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L’articulation du genou est l'une des articulations biologiques les plus complexes du corps humain, à la fois solide, flexible et résistante. Elle présente, en effet, le paradoxe de devoir assurer des fonctions antagonistes comme celle de transmettre des charges très importantes et celle d’assurer la mobilité et la stabilité de la jambe (Hafedh Marouane, 2012). En raison de son emplacement distal dans le corps, de ses grands mouvements relatifs et en raison des charges importantes qu'elle supporte (poids du corps et les charges externes), cette structure est très susceptible aux blessures qui touchent à la fois les articulations tibio et patelo-fémorales (TF et PF).

La lésion du ligament croisé antérieur (LCA) est l’une des blessures les plus fréquentes au genou, avec une prévalence beaucoup plus élevée chez les femmes que chez les hommes (Agel, Arendt, & Bershadsky, 2005; Hutchinson & Ireland, 1995; Jones & Rocha, 2012; E. G. Meyer, Baumer, Slade, Smith, & Haut, 2008); Hutchinson and Ireland 1995; Jones and Rocha 2012; Meyer et al. 2008). Cette lésion est la blessure sportive la plus courante avec ~ 100000 nouvelles blessures par an aux États-Unis à un taux de reconstruction de ~ 50% (Jones & Rocha, 2012). Elle est, généralement, accompagnée par une perte au niveau de la stabilité sagittale et rotatoire de l'articulation du genou (A. A. Amis, 2012; K. L. Markolf, Gorek, Kabo, & Shapiro, 1990) et entraîne, également, des effets débilitant à long terme. En effet, les maladies dégénératives comme l'arthrose (OA) sont évidentes dans le genou affecté, peu de temps après la chirurgie reconstructive (Daniel et al., 1994; Lohmander, Östenberg, Englund, & Roos, 2004). Cette dernière affecte le genou plus que tout autre articulation porteur de poids dans le corps humain et est présente dans ~ 13% de la population générale et > 70% dans la population de plus de 65 ans aux États-Unis (Guilak, 2011). La prothèse du genou est rapportée comme une procédure chirurgicale efficace et fiable, permettent le soulagement des douleurs, l’amélioration fonctionnelle et la satisfaction du patient atteint d'arthrite du genou en phase terminale (Bourne, Chesworth, Davis, Mahomed, & Charron, 2010; Bourne, McCalden, MacDonald, Mokete, & Guerin, 2007). Sur la base de ce succès et d'un nombre croissant de candidats chirurgicaux atteints d'arthrite avancée du genou, la demande d'arthroplasties totales du genou devrait augmenter de 673% à 3,48 millions de procédures aux États-Unis d’ici 2030 (Kurtz, Ong, Lau,

Mowat, & Halpern, 2007). Ainsi, une bonne compréhension de la biomécanique de l'articulation du genou est nécessaire pour améliorer à la fois la prévention et le traitement de ces blessures.

Dans ce contexte, l'un des buts les plus importants de la recherche en biomécanique du genou est de bien comprendre les risques derrière les blessures et les dégénérescences qui touchent l’articulation, telle que la rupture du LCA. Toutefois, ces risques sont probablement multifactoriels (Hashemi et al., 2010; Renstrom et al., 2008). Ils peuvent être la combinaison des variables anatomiques, neuromusculaires, génétiques et environnementales (Arnason, Gudmundsson, Dahl, & Johannsson, 1996). Celles liées à l’anatomie (la hauteur, le poids, l’alignement anatomique, la largeur de l’échancrure fémorale, la taille du LCA, l’angle Q et la laxité antéropostérieure) ont été bien étudiées et il est prouvé que chacune peut jouer un rôle important qui prédispose l’individu à un risque de lésion du LCA (Hashemi et al., 2010). Mais de nos jours la morphologie articulaire, comme autre facteur de risque, est celle qui suscite le plus d'intérêt (Matsuda et al., 1999; Stijak, Herzog, & Schai, 2008). Cependant, du fait de la complexité du problème et de la diversité des méthodologies utilisées, une controverse existe entre les différents travaux qui ont étudié l'effet de la pente tibiale postérieure (PTP) sur la réponse du joint. En effet, bien que les études basées sur l'analyse des images radiographiques supportent l’hypothèse que la géométrie du plateau tibial est associée aux lésions du ligament croisé antérieur (Boden, Breit, & Sheehan, 2009a; Brandon et al., 2006; Hashemi et al., 2008; Hashemi et al., 2009; McLean, Lucey, Rohrer, & Brandon, 2010; Sonnery-Cottet et al., 2011), les études in-vitro (Fening et al., 2008; Giffin, Vogrin, Zantop, Woo, & Harner, 2004; Nelitz et al., 2013) l'ont rejeté. Toutefois, ces derniers restent douteux vu que l'ostéotomie antérieure, qui est généralement utilisée dans les études cadavériques pour étudier l'effet des changements de la PTP, ne conserve pas les insertions ligamentaires (et donc les orientations et les déformations primaires des ligaments). La modélisation numérique a l’avantage de contourner ces lacunes en modifiant l’une des composantes tout en gardant inchangeable le reste de la structure. À noter également que les facteurs de risques liés aux chargements externes ont été étudiés dans des études in-vitro où la rupture du LCA a été produite dans des genoux cadavériques fléchis à plusieurs angles de flexion sous l'action d'une grande force de compression appliquée seule (E. G. Meyer et al., 2008; E. G. Meyer & Haut, 2005) ou combinée avec un chargement du quadriceps (Wall, Rose, Sutter, Belkoff, & Boden, 2012).

Dans le but de faire face à ces problèmes affectant le joint du genou, plusieurs modèles analytiques et d’éléments finis (EF) avec différents degrés de précision et de raffinement ont été élaborés (M Adouni & Shirazi‐Adl, 2014a; Haut Donahue & Hull, 2002; Moglo & Shirazi-Adl, 2005; Pena, Calvo, Martinez, & Doblare, 2006; K.B. Shelburne, Torry, & Pandy, 2006; Wang et al., 2014). Ils se sont présentés comme une alternative fiable aux méthodes expérimentales qui ont des limitations majeures, principalement liées à leurs coûts élevés, les difficultés liées aux précisions des mesures (contraintes et forces de contact) et à la reproduction parfois impossible de certaines conditions (comme par exemple la variation de la PTP). En outre, les modèles EF se sont révélés être en mesure de fournir un éclaircissement précieux sur la biomécanique articulaire, les effets des différents paramètres impliqués et les propriétés mécaniques des tissus biologiques, tout en réduisant le coût et le temps (R. Shirazi, Shirazi-Adl, & Hurtig, 2008). Toutefois, les modèles analytiques sont sujets à des simplifications/hypothèses pouvant affecter les conclusions tirées de ces études. À date, la modélisation numérique détaillée de l'effet de la morphologie articulaire sur la réponse passive/active de l'articulation, l’effet de certaines simplifications (genou 2D, 1D), l’effet de la cinématique/cinétique dans le plan frontal et la position du centre de contact du genou durant la marche ou sous l’action d’une force physiologique comme la force de compression sont des études à effectuer.

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