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Interprétation des résultats en rapport avec les problématisations théoriques et

Au regard de la problématisation théorique et pratique, l’éthique est perçue par les professionnels de santé interrogés comme devant être au cœur des pratiques de soins. Ce questionnement est inhérent au soin et aux situations d’inconfort auxquelles le thérapeute est souvent confronté quand il s’agit de démence. Pour autant, le constat d’une carence d’éthique est pointé du doigt, dans la réalité des pratiques.

4.1.1 L’éthique : une place centrale contrebalancée par un constat de carence dans les pratiques

Plusieurs raisons expliquent ce constat. La première tient à l’héritage historique lié à la culture du soin en France comme dans la plupart des pays méditerranéens, où les principes de bienfaisance mais surtout de non-malfaisance prédominent. D’autre part, à cette culture caritative du soin s’ajoute la persistance du modèle biomédical qui instaure un thérapeute expert s’inscrivant souvent au travers d’une technicité du soin. En outre, les valeurs des institutions sont mises en avant, notamment au travers des orientations données par leur encadrement. En effet, si l’institution ne véhicule pas des valeurs humanistes, les ergothérapeutes et l’ensemble des soignants attachés à ces valeurs seront donc confrontés à des dilemmes éthiques. Le professionnel de santé évoluant dans un système de soins bien réel, cette réalité le conduirait soit à s’adapter en perdant ses propres valeurs, soit à lutter pour préserver ses valeurs et à finalement, s’épuiser. Enfin, l’environnement matériel des EHPAD contribue également à expliquer ce constat. En effet, les règles strictes d’organisation et de fonctionnement de ces lieux de vie ne permettent pas une approche très personnalisée, du sujet âgé. C’est d’autant plus le cas lorsque ce sujet souffre de démence. Deux types d’effets négatifs sont soulignés. A la fois, ce qui est lié au fonctionnement de l’institution mais aussi à la fois des disfonctionnements qui sont des dérives tacites, directement liées aux règles de

fonctionnement de l’institution Ce contexte contribue donc à expliquer une certaine carence éthique.

4.1.2 Valeur ajoutée de la réflexion éthique dans les pratiques

Toutefois, dans le cadre de l’EHPAD, les résultats démontrent la valeur ajoutée d’une réflexion éthique menée par une équipe pluridisciplinaire, face aux dilemmes auxquels sont confrontés les soignants. Plusieurs notions ont émergé à partir de ce constat. En effet, le questionnement éthique ne se vit jamais seul mais passe impérativement par la confrontation des points de vue de chaque membre de l’équipe. Le processus de pondération consistant pour une situation donnée à privilégier un principe au détriment d’un autre, dans une temporalité bien définie est confirmé. L’importance donc de la casuistique l’est tout autant. Une réflexion à long terme et non assujettie à l’immédiateté est aussi privilégiée.

A travers l’interprétation des résultats, l’éthique apparait donc contribuer au phénomène d’acceptation de l’intervention de l’ergothérapeute confronté au refus de soins d’une personne démente. Les professionnels de santé interrogés nous expliquent en quoi. En effet, il ressort que l’éthique transparait au travers du respect que l’ergothérapeute porte à la personne. Cela concerne son rythme de vie, son rythme de sommeil, ses habitudes de vie, le respect de ses capacités résiduelles, ses activités signifiantes, sa réalité, sa temporalité, etc… L’éthique se révèle au travers de la posture de l’ergothérapeute qui laisse une place à cette forme de « compétence » du résident dément, dans l’ici et le maintenant. L’éthique se révèle au travers de la communication relationnelle que l’ergothérapeute établit avec la personne démente. Elle se traduit par le regard, l’établissement d’une relation horizontale, l’empathie, l’authenticité, l’acceptation inconditionnelle de cet être. En résumé, il s’agit d’une approche centrée sur la personne. L’éthique se traduit aussi par une cohérence et une flexibilité, dans les actions menées auprès de ce résident dément. Il ressort donc que souvent l’ergothérapeute est amené à jouer un rôle moteur dans la transmission d’une prise en soins éthique du résident, par les équipes soignantes qui sont le plus souvent à son contact. Cette transmission d’approche effectuée au cas par cas, s’inscrit dans une dimension de coopération entre ergothérapeute et soignants, autour du résident dément. L’éthique se dévoile également dans l’appréciation en équipe pluridisciplinaire, de la « balance bénéfices / risques », lorsqu’est mise en jeu la sécurité de la personne démente, du fait de son anosognosie ou de son absence de conscience du danger.

L’éthique, c’est enfin la recherche d’une sorte d’alliance thérapeutique, certes atypique autant dans son existence que dans sa temporalité. Ce cheminement sinueux partant de la demande de la personne pour tenter de se rapprocher des objectifs thérapeutiques de l’ergothérapeute, au moyen d’une recherche d’assentiment, ne peut s’improviser sans formation spécifique.

4.1.3 L’éthique : constat d’un manque de formation

C’est ainsi que l’interprétation des résultats met en lumière un besoin très important de formation. Elle pointe le besoin pour les ergothérapeutes ainsi que pour tous les soignants étant au contact d’une personne âgée démente, d’être formés de façon spécifique à prise en soins de la démence. Ce besoin de formation concerne tout autant la communication relationnelle propre à ce public. Les résultats soulignent d’autre part, la nécessité de réaliser des formations régulières de rappel pour l’ensemble du personnel soignant au sein des institutions. Enfin, les résultats relèvent l’existence possible d’un « pacte soignant » au sein duquel, chaque intervenant auprès du résident dément, qu’il soit ergothérapeute, infirmier ou aide-soignant, serait investi d’une mission de rappel des principes éthiques au coup par coup, auprès de l’ensemble des membres de l’équipe soignante. Le but recherché étant de maintenir une vigilance éthique au quotidien.

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