• Aucun résultat trouvé

Le calcul des rapports initiaux 87Sr/86Sr pour les roches ayant enregistré plusieurs évènements de haut grade est compliqué par le fait que le rapport Rb/Sr a potentiellement subi des modifications importantes durant les divers processus crustaux ayant affecté ces roches. En raison de la mobilité potentielle du rubidium en particulier lors de l’altération secondaire subie par certaines des roches analysées, le diagramme isochrone Rb/Sr ne peut être utilisé pour fournir une indication géochronologique absolue. De même un alignement relatif le long d’une même errorchrone peut être interprété comme l’indication d’une filiation entre les roches alignées mais, compte-tenu de la très large variété de lithologies présentes dans notre jeu d’échantillons (roches ignées, métamorphiques, paradérivées, sédiments...) les interprétations doivent également être renforcées par d’autres arguments. Sur l’ensemble des

roches analysées, les rapports isotopiques du strontium et les rapports 87Rb/86Sr ont été

recalculés (Tableau IV-2).

Pour les roches ayant un âge voisin de 1990Ma, on distingue :

- les roches ortho-dérivées (n= 4) dont les rapports varient de façon importante depuis

des valeurs très basses de 0.7022 (granite 08PC11) jusqu’à 0.7067. Les rapports initiaux relativement faibles peuvent s’expliquer de plusieurs façons : i) mauvaise correction due à des perturbations du système Rb/Sr au cours d’un évènement de haut grade ce qui est très documenté dans la littérature (e.g. Kuster & al., 2008) et génère souvent des rapports initiaux trop bas ; ii) indication de matériel issu de la croûte continentale inférieure plus ou moins basique ou bien de matériel juvénile peu ou pas différencié (rapport du granite 08PC11 proche de la valeur chondritique calculée à 1990Ma). Les rapports 87Rb/86Sr varient depuis des valeurs très faibles de ~0.051 pour les échantillons dépourvus de micas jusqu’à des rapports extrêmement élevés de ~1.12 pour les échantillons contenant une grande proportion de biotite (i.e. granite 08PC11). La variation importante de ces rapports peut également être liée à des perturbations du système Rb/Sr.

Tableau IV.2. Résultats des isotopes du strontium et du néodyme pour l'ensemble des échantillons étudiés. Sur la base des données

géochronologiques obtenues les échantillons ont été corrigés de l'effet de la désintégration radioactive "in situ" à 1990Ma pour les échantillons labellisés # et 550 Ma pour les échantillons labellisés §. Les rapports initiaux recalculés des échantillons ayant subi des pertes en rubidium rendant erroné ces valeurs n'ont pas été reportés dans le tableau (-). *: échantillon dont les teneurs en éléments en trace n'ont pas été mesurées. Les valeurs d’epsilon strontium et néodyme ont été calculées avec les valeurs suivantes du CHUR, 87

Sr/86Sr= 0,7045 et 143Nd/144Nd= 0,51264. TDM: âge modèle selon le modèle de Goldstein et al. (1984) et TCHUR : âge modèle selon le modèle de De Paolo et Wasserburg (1976).

- les métasédiments (08PC64, 08PC24 et 08PC31) (n=3) dont la plupart fournissent des rapports isotopiques initiaux du strontium surcorrigés de l’effet de la désintégration radioactive (valeurs impossibles, extrêmement basses et inférieures à 0.7). Ces bas rapports initiaux sont liés à des perturbations du système Rb/Sr induisant une mauvaise correction de l’effet de l’âge, perturbations du Rb extrêmement fréquentes lors de processus d’altération intense de roche crustale ou lors d’évènements métamorphiques de haut grade. Ces perturbations sont très vraisemblables pour ces échantillons, en particulier lorsque des rapports 87Rb/86Sr extrêmement hauts sont associés à des rapports actuels 87Sr/86Sr extrêmement bas ce qui est le cas pour ces échantillons (Tableau IV-2) ;

- les sédiments (de type quarzite et marbre, 08PC30, 08PC05 et 09PC06) de la zone orientale, peu ou pas déformés, qui fournissent des rapports isotopiques initiaux en strontium perturbés par des processus d’altération (valeurs inférieures à 0.7 pour 2 échantillons) ou bien des valeurs très élevées témoins d’héritage crustaux anciens (i.e. 87

Sr/86Sr=0.794 pour le marbre 09PC06).

Pour le groupe d’échantillons dont les rapports isotopiques du strontium ont été recalculés à ~550Ma on définit trois sous-groupes :

- les migmatites (n=4) qui présentent une variation modérée des rapports isotopiques

du Sr (0.7085<87Sr/86Sr<0.7108) mais une large gamme du rapport 87Rb/86Sr (0.11-2.04) ;

- les amphibolites (n=2) caractérisées par des rapports initiaux 87Sr/86Sr très faibles (i.e. 0.70363 et 0.70328) accompagnés de rapports 87Rb/86Sr faibles (i.e., 0.13 et 0.03). On notera que de tels rapports sont des valeurs typiques d’une origine

mantellique. En effet, le rapport moyen 87Rb/86Sr du mantle appauvri (depleted

mantle, DM) est donné à ~0.045 ;

- deux métasédiments (08PC38 et 08PC40) et un granitoïde à grenat (09PC22) qui se

caractérisent par des valeurs du rapport 87Rb/86Sr extrêmement variables (0.04-0.49) et des rapports 87Sr/86Sri évoluant de 0.709 à 0.714, valeurs caractéristiques de la croûte continentale.

Dans le diagramme 87Rb/86Sr versus 87Sr/86Sr (Figure IV.15), on peut distinguer trois groupes d’échantillons ayant des tendances différentes : # un premier qui s’aligne le long d’une errorchrone à ~550Ma et qui est formé par les quatre échantillons de migmatite (08PC45, 08PC46, 08PC54, 08PC55) + deux paragneiss (08PC38 et 08PC40) + le granitoïde (09PC22) ; # un deuxième constitué par les granitoïdes (08PC07, 08PC11) + deux diorites (08PC33 et 08PC34) et, à un degré moindre, également les deux paragneiss précédents et le granite (09PC22), le tout s’aligne à proximité d’une errorchrone à ~1990Ma, enfin # un troisième comprenant les deux amphibolites dont une (08PC52) donne un âge U-Pb sur zircons concordant à ~521Ma (Chapitre V). Ces dernières se reportent significativement plus

bas au niveau de l’axe des ordonnées et se caractérisent par des rapports 87Sr/87Rb très

Figure IV.15 : Diagramme isochrone Rb/Sr permettant de distinguer trois groupes

d’échantillons : les amphibolites, les granitoïdes et les migmatites. Sont indiquées pour discussion les droites de référence à 1.99 Ga et 0.55 Ga.

Cette distribution en deux groupes d’âge distinct est relativement en bon accord avec les résultats obtenus dans le chapitre V dédié à la géochrologie absolue. Cela nous permet de dire que les migmatites et sans doute les paragneiss de la zone occidentale sont issus d’un même protolithe repris à la fin du Panafricain. Ce protolithe, dont la signature isotopique en strontium correspondrait à l’ordonnée à l’origine de notre errorchrone à 550Ma, soit une

valeur d’environ ∼0.711, fournit une valeur typique de croûte continentale. Les amphibolites

associées géographiquement à ces migmatiques et gneiss indiquent des signatures de isotopiques de strontium caractéristiques de matériel mantellique. Les roches qui s’alignent le long de l’errorchrone à 1990Ma ont évolué à partir d’un réservoir ayant approximativement

un rapport 87Sr/86Sr de ∼0.706, rapport correspondant à du matériel crustal non juvénile

(rapport 87Sr/86SrCHUR à 1990Ma égal à 0.7021).

Enfin, compte-tenu que lors de la correction de l’effet de la désintégration radioactive au cours du temps, les rapports 87Sr/86Sr ont été surcorrigés pour certains échantillons (dus à des perturbations de leur système Rb/Sr lors de processus secondaires ou de haut grade), leurs rapports isotopiques initiaux du strontium n’ont donc pas été reportés dans le diagramme (Figures IV.16). Ainsi, dans ce diagramme (Figure IV.16) certains échantillons sont seulement indiqués pour leur valeur de néodyme (avec une ligne en pointillé indiquant que la

valeur du rapport 87Sr/86Sri n’a pu être recalculé de façon fiable) qui lui n’a

vraisemblablement pas été affecté par l’altération, les terres rares étant bien moins mobiles lors de phénomènes secondaires. Pour la même raison, les âges modèles en Sr n’ont pas été calculés sur l’ensemble des échantillons.