sensorielle. Il faut toutefois demeurer conscient qu'il est possible de nuire de façon non intentionnelle à la santé de jeunes en voulant les aider à améliorer leurs habitudes alimentaires et à contrôler leur poids (Taylor et al., 2005). En effet, certaines personnes travaillant auprès de jeunes ne se rendent pas toujours compte de la portée de leurs interventions en lien avec l’apparence et l’alimentation. Il s’avère donc important d’assurer un discours juste et pertinent de la part des animateurs, sur tous les

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sujets susceptibles d’influencer les comportements alimentaires des participants, ainsi que de prendre en compte leur attitude à l’égard de la saine alimentation (O'dea, 2000).

Selon une revue de 289 études, le milieu scolaire s’avère le contexte le plus commun d’interventions visant l’amélioration de l’accès ou de la consommation de fruits et légumes chez les jeunes (Ganann et al., 2012). Ainsi, les enseignants, les éducateurs et parfois des parents bénévoles sont souvent appelés à jouer un rôle d’animateur pour des interventions éducatives en alimentation et nutrition (Ozer, 2006). Il en est de même pour les moniteurs en camp de jour, durant la saison estivale. Bien qu’ils ne soient pas professionnels de la nutrition, ces éducateurs doivent véhiculer des valeurs et des messages appropriés sur la nutrition et l’alimentation, afin d’avoir un impact positif sur les connaissances et attitudes des jeunes sur l’alimentation, leurs préférences et comportements alimentaires. Il est possible de se demander si ce rôle peut convenir à ce type d’éducateur dans un programme de jardinage combiné à de l’éducation alimentaire, nutritionnelle et sensorielle.

Des chercheurs ont évalué l'efficacité personnelle à faire de l'éducation nutritionnelle et alimentaire à travers le jardinage, chez des éducateurs offrant un programme de prévention de l'obésité par l'apprentissage sur les fruits et légumes, auprès d'enfants d'âge préscolaire (3 à 5 ans) issus de milieux défavorisés. Avant l'intervention, les éducateurs ont reçu une formation de quatre heures en nutrition données par les chercheurs, ainsi qu'un manuel comprenant les activités éducatives prévues au programme. Une fois par semaine durant l'intervention, un membre de l'équipe de recherche assistait aux activités distribuées. En plus de l'efficacité personnelle, l'étude évaluait l'attitude des éducateurs envers

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l'importance de l'éducation à la santé et la pertinence d'un programme éducatif de jardinage alimentaire, ainsi que leurs perceptions de leurs connaissances en nutrition. Des sondages pré-post auto rapportés et une entrevue avec les éducateurs post intervention ont révélé que tous ces paramètres se sont améliorés (Lewis, 2009).

Au Québec, le programme « Un trésor dans mon jardin », de l’OSBL Jeunes Pousses, forme, soutient et accompagne des animateurs non professionnels de la nutrition à faire de l'éducation alimentaire, nutritionnelle et sensorielle à travers le jardinage. L'organisation met à leur disposition plusieurs ressources d’éducation adaptée aux divers milieux et contextes d’apprentissage, en plus de leur offrir une formation et un encadrement. Lors de l’évaluation de la phase pilote du projet, Vorobief (2009) a constaté que les éducatrices étaient satisfaites de l’encadrement qui leur était offert et du matériel éducatif adapté à leur programme pédagogique. En fait, celui-ci a été révisé à la suite de l’analyse des commentaires émis par les éducatrices, qui désiraient des indications précises quant aux activités éducatives, compte tenu de leur manque de temps de préparation.

Une étude en Californie fait ressortir que les enseignants des écoles ayant implanté un programme éducatif en jardinage alimentaire affirment que cette initiative les incite à faire de l’éducation nutritionnelle dans les cours. C'est ce qui ressort d'une étude, qui rapporte aussi que près de la moitié des enseignants rejoints combinaient l’éducation nutritionnelle au jardinage. Selon les données recueillies, les chercheurs estiment que des formations et du matériel pédagogique en nutrition adapté au jardinage favorisent une

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éducation nutritionnelle juste et efficace de la part d'éducateurs non professionnels de la nutrition (Graham & Zidenberg-Cherr, 2005).

Des chercheurs ont évalué l'implantation des programmes de jardins scolaires et parascolaires et du programme "Farm to school" de la maternelle à la 12e année en Californie. Les données ont été recueillies par sondage électronique auprès de représentants de la University of California Cooperative Extension basés dans les différents comtés de l'état américain. Il en ressort que l'enthousiasme des employés des jardins scolaires et parascolaires envers l'initiative est un des plus importants facteurs de succès du programme auprès des jeunes. Au contraire, les barrières identifiées en priorité sont le manque de temps, de connaissances et d'expériences des éducateurs concernant les programmes de jardins scolaires et parascolaires et "Farm to school" (Scherr et al., 2013).

Une tendance peut être dégagée des quelques études recensées dans la littérature concernant les éducateurs non spécialisés en nutrition dans un programme éducatif en jardinage alimentaire. En général, celles-ci indiquent que ce type d'éducateur peut faire de l'éducation nutritionnelle et alimentaire à travers des activités de jardinage et se sentir motivé et compétent dans ce rôle. Il semble que le manque de temps, d'enthousiasme, de connaissances et d'expériences des éducateurs peuvent freiner l'implantation de ce type de programme, alors que du matériel éducatif, une formation et un encadrement selon les besoins des éducateurs peuvent au contraire aider.

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2.3.3 Le jardinage et les déterminants individuels sur les comportements