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Chapitre 3 : Une étude de cas

3.4 Interprétation des résultats

On peut dire que de manière générale, le transfert des connaissances consiste à trouver des façons de mettre la recherche entre les mains des utilisateurs. Certaines études ont révélé que la meilleure manière d’y parvenir est de créer des situations de rencontres entre les chercheurs et les utilisateurs mais, dans la réalité, ce n’est pas toujours facile de créer ces situations et il faut alors user d’originalité pour que les utilisateurs puissent avoir accès aux connaissances produites. Dans le cadre de cette ARUC, le processus de transfert n’a pas seulement consisté à identifier les techniques qui pouvaient être utilisées, mais bien un ensemble de principes qui doivent être suivis tout au long du projet pour s’assurer que les résultats pourront être utilisés par les gens du milieu. L’établissement de partenariats entre les milieux de pratiques et les chercheurs était à la base du transfert et les relations soutenues entre les deux parties semblent avoir été la clé pour y parvenir.

L’analyse des cinq dimensions du transfert des connaissances dans le cas précis de cette ARUC a permis de montrer un exemple de partenariat. L’objectif de cet exercice n’était pas de faire une analyse critique de ce processus, mais bien de voir comment le transfert peut se retrouver au centre d’un projet, comment il se manifeste et quels en sont les impacts. Les résultats obtenus mènent à croire que ce projet répond aux exigences conceptuelles du transfert puisqu’à chacune des dimensions étaient associées des actions réelles. Comme ce programme de subvention CRSH-ARUC était nouveau, il s’agissait d’une expérience d’apprentissage pour l’ensemble des membres et à la lumière de ce qui a été présenté en analyse, il est juste d’affirmer que le défi a été relevé. Certes, ce modèle n’est pas parfait et pourrait être amélioré à partir de certains éléments qui ont été soulevés, mais les objectifs ont généralement été atteints. Aussi, les responsables du groupe ne voulaient pas faire de la recherche- action et cette visée a également été respectée. Une confusion règne souvent entre le transfert des connaissances et la recherche-action car certaines de leurs composantes se ressemblent. Le processus de recherche dans lequel s’est lancé le groupe, même s’il était influencé par les connaissances et réflexions des utilisateurs, suivait une programmation scientifique préétablie. Pour garder son objectivité et sa scientificité, le mode de fonctionnement de la recherche-action a été mis de côté :

Il faut réfléchir au mode de partenariat à intensifier avec les partenaires membres et ne pas s’orienter nécessairement vers un partenariat de recherche, dans un contexte de recherche-action où les chercheurs seraient contraints par les intérêts des organismes. (procès verbal d’une réunion des professeurs en mai 2002)

Le groupe a gardé cette direction tout au long du projet, laquelle lui garantissait la reconnaissance scientifique des pairs et une plus grande crédibilité. La recherche action est une façon de faire qui peut convenir à certains types de recherche, mais il peut parfois y avoir un risque pour les chercheurs de se perdre dans les intérêts des utilisateurs et de devenir moins objectif face à l’objet de recherche.

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3.4.2 Le contexte actuel du transfert des connaissances

Par les objectifs qu’il s’est donné, l’OJS veut être un espace de recherche près des milieux de pratique et les chercheurs qui lui sont associés se soucient de cet aspect. Ce ne sont pas tous les projets de recherche issus de l’OJS qui sont directement associés à des partenaires sur le terrain mais le cas de cette ARUC démontre bien l’intérêt que portent plusieurs chercheurs vers le transfert des connaissances.

L’un des grands défis reste cependant de valoriser cette pratique au sein de la communauté des chercheurs puisqu’ils ne sont pas tous disposés ou intéressés par le transfert des connaissances. La question de la disponibilité est souvent un obstacle pour s’investir davantage dans les milieux de pratique car la recherche a des exigences qui ne laissent que peu de temps au chercheur. Ainsi, les chercheurs interpellés par le transfert devront réfléchir au mode usuel de diffusion des connaissances qui s’inscrit souvent dans un processus linéaire d’appropriation des connaissances. Ces derniers devront également relever le défi du temps car ils sont sollicités de tous les cotés. Comme le soulignait Monique Charbonneau, présidente directrice générale du Centre francophone d'informatisation des organisations (CEFRIO), « on attend des professeurs qu'ils consacrent leur temps à l'enseignement, à la publication d'articles dans des revues scientifiques et à la participation à des colloques. Le temps consacré à des activités de transfert n'est pas reconnu ni valorisé »15. Néanmoins, le transfert des connaissances devient peu à peu un élément important en recherche sociale, étant devenu un aspect important des demandes de subventions. Depuis 1992, l’un des objectifs du Fonds québécois de recherche sur la société et la culture est de favoriser le transfert de connaissances. On réalise donc que la volonté de faire du transfert de connaissances gagne du terrain mais que plusieurs défis restent encore à relever et que ce n’est pas tous les chercheurs qui veulent favoriser cette manière de faire la recherche. Les chercheurs sont libres d’exercer leur métier comme ils le souhaitent, mais il existe maintenant plusieurs incitatifs au transfert des connaissances. Néanmoins, il ne faudrait pas non plus que le transfert des connaissances prenne toute la place puisque, par exemple, la recherche fondamentale est aussi un élément central pour l’avancement de la science. C’est l’amalgame de tout cela qui permet de créer de nouvelles connaissances quelles soient oui ou non facilement applicables pour les milieux de pratique.

Néanmoins, cette tâche de créer des rapprochements ne revient pas seulement aux chercheurs puisque les utilisateurs doivent aussi se donner des outils pour atteindre et utiliser la recherche. Ils doivent être conscients des moyens de diffusion qui existent et développer des stratégies pour avoir accès aux divers lieux de diffusion de la recherche. Les utilisateurs ont donc un devoir de vigilance envers la production scientifique pour maintenir à jour une connaissance plus large de leur milieu et       

15 Citée dans Pierre VALLÉE, « Transfert des connaissances - Le Québec est un précurseur en innovations

ainsi élaborer des politiques ou stratégies d’intervention adaptées. Dans ce contexte, le relayeur ou l’agent d’interface devient une ressource que peuvent utiliser autant les chercheurs que les utilisateurs de façon distinctive ou en collaboration.