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INTERPRETATION DES VARIATIONS DU SIGNAL MAGNETIQUE

1. Introduction

Ce chapitre a pour but de mettre en évidence les paramètres qui peuvent influencer la susceptibilité magnétique. Nous aborderons notamment plus en détail le lien entre la SM et les variations du niveau marin. L’influence de la morphologie de la plate-forme sera également discutée par la comparaison de résultats de mesures de SM sur des échantillons provenant des plates-formes belge et canadienne et de sondages canadiens recoupant des atolls.

Pour aller plus avant dans la compréhension des processus à l’origine des variations de la susceptibilité magnétique, il est important d’identifier les minéraux porteurs de ce signal. Pour ce faire, des analyses de courbe d’hystérésis ont été réalisées. Ensuite les différentes origines possibles de ces minéraux seront discutées. En effet, l’hypothèse la plus couramment admise est une origine détritique des minéraux magnétiques ; c’est celle qui a été retenue de préférence dans ce travail, mais nous nuancerons ce choix et aborderons l’influence d’autres facteurs.

L’ensemble des résultats de analyses de susceptibilité magnétique est repris dans l’annexe 3.

2. Susceptibilité magnétique et variations environnementales

Dans le chapitre VI, nous avons mis en évidence le lien entre la courbe d’évolution de la susceptibilité magnétique et la courbe d’évolution des microfaciès. Des graphiques d’évolution de la susceptibilité magnétique par rapport aux microfaciès vont permettre de confirmer ce lien.

2.1. Belgique

Le graphique d’évolution de la SM par rapport aux microfaciès a été réalisé sur les valeurs moyennes des coupes d’Aywaille, Barse, Netinne, Neuville, Tailfer et Villers (Figure VIII.1) du modèle de faciès de plate-forme sud. Les coupes de Tilff et Colonster n’ont pas été reprises ici car elles montrent un comportement particulier (essentiellement l’absence de lien direct entre la SM et les séquences de quatrième ordre et l’absence d’augmentation nette de la SM au passage entre les unités sédimentaires biostromale et lagunaire).

Figure VIII.1: évolution de la SM moyenne par rapport aux microfaciès pour le modèle de plate-forme sud des coupes d’Aywaille, Barse, Netinne, Neuville, Tailfer et Villers.

Il apparaît une augmentation nette des valeurs de susceptibilité en fonction des microfaciès ; les faciès les plus proximaux montrant les valeurs les plus élevées. Cette tendance s’inverse légèrement pour les faciès les plus distaux (PFS1 à 3), peut-être à cause d’un ralentissement de la productivité carbonatée sous une certaine profondeur, qui diminue la dilution des minéraux magnétiques.

Le graphique de la Figure VIII.2 présente les mêmes données mais les valeurs de l’unité biostromale et de l’unité lagunaire sont séparées. Dans ce graphique, la différence, entre l’unité biostromale, qui montre des valeurs faibles, et l’unité lagunaire, qui montre des valeurs élevées apparaît nettement. Il semble donc que la susceptibilité magnétique soit liée aux variations de microfaciès mais également aux variations majeures du niveau marin, qui sont responsables de cette division en unités sédimentaires (les mêmes faciès présentant des valeurs moyennes plus élevées au sein de l’unité lagunaire).

Figure VIII.2: évolution de la SM moyenne par rapport aux microfaciès du modèle de plate-forme sud et par rapport aux unités sédimentaires pour les

En ce qui concerne la partie supérieure du Frasnien, un graphique a été réalisé pour la coupe de Chaufontaine qui est une des seules à montrer presque tous les faciès du modèle de rampe supérieur (Figure VIII.3). Il n’apparaît pas de lien entre les faciès et la SM.

Figure VIII.3: évolution de la SM moyenne par rapport aux faciès du modèle de rampe supérieur pour les coupes de Chaudfontaine.

Dans le chapitre IV (paragraphe 1 sur les corrélations), nous avons vu que les corrélations par SM fonctionnent moins précisément pour la partie supérieure du Frasnien que pour la partie moyenne. Il est difficile d’expliquer ces différences mais il est important de signaler que les échantillons de la Formation d’Aisemont sont très fortement hétérogènes, contrairement à ceux de la partie moyenne du Frasnien. L’argile est souvent concentrée en niveaux ; d’autres niveaux montrent une texture grainstone et bien souvent, les rugueux massifs constituent une grosse partie de la roche. La technique de SM, qui impose de mesurer des valeurs sur des échantillons centimétriques, ne permet probablement pas dans ce cas-ci d’obtenir des valeurs moyennes très représentatives.

En conclusion, nous pouvons dire que, pour la partie moyenne du Frasnien, la SM évolue en fonction des microfaciès et des unités sédimentaires mais que ce lien n’existe pas pour la partie supérieure du Frasnien.

2.2. Canada

Le cadre géologique du Frasnien de l’Alberta est présenté dans le chapitre II. Pour rappel, le contexte sédimentaire est mixte, la plate-forme carbonatée se développant au sein d’un bassin dominé par les sédiments clastiques fins (Whalen et al., 2000). Au Frasnien, un système de plates-formes carbonatées attachées ou isolées s’est développé. Pour des raisons pratiques, nous avons essentiellement étudié des sondages au sein d’atolls (plates-formes isolées) mais le levé d’une coupe (dolomitisée) sur la plate-forme attachée a également été réalisé.

Figure VIII.4: Evolution de la SM pour les 2 sondages dans Golden Spike et les 2 sondages recoupant Redwater Reef. Les colonnes lithologiques se trouvent en annexe 1, Fiches 15 et 16, Fig 15.2, 15.3, 16.2 et 16.3. Les cycles Wd1, 2 3 et BHL correspondent aux séquences définies par Potma & al. (2001)

En ce qui concerne les plates-formes isolées, nous avons choisi d’étudier trois atolls (Golden Spike, Redwater Reef et Judy Creek) recoupant à peu près tout le Frasnien et comprenant deux sondages par édifice pour effectuer des comparaisons au sein de chaque atoll et entre les atolls. Lorsque l’on observe les courbes d’évolution de la SM (Figure VIII.4), la première chose qui apparaît est qu’une grande majorité des valeurs de SM sont négatives. On remarque également que, contrairement à la plupart des coupes de la partie moyenne du Frasnien de Belgique, qui montrent des tendances relativement continues à l’augmentation ou à la diminution de SM, les courbes de susceptibilité des sondages canadiens montrent plutôt des pics isolés, avec souvent un seul échantillon qui ressort du bruit de fond négatif. Ces courbes n’ont pas permis la réalisation de corrélations détaillées entre les atolls.

Au sein de la plate-forme attachée, l’affleurement de Door Jamb Mountain recoupe la Formation de Cairn, constituée essentiellement de biostromes foncés, et la Formation de Southesk, constituée de calcaires lagunaires clairs. La courbe de SM est plus proche de ce que l’on observe en Belgique, avec des tendances à l’augmentation ou à la diminution des valeurs de SM (Figure VIII.5).

2.3. Comparaison des valeurs moyennes de SM belges et canadiennes

Figure VIII.6: valeurs moyennes de susceptibilité magnétique pour les Formations d'Aisemont, de Lustin et le Membre du Lion (La Boverie) en Belgique et pour l’affleurement

de plate-forme attachée et les 6 sondages recoupant les 3 atolls au Canada.

Une comparaison des valeurs moyennes de SM pour les différentes zones des plates- formes belges et canadiennes (Figure VIII.6) montre que les valeurs sont relativement élevées pour la Belgique et toujours plus faibles pour le Canada. En Belgique, la Formation d’Aisemont présente des valeurs très élevées par rapport à la Formation de Lustin et surtout par rapport au Membre du Lion (les mesures effectuées sur la coupe du Membre du Lion à La Boverie ont été réalisées par F. Boulvain). Il y a un ordre de grandeur 10 entre les valeurs des coupes canadiennes de la plate-forme attachée et la Formation d’Aisemont et les valeurs moyennes issues des analyses effectuées sur les atolls sont presque nulles.

Contrairement à l’étude réalisée sur les affleurements belges, des lames minces n’ont pas été réalisées de manière régulière sur les échantillons canadiens et, de ce fait, les microfaciès n’ont pas été définis. Des observations sur sondages et sur le terrain ainsi que les travaux sédimentologiques réalisés sur le Frasnien de surface et de subsurface canadien (Weissenberger, 1994; Whalen et al., 2000) ont cependant permis la définition d’un certain nombre de macrofaciès. Ceux-ci sont relativement proches des faciès belges et, pour faciliter les comparaisons, les microfaciès de plate-forme sud belges correspondants sont mentionnés entre parenthèses.

(1) calcaires à crinoïdes (PFS1 à 4): calcaires argileux, parfois nodulaires, souvent riches en crinoïdes et/ou brachiopodes, interprétés comme se déposant sous la zone d’action des vagues, en zone d’avant-récif,

(2) calcaires à stromatopores lamellaires (PFS5): calcaires clairs à stromatopores lamellaires, souvent bien conservés, interprétés comme formant des biostromes (ou biohermes, l’aspect tridimensionnel étant difficilement accessible en sondage) sous la zone d’action des vagues,