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1.3.  D'une trajectoire anormale à un comportement

1.3.2. ISFAR

Tout comme la détection d'anomalies dans le domaine maritime, les exemples d'applications portant sur la notion de comportement sont très rares. Là encore, à notre connaissance, l'essentiel des propositions à été réalisé par Roy et son équipe (Roy and Davenport, 2010). Pour cela, les auteurs ont développé un prototype d'analyse de comportements anormaux nommé ISFAR (Figure 1.16). Celui-ci se base sur une ontologie comportant près de 350 classes et 600 instances. Le moteur d'inférence Pellet a été utilisé à la fois lors de la phase de développement pour vérifier la consistance de l'ontologie mais aussi lors de la phase de production pour réaliser les procédures d'inférences.

1.3.2.1 Architecture du système

Le système proposé fonctionne en trois temps (Figure 1.16). Tout d'abord, l'ontologie du domaine maritime est fusionnée avec les données (faits) provenant du Situation Facts Management Service ce qui conduit à la création d'une base de connaissances (Temporary Augmented Ontology). À partir de celle-ci des procédures de contrôle sont lancées par le moteur d'inférence qui détermine alors en fonction des règles spécifiées les navires suspects. Ces navires suspects peuvent être ensuite interrogés grâce au service Ontology Query Service. L'une des parties essentielles du système proposé est constituée par le moteur d'inférence. C'est pourquoi les auteurs ont effectué une série de tests sur les différentes solutions existantes aussi bien Open Source que commerciales. Sur la quarantaine de moteurs testés, c'est Pellett25 qui a été choisi en raison notamment de sa documentation riche, de son interface de programmation (API) ou encore de ses temps d'exécution. Pour l'intégration des données et l'utilisation du service, deux modes ont été proposés. Le premier, dit continu, ajoute en temps réel les nouveaux faits à la base de connaissances. Néanmoins, même sur une ontologie de petite ou de moyenne taille la procédure de classification et de création nécessite un temps considérable. C'est pourquoi, le second mode, dit batch c'est à dire fonctionnant de manière asynchrone, a été préféré. Dans celui-ci, les nouveaux faits sont ajoutés selon un intervalle de temps régulier.

1.3.2.2 Performances et limites du système

Concernant les performances du système proposé, celui-ci a été testé en utilisant plus d'une centaine de faits correspondant aux navires, leur position, leur parcours et les dossiers s'y rattachant. Bien que les résultats soient concluants, les auteurs notent néanmoins des problèmes de performance quand le nombre de navires augmente. Pour les auteurs, ces résultats s'expliquent notamment par la modélisation complexe des classes en cas d'absence de règles, l'impossibilité d'effectuer certains raisonnements ou encore sur l'impossibilité de gérer certains cas intégrant une dimension temporelle variable.

Au-delà de la modélisation, certaines limites sont également à mettre en relation avec le moteur d'inférence Pellet. En effet celui-ci est basé sur des algorithmes de vérification de satisfiabilité à base de tableaux (tableau-based algo), ce qui signifie que pour chaque restriction, il est nécessaire d'ajouter au graphe le nœud correspondant. Ainsi, si un grand nombre de restrictions a été défini cela entraîne la création d'un nombre de nœuds exponentiel. Or l'ontologie développée contient plus de 400 restrictions ce qui pourrait expliquer les ralentissements constatés.

Différentes solutions ont été imaginées afin d'améliorer ces performances. Deux d’entre elles consistant au passage de OWL-DL à OWL Full et la séparation en plusieurs sous-ontologies ont été explorées mais abandonnées par la suite en raison d'absence de résultats significatifs. Par contre, la restructuration de l'ontologie au regard des limites observées a permis d'améliorer considérablement les performances du prototype. Cette restructuration orientée "evidence centered" a notamment été rendue possible par l'intégration de built-in SWRL. De plus, le passage à la nouvelle version de Pellet a permis de diviser considérablement les temps d'inférences. Par exemple, la classification de deux navires prenait plus de 400 secondes avec la première version de Pellet et plus que 2,5 secondes avec la nouvelle (Roy and Davenport, 2010).

Figure 1.16: Architecture du prototype ARMAD développé par Roy. Source : (Roy and Davenport, 2010).

Bien qu'essentielle, la position et par extension la trajectoire d'un objet mobile sont insuffisantes pour analyser son comportement. L'intégration d'informations complémentaires décrivant notamment le contexte dans lequel il évolue apparaît comme nécessaire. Ces informations sont alors reliées à l'objet mobile permettant ainsi d'aboutir à une trajectoire sémantique. Cette trajectoire sémantique peut être ensuite analysée afin d'identifier des anomalies ou des comportements suspects.

Le cadre structurant cette trajectoire sémantique est constitué de trois principales ontologies : l'ontologie géométrique, l'ontologie géographique et l'ontologie du domaine. Le cœur de ce travail de thèse a porté sur la modélisation de cette dernière ainsi que sur l'intégration en un ensemble cohérent des différentes ontologies. Gérées indépendamment, elles sont ensuite fusionnées afin d'offrir aux experts de la surveillance maritime l'ensemble des notions nécessaires à la description d'un comportement.

Mais se pose alors la question de la modélisation de ces informations. Comment doivent-elles être intégrées, comprises et analysées ? Comment créer des notions partagées par l'ensemble des acteurs ? Ces questions trouvent leur réponse dans le domaine de l'ingénierie de la connaissance et plus particulièrement dans celui des ontologies.

Le chapitre suivant décrit les différentes facettes des ontologies à la fois comme objet conceptuel et composant informatique. Les méthodologies de construction existantes ainsi que les formalismes et langages disponibles sont également présentés.

CONNAISSANCE AU SEIN DES ONTOLOGIES