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Le cœur de ce projet était la mise en place d'un modèle numérique qui traiterait à la fois des phénomènes biologiques, hydrologiques et chimiques à l'échelle du bassin supérieur de la Moselle. Le passage à un modèle regroupant les trois comprend néanmoins des difficultés. La première est l'écart entre les temps caractéristiques des différents phénomènes. L'activité photosynthétique et la transpiration peuvent en effet varier en l'espace de quelques minutes tandis que le ré-équilibrage des transferts élémentaires dans le milieu poreux et sur le complexe d'échange du sol peut prendre des heures voir des jours. Les besoins des plantes en éléments nutritifs varient en quelques jours selon leur croissance alors que la dissolution des minéraux du sol demande plusieurs années. A ces différences temporelles s'ajoutent des constructions spatiales radicalement différentes entre les modèles biologiques et hydrochimiques. Les modèles biologiques se soucient peu des variations latérales et se concentrent sur la succession verticale des différents horizons de sol et des différentes strates de végétation. Au contraire, les modèles hydro-géochimiques conçus pour simuler des fronts de propagation ou de dissolution attachent une grande importance au variations latérales de conductivité ou de compositions chimique mais sont moins attentifs aux transfert à très petite échelle dans les premières couches du sol. Ces différences posent à la fois des difficultés conceptuelles et des problèmes de stabilité numérique. Enfin, les trois phénomènes, biologie, cycle de l'eau et géochimie, étant interdépendants, le nombre d'équations reliant les différentes variables devient difficile à gérer.

Plusieurs tentatives ont été effectuées dans le sens de ce modèle complet. Un tel modèle a été produit pour le site du Strengbach, un petit ruisseau Vosgien très bien suivi, en associant le modèle de cycle du carbone ASPECTS (Rasse et al. 2001) au modèle de dissolution minérale WiTCh (Goddéris et al 2006). Le modèle a également été utilisé pour le bassin de l'Amazone

en associant cette fois le modèle de végétation LPJ au modèle WiTCh (Roeland et al 2006) . Néanmoins, entre ces deux échelles, les ruisseaux et les grands fleuves mondiaux, aucun modèle n'a encore pu être proposé. Les échelles intermédiaires sont en effet plus difficiles à traiter car elles ne permettent plus un modèle mono-géologie et mono-végétation, et ne permettent pas encore d'avoir un comportement moyenné sur plusieurs km2.

Deux approches étaient possibles : passer d'un modèle de grand bassins continentaux à l'échelle intermédiaire, ou passer d'un modèle de petits bassins versants à un bassin plus grand et plus complexe.

La première approche a pour avantages :

de ne pas nécessiter de programmation supplémentaire. il suffirait d'utiliser le même genre de modèle sur grille plus petite et maillée plus finement,

de déjà disposer d'outils permettant d'interpoler les données manquantes,

d'intégrer directement les résultats sur toute la zone.

Cette approche comporte cependant des désavantages :

le problème du changement d'échelle. les approximations qui étaient possibles sur une maille de 1 à plusieurs km2 ne sont plus toujours valables sur une maille de 0.25 km2

(500mx500m). Le transfert de l'eau à la rivière notamment pose problème : à cette échelle il n'est plus certain qu'un ruisseau draine la maille et de plus, la présence d'une irrégularité géologique comme un faille ou un aquifère de pendage contraire à la pente peut complètement changer la manière dont le sol est drainé. A cela s'ajoutent les incertitudes liées au type de sol et à la végétation qui ne sont plus contre-balancées par l'effet de moyenne dû à la taille de la zone.

la nécessité d'avoir déjà un jeu de données très complet et bien réparti sur la zone

La seconde approche, passer des petits bassins à l'échelle intermédiaire, a pour avantages :

d'être utilisable sans avoir de données complètes sur la zone, mais en utilisant à la place des simulations caractéristiques.

qu'il est plus facile de passer d'une simulation très précise à un modèle plus approximatif en retirant ou en simplifiant des équations que de faire l'opération inverse.

d'avoir la possibilité de faire une simulation pour un point précis où l'on dispose de mesures à comparer aux résultats.

Les défauts de cette approche sont :

Le modèle est très lourd en terme de calculs ce qui induit des temps de calculs très

longs et l'accumulation de bruit numérique pouvant conduire à l'instabilité du modèle et à des résultats aberrants,

Cette complexité est superflue car les résultats seront souvent trop précis pour l'utilisation que l'on veut en faire en tant que comportement caractéristique d'une zone,

Ce modèle demande des données extrêmement précises et régulières sur une petite

C'est la deuxième approche qui a été privilégiée ici pour plusieurs raisons. Tout d'abord les données existantes sur le bassin sont regroupées sur de petites zones où elles sont très précises, laissant entre ces points de grandes superficies mal connues. Cela avantage considérablement la mise en place de modèle sur de petites superficies caractéristiques de plus grandes zones. De plus le couple de modèle ASPECTS-WiTCh avait déjà été utilisé sur le Strengbach tandis que le modèle BERNI (LPJ-WiTCh) n'avait pas encore été développé. Le choix qui a été fait était de reprendre le couple ASPECTS-WiTCh et l'appliquer à d'autres petits bassins bien documentés. L'utilisation de ces deux modèles posait cependant quelques difficultés :

Le modèle original était capable de reproduire les concentrations mesurées dans le sol. Cependant, il s'était révélé incapable de reproduire les concentrations observées dans la rivière. Or c'est justement la concentration de la rivière que l'on cherche à reproduire.

Le modèle avait été développé et calibré sur un site particulier et extrêmement bien

suivi. Utiliser ce modèle sur d'autres sites allait nécessiter un certain nombre d'ajustements et de modifications pour tenir compte des fonctionnements différents d'autres sites dans les Vosges.

Ses tests de sensibilité avaient révélé qu'il était très sensible à la présence de phases minérales secondaires ne représentant que quelques pour cent des minéraux du sol. Il fallait donc vérifier la sensibilité du modèle à ces petites variations minéralogiques avant de pouvoir en généraliser les résultats sur une plus grande zone.

La première partie de ce chapitre décrit le modèle et les modifications qui y ont été apportées. La deuxième et la troisième présentent ensuite sa mise en œuvre sur 2 sites de lithologies contrastées, l'un sur grès, l'autre sur granite et discutent de la sensibilité des résultats aux données et de la possibilité de généraliser ces résultats.

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