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2.3 A DAPTATION A L ’ APPAREILLAGE

2.3.2 Interface moignon-emboîture

ŹProblèmes / complications

L’amputation de jambe provoque fréquemment des altérations des expériences

sensorielles douloureuses et non-douloureuses (Ehde et al. 2000). Approximativement 30%

des amputés de jambe développent des complications au niveau de leurs prothèses qui les

empêchent de porter leur prothèse sur une durée prolongée, les handicapant sévèrement dans

leurs activités quotidiennes et réduisant leur qualité de vie (Chan et al. 1990). Les

phénomènes douloureux peuvent même, à la longue, engendrer des symptômes dépressifs.

Les patients amputés peuvent ainsi faire l’expérience de différents types de douleurs plus ou

moins complexes comme les douleurs intrinsèques (douleurs nerveuses, vasculaires,

articulaires...) ou extrinsèques (pressions excessives sur la peau causées par des facteurs

externes comme l’hypertrophie musculaire ou la prise de poids) au niveau du membre

résiduel (moignon) mais aussi au niveau du membre inférieur controlatéral et d’autres

régions corporelles.

Sitôt l’appareillage mis en place, les anomalies pathologiques du moignon sont de deux

ordres : persistance d’anomalies antérieures (infections, troubles trophiques, cicatrices

vicieuses etc.) ou désordres nouveaux, conséquence directe de l’appareillage et de ses

contraintes. Ces pathologies du moignon apparaissent au travers de troubles cutanés

(fréquents comme les dermatoses infectieuses, les allergies, les signes d’irritation mécanique

aux zones d’appui), de troubles vasculaires (ischémie artérielle, stase veineuse etc.) (André

et al. 1994 ; Seymour 2002). L’ensemble de ces troubles peut retentir de façon douloureuse

sur le moignon, peuvent s’y ajouter aussi les sensations de décharge électrique (névromes) ou

de brûlure (causalgies), l’épilepsie du moignon, les douleurs irradiées, les pathologies

osseuses.

Les patients amputés font aussi l’expérience de la perception de membres fantômes et de

douleurs fantômes. Le membre fantôme est la perception du segment de membre absent qui,

selon ses caractéristiques morphologiques, posturales et cinématiques, peut être perçu

comme normal ou déformé (André et al. 2001). La douleur fantôme est caractérisée quant à

elle, par la perception d’une douleur provenant de l’extrémité distale absente du membre

amputé.

Un autre problème est l’inadaptation du moignon à la prothèse qui est liée le plus souvent à

un amaigrissement du moignon qui entraîne une inadaptation progressive de l’emboîture

(André et al. 1994 ).

L’effet pseudarthrose doit lui aussi être considéré : il correspond à l’absence de consolidation

du fragment osseux laissant apparaître à ce niveau des mouvements anormaux dont

l’amplitude est plus ou moins importante. Ainsi, au niveau de l’interface moignon-emboîture,

des mouvements de torsion agissent dans les plans sagittal et frontal, rendant possible une

mobilité du moignon dans l’emboîture et un conflit cutané, voire une douleur (Becquet et al.

1996). Dans le plan frontal, l’effet pseudarthrose permet une mobilité en varus-valgus et dans

le plan sagittal, une mobilité en flexion-extension (Figures 19 et 20).

a b c

Figure 19: Couples de torsion secondaires à l’effet pseudarthrose dans le plan frontal

(a = position neutre; b = torsion en valgus; c = torsion en varus)

a b c

Figure 20: Couples de torsion secondaires à l’effet pseudarthrose dans le plan sagittal

(a = torsion en extension; b = torsion en flexion; c = appuis corrects)

Pour faire face et limiter autant que possible ces problèmes et ces complications au niveau de

l’interface, les soins apportées au moignon, le type d’emboîture utilisé (matériaux, forme...) et

l’alignement de la prothèse sont très importants.

ŹSolutions

L’emboîture assure la suspension de la prothèse, la transmission des forces au

cours de l’appui et la mobilisation de la prothèse par le membre résiduel. Par son

intermédiaire, l’amputé doit facilement mobiliser et contrôler la prothèse. Une adaptation

parfaite entre l’emboîture et le membre résiduel est indispensable pour assurer un appui franc

sans douleur quel que soit l’environnement ou l’activité du patient amputé. Tout jeu excessif

est source d’une pseudarthrose qui favorise la perte de la prothèse ou son manque de contrôle

et génère des mouvements de compensation. Le confort de l’emboîture est étroitement lié à la

qualité de la répartition des contraintes et de la diminution des pressions sur les zones

sensibles. Le choix des matériaux utilisés contribue au confort et à la tolérance cutanée. Les

vibrations issues de la prothèse et transmises par l’intermédiaire de l’emboîture constituent

une source d’informations proprioceptives précieuse pour le contrôle de la prothèse.

Historiquement, afin de limiter les nombreuses complications citées auparavant au niveau de

l’interface moignon-emboîture, le type d’emboîture « contact » a remplacé l’emboîture

« classique ». L’emboîtage contact est aussi appelé « emboîtage à forme orientée » car sa

surface intérieure ne reproduit pas en négatif la morphologie du moignon, mais, au contraire,

est contrainte à des endroits précis, dans le but essentiel d’un meilleur accrochage et d’un

maintien plus efficace de l’emboîtage sur le moignon (Deltour 1973). La répartition des

appuis est ainsi meilleure que dans l’emboîture classique. L’emboîtage contact a été conçu et

réalisé aux Etats-Unis, dès 1956, sous forme de la PTB (Patellar Tendon Bearing), traduit

souvent par commodité « prothèse tibiale basse ». Ceci en opposition avec le sigle PTS qui

désigne la prothèse tibiale supracondylienne mise au point en France en 1958 par Pierquin et

ses collaborateurs à Nancy. Il existe aussi le sigle allemand KBM (Kondylar Bettung

Munster) qui désigne la prothèse tibiale qui s’arrête à mi-condyle et mi-rotule.

Les emboîtures « contact » actuelles répartissent les appuis sur toute la surface du moignon,

assurent un meilleur confort du moignon grâce au manchon d’interface en gel, facilitent la

remusculation et la circulation du moignon.

Le manchon participe aussi au confort et à la protection du moignon dans l’emboîture.

Celui-ci est déroulé sur le membre résiduel et tient par forte adhérence cutanée. Les différents

matériaux utilisés (gel, silicone, polyuréthane), de série ou sur moulage, permettent d’éviter

les complications au niveau du moignon.

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