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1.1. Objet du mémoire

Au sein du cursus scolaire ordinaire, il existe des structures d’enseignement spécialisé qui tentent de répondre aux besoins éducatifs des élèves déclarés en difficulté, auxquels l’enseignement ordinaire n’est pas ou n’est plus en mesure de répondre. Parmi ces structures, on distingue, notamment à Genève, la classe spécialisée, au niveau de l’école primaire puis, les Ecoles de Formation Préprofessionnelle (EFP) au niveau de la scolarité obligatoire secondaire.

C’est dans ces deux contextes scolaires particuliers que nous avons décidé d’effectuer notre recherche. Nous avons principalement axé notre travail sur l’estime de soi et le contrôle de l’action des élèves qui les fréquentent.

L’estime de soi a suscité un vif intérêt dans le domaine de l’éducation, depuis les années 1980, peut-être parce qu’il semble exister un lien entre « […] une basse estime de soi et un grand nombre de problèmes auxquels les jeunes d’aujourd’hui sont confrontés, par exemple la dépression, le suicide, la délinquance, les problèmes d’apprentissage scolaires, etc. » (Harter, 1998, p. 58).

Dans le présent travail, nous examinons le rôle que prennent les contextes scolaires dans la variation des différentes composantes de l’estime de soi des élèves. Pour ce faire, nous considérons l’estime de soi des élèves au cours d’une transition scolaire entre la fin de l’école primaire, dans une classe spécialisée, et la scolarisation en milieu d’année suivante au sein d’une EFP. À l’aide de questionnaires complétés par les élèves à ces deux moments de leur parcours, nous étudions dans quelle mesure le contexte scolaire, et plus particulièrement le changement de contexte, peut contribuer à infléchir le sentiment de compétence scolaire des élèves dans les domaines des mathématiques, du français, de l’éducation physique et des arts plastiques, ainsi que sur leur sentiment de compétences sociales, sur la valeur de soi et sur la perception qu’ils ont de leur apparence physique. Ces concepts sont différentes composantes de l’estime de soi. Nous examinons aussi le rôle du contexte scolaire sur une autre dimension importante dans la motivation à apprendre des élèves : le contrôle de l’action, c'est-à-dire les processus d’autorégulation affective qui participent à l’engagement et à la persévérance des élèves dans les activités d’apprentissage (Pelgrims, 2006). Il semble, en effet, que la disposition

des élèves à mobiliser ces processus durant les apprentissages en mathématiques dépendent fortement des pratiques pédagogiques et didactiques : plus les élèves sont scolarisés dans des classes spécialisées dans lesquelles les pratiques d’enseignement contraignent moins les apprentissages et fournissent plus d’aides et de tâches simples, moins ils se mobilisent et s’autorégulent (Pelgrims, 2006, sous presse).

Notre étude vise enfin à vérifier le rôle du contexte dans cette composante de la motivation à apprendre en français en tant que discipline scolaire.

1.2. Justification du choix du thème

Durant notre formation universitaire au sein du cursus de la licence en Sciences de l’éducation, mention « Enseignement » (LME), nous avons effectué un stage à l’école primaire, dans une classe d’enseignement spécialisé, dite « classe spécialisée », composée uniquement d’élèves « sortants » (12-13 ans). Ces élèves allaient quitter l’école primaire pour intégrer l’enseignement secondaire ordinaire c’est-à-dire le Cycle d’orientation (CO) ou poursuivre dans l’enseignement spécialisé en secondaire en Ecole de Formation Préprofessionnelle (EFP). Nous avons eu l’occasion de discuter, avec eux, de leur futur parcours. Ils nous ont fait part de leurs appréhensions, des préjugés et des réputations de tel ou tel établissement, de leur ignorance quant au lieu dans lequel ils allaient se rendre. Nous avons souhaité en savoir plus sur ces lieux et sur la manière dont les élèves y sont intégrés.

La lecture du mémoire de licence réalisé par Pacini (2004), sur les perceptions qu’ont les élèves sortant de classes spécialisées de la transition entre l’école primaire et l’enseignement secondaire en relation avec leur sentiment de compétences scolaires, nous a permis de découvrir les a priori des élèves de ces classes sur leur futur parcours.

Au terme de cette étude réalisée avec 39 élèves, Pacini précise que « les élèves qui sont prévus pour le CO et qui pensent aussi qu’ils iront au CO se sentent plus compétents que leurs camarades prévus pour l’EFP et qui pensent qu’ils iront à l’EFP» (2004, p. 102).

Elle a aussi étudié le lien entre le sentiment de compétence et le nombre d’années passées en classe spécialisée : « Ce sont aussi les élèves qui sont le moins longtemps en classe spécialisée qui se perçoivent moins compétents sur le plan scolaire que leur camarades qui fréquentent ce type de classe depuis quatre ans » (Pacini, 2004, p. 102).

Outre la durée de scolarisation en classe spécialisée, nous avons appris qu’un

redoublement antérieur au passage en classe spécialisée avait encore des traces sur certaines dimensions motivationnelles, tel que le sentiment de compétences en mathématiques (Pelgrims, 2006) et en français (Russo, 2007).

Ces constats, ajoutés aux discussions que nous avons eues sur le terrain scolaire, nous ont donné l’envie de "poursuivre" les recherches dans le domaine de la motivation à apprendre et plus particulièrement sur le rôle des différents contextes scolaires qui jalonnent les parcours des élèves de classe spécialisée (redoublement, nombre d’années en classe spécialisée, réorientations, transitions, …) dans les composantes de la motivation à apprendre des élèves. Au regard du travail de Pacini (2004), notre objectif initial consistait à nous centrer uniquement sur le rôle du contexte sous l’angle du changement de contexte que vivent les élèves entre la classe spécialisée et les deux orientations possibles au secondaire. Nous souhaitions ainsi pouvoir comparer les perceptions des élèves aux deux moments : fin primaire et milieu secondaire, entre les élèves ayant intégré le CO et ceux ayant intégré l’EFP. Malheureusement, nous n’avons pas obtenu les autorisations nécessaires pour suivre les 25 élèves au CO. Nous avons alors étoffé nos axes d’analyse en nous centrant sur les données, recueillies après, des 26 élèves des EFP en considérant les variables sociologiques et scolaires suivantes : le genre des élèves, le redoublement éventuel, le nombre d’années passées en classe spécialisée et le degré atteint en ordinaire lors du parcours scolaire antérieur.

1.3. Structure du mémoire

Dans le second chapitre de notre mémoire nous présentons le contexte dans lequel nous effectuons la recherche, afin d’aider le lecteur à mieux comprendre ses particularités. En effet, l’enseignement spécialisé, et plus précisément la classe spécialisée, a fait l’objet d’études descriptives qui nous permettent d’exposer ce que ce contexte a de particulier sans toutefois l’interpréter, mais en se basant sur des faits observés. Afin de présenter les spécificités du contexte de l’enseignement secondaire spécialisé (EFP), nous reprenons le mandat qui est le leur et tentons d’en dégager les points essentiels. Nous faisons également appel à une recherche effectuée en France par Goigoux (2000) dans des classes d’enseignement secondaire spécialisé dites « SEGPA » (Sections d’Enseignement Général et Professionnel Adapté) que l’on peut comparer aux EFP du

canton de Genève. Cette recherche donne des éléments de compréhension sur les pratiques d’enseignement de la lecture mise en oeuvre dans ces écoles.

Le troisième chapitre met en lumière les différents concepts théoriques qui fondent notre recherche. Comme point d’ancrage à cette revue de la littérature, nous présentons brièvement la notion de la motivation en contexte scolaire. Celle-ci nous permet d’aborder les deux concepts clés de cette recherche, à savoir l’estime de soi et le contrôle de l’action. Nous étudions ces thématiques au travers de certaines disciplines scolaires mais nous intégrons également d’autres composantes, non scolaires, de l’estime de soi tels que : l’apparence physique, le sentiment de compétences sociales et la valeur de soi. D’autres recherches traitant de thématiques communes à la nôtre, ainsi que des ouvrages d’auteurs viennent étayer ce cadre conceptuel.

Cette revue nous amène ensuite à définir notre problématique et les questions de recherche qui en découlent. Notre problématique nous conduit à déterminer, non pas la perception qu’ont les élèves de classe spécialisée de leur passage au secondaire, mais le rôle du contexte scolaire et, sous l’angle du changement de contexte, les effets dans l’orientation des composantes de l’estime de soi et sur les processus d’autorégulation motivationnelle et émotionnelle des élèves (contrôle de l’action).

Le cinquième chapitre détaille les différentes étapes méthodologiques suivies pour mener cette recherche. Le lecteur trouve d’abord la description de l’échantillon d’élèves, puis le format du questionnaire et la procédure de recueil des données.

Dans le sixième chapitre sont présentés les résultats issus d’analyses statistiques. En mettant ces résultats en relation avec d’autres travaux, nous donnons des éléments de réponse à nos questions de recherche.

Pour terminer, notre conclusion revient sur les résultats permettant de répondre à la question générale de la recherche qui met en lien les différentes questions spécifiques.

Nous amenons alors certains questionnements qui pointent les limites de cette étude, limites qui peuvent être utilisées comme ouvertures pour d’autres recherches et réflexions.