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Interventions visant à améliorer le métabolisme

PARTIE II : UN METABOLISME BOULEVERSE PAR LES ANNEES

A. Altérations métaboliques liées à l’âge chez l’Homme

IV. Interventions visant à améliorer le métabolisme

Des changements conséquents de l'homéostasie métabolique et l’environnement inflammatoire chronique aggravent le déclin fonctionnel physiologique au cours du vieillissement, créant un état permissif pour l'incidence et la progression de certaines

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maladies. De plus, compte tenu des preuves que l'obésité fournit un riche réservoir de réactions inflammatoires, les interventions nutritionnelles visant à contrôler la masse corporelle seront probablement également efficaces. De même, l'exercice est proposé pour réduire la morbidité en améliorant les paramètres métaboliques.

1. Exercice physique

Selon les gériatres, la durée optimale de chaque exercice par jour devrait être comprise entre 30 et 45 minutes pour les personnes âgées fragiles et entre 45 et 60 minutes pour les adultes pré-fragiles (Theou et al., 2011). La durée appropriée dépend de l'état de fragilité, de l'âge et de la cohérence de la participation à l'exercice. Les participants doivent considérer leur entraînement comme un engagement à long terme, car les personnes âgées fragiles peuvent rapidement perdre des gains de forme physique à la fin de l'exercice (Cadore et al., 2014). L’OMS recommande aux personnes âgées de plus de 65ans de pratiquer une activité modérée de 150 min ou une activité intense de 75 min au moins 3 jours par semaine afin de maintenir leur santé. Par ailleurs, une méta-analyse de 2012 a révélé que des exercices physiques chez les personnes entre 60 et 85 ans, définies comme fragiles ou pré-fragiles, sont bénéfiques (de Vries et al., 2012).

Afin de déterminer quels sont les mécanismes ou voies de signalisation impliquées dans ces améliorations physiques et métaboliques, des études ont été effectuées chez l’animal. Lors d’un exercice physique le rapport 𝑁𝐴𝐷+

𝑁𝐴𝐷𝐻 augmente, activant ainsi la SIRT1 qui

désacétyle PGC1α, qui lui active la glycolyse et l’oxydation des lipides au niveau du foie (Rodgers et al., 2005). En parallèle, le rapport 𝐴𝑀𝑃

𝐴𝑇𝑃 augmente ce qui active l’AMPK et permet

l’activation de Nfr1 impliquée dans la biogenèse mitochondriale (Bergeron et al., 2001). De plus l’AMPK permet la translocation de GLUT4, notamment au niveau du TAB permettant une meilleure utilisation du glucose (Yamaguchi et al., 2005). Ces deux premières voies de signalisation permettent donc une meilleure utilisation des substrats par les tissus métaboliques.

Au cours du vieillissement, l’ADN mitochondrial devient instable, et l’exercice physique semble prévenir cette instabilité chez la souris atteinte de progéria (Safdar et al., 2011). De plus, chez le rat et l’Homme, l’exercice permet d’améliorer l’activation des mécanismes de réparation de l’ADN (Parise et al., 2005; Radák et al., 2002). Comme évoqué dans la Partie I de ce manuscrit, avec l’âge on observe une diminution de la longueur des télomères, ce phénomène serait prévenu par l’exercice physique dans les leucocytes chez le sujet âgé (LaRocca et al., 2010), ainsi que dans les cellules cardiaques chez la souris (Werner et al., 2008) suggérant un retardement de la sénescence réplicative.

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En 2013, une modification du profil épigénétique dans les cellules du TAB de sujet âgé a été démontrée. Ce profil a pu être totalement « rajeunit » suite à 6 mois d’exercice physique avec des modifications particulièrement importante au niveau métabolique (Rönn et al., 2013). L’exercice physique est inversement corrélé à la quantité d’ARNm de p16INK4A

(Liu et al., 2009). Schafer et ses collaborateurs ont montré que dans un contexte d’obésité l’exercice physique permet d’améliorer la tolérance au glucose et diminuer la masse grasse viscérale, associé à une diminution de la sénescence et du SASP dans le TAB viscéral (Schafer et al., 2016). Enfin, il a été montré qu’après 12 semaines de nage quotidienne chez le rat âgé, la sénescence et l’inflammation diminuent surtout au niveau du foie, suggérant une amélioration métabolique et une meilleure fonctionnalité de ce tissu (Huang et al., 2013). L’exercice physique permet donc de diminuer l’état de sénescence et le SASP associé, ce qui améliore les paramètres métaboliques globaux.

2. Aspect nutritionnel

Les premières études reliant la restriction calorique et le vieillissement ont été effectuées chez l’animal et ont concerné uniquement la longévité. En effet, chez le

C.elegans, la restriction calorique augmente la durée de vie (Wei et al., 2008). Il en est de

même pour S. cerevisiae, mais il s’est avéré que diminuer la teneur en glucose suffisait pour obtenir ces effets (Ocampo et al., 2012). Chez l’Homme, de nombreuses études ont montré les effets bénéfiques de la restriction calorique chez des personnes en surpoids non obèses non diabétiques. C’est le cas de l’étude CALERIE-1 qui propose une restriction calorique de 20% sur 6 mois et les premiers résultats montre une baisse de l’insulinémie à jeun (Heilbronn et al., 2006). Une récente étude a montré que deux années de restriction calorique de 15% chez l’Homme permettait de diminuer l’inflammation systémique et ainsi améliorer la santé de ces personnes (Redman et al., 2018). Une étude très intéressante menée chez le singe Rhesus (Macaca mulatta), a montré les bienfaits de la restriction calorique (Colman et al., 2009). En effet, dès l’âge adulte (entre 7 et 14 ans) une restriction alimentaire progressive de 30% permet d’augmenter la survie de ces animaux associée à une amélioration considérable de l’homéostasie du glucose. Une étude quasi similaire menée au NIA (National Insitute of Aging) ne montre pas d’avantage lié à la restriction calorique et ceci serait dû à une plus faible teneur en sucrose et une initiation de la restriction calorique décalée par rapport à l’étude précédente (Mattison et al., 2012). Cependant, la restriction calorique induit un retard significatif de l'incidence de la morbidité liée à l'âge (Mattison et al., 2017). Ces études montrent que la diminution des voies métaboliques associées à l’utilisation du glucose permet d’augmenter la longévité. Mais chez la D. melanogaster, une diminution de la quantité d’acides aminés suffit à allonger sa durée

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de vie (Min and Tatar, 2006), au contraire une augmentation la diminue (Grandison et al., 2009), supposant que l’inhibition de la voie mTOR (activée par les acides aminés principalement) par de la rapamycine serait un excellent mimétique de la restriction calorique. Ces résultats ont été confirmés chez la souris très récemment où le contenu en protéines apparait aussi déterminant pour la longévité que le contenu en carbohydrates (Solon-Biet et al., 2014; Yoshida et al., 2018). Dans plusieurs modèles cellulaires, une forte concentration en glucose induit une sénescence cellulaire (Prattichizzo et al., 2018) alors que la restriction en glucose sur des cellules humaines permet de diminuer l’expression de p16INK4A via une augmentation de l’expression de SIRT1 (Li and Tollefsbol, 2011).

Les effets de la restriction calorique chez l’Hommr de 30 à 60 ans et le rat de plus d’un an ont été comparés en termes de profil de génique, afin d’étudier les voies métaboliques impliquées (Mercken et al., 2013). La restriction calorique induit un profil transcriptomique plus « jeune » au regard du métabolisme énergétique (cycle de Krebs, glycolyse et chaine respiratoire mitochondriale) et une diminution de la voie de l’insuline/IGF- 1. Une autre étude menée sur un an chez des personnes âgées de 50 à 60 ans montre une amélioration des paramètres métaboliques associée à une diminution du TAB viscéral, confirmant que la masse TAB viscéral est inversement corrélé à une bonne santé (Racette et al., 2006). Chez la D. melanogaster il existe 7 insulin-like-peptide (dilp1 à 7), avec dilp6 qui est fortement exprimé par le TAB à l’âge adulte. Lors d’un jeûne, FOXO est induit, permettant la transcription de dilp6. Ce dernier agit comme un agoniste biaisé du récepteur à l’insuline (IR) et permet ainsi un allongement de la longévité associé à une augmentation de la masse du TAB (Bai et al., 2012).

L’ensemble de ces résultats montrent qu’au cours du vieillissement, la modulation de différentes voies impliquées dans le métabolisme comme celles de l’insuline, de FOXO ou encore de mTOR permet d’améliorer les fonctions métaboliques et poussent les recherches vers de nouvelles cibles thérapeutiques afin d’opérer un meilleur contrôle métabolique au cours du vieillissement.