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1 Contexte bibliographique

1.3 Effet de la nature des ingrédients sur la libération/rétention des composés d’arôme

1.3.2 Interactions polysaccharides / composés d’arôme

L’addition de certains polysaccharides en solution aqueuse peut réduire significativement la libération de composés d’arôme, mais cet effet peut être différent dans les milieux complexes gélifiés comme les yaourts.

Dans un système simple, la mise en évidence d’une concentration limite en polysaccharides dans la solution à partir de laquelle la structure de la solution change a été bien décrite dans des gels de guar (79). En deçà de la concentration C* en gomme guar, aucun impact sur la libération des composés d’arôme n’est mis en évidence, par contre au-delà de C*, les agents de texture favorisent la rétention des composés d’arôme. Cependant il est à noter que lorsque les expérimentations sont conduites à l’équilibre thermodynamique du système, l’effet des polysaccharides (structure gélifiée) sur la rétention des composés d’arôme peut être nul, voire conduire à une plus grande libération des composés volatils.

Certains auteurs avancent que les groupes fonctionnels notamment alcools dans les polysaccharides ont comme conséquence, une diminution de l’hydrophobie globale de la macromolécule et d’où une modification des d’interactions vis-à-vis des composés d’arôme (17). Compte tenu de la diversité des classes chimiques et des propriétés physico-chimiques des composés d’arôme, les interactions moléculaires mises en évidence pour quelques composés avec quelques polysaccharides ne peuvent pas être généralisées. Afin de montrer plus clairement l’effet de chaque polysaccharide sur le phénomène libération - rétention des composés d’arôme, les travaux concernant chacun des trois polysaccharides cités précédemment sont présentés ci-dessous.

1.3.2.1 Carraghénanes

Ce polysaccharide est souvent utilisé et étudié dans des milieux laitiers notamment en présence d’autres polysaccharides tels que l’amidon.

Les λ-carraghénanes sont responsables de l’augmentation de la rétention des composés les plus hydrophobes selon Bylaite (2004) (80).

Les κ-carraghénanes n’ont pas d’effet sur la libération et la perception de l’arôme fraise dans des desserts allégés selon Gonzales-tomas (2007) (81). Cependant, d’après Misharina et al. (17), les κ-carraghénanes mettent en jeux des interactions avec les aldéhydes, les cétones et les esters. Les interactions avec les alcools sont beaucoup plus faibles et les interactions avec les lactones, le guaiacol, et le methyl anthranilate sont les moins significatives. Les interactions avec le linalool, et l’hexanoate d’éthyle seraient de nature hydrophobe (17).

Savary et al. (2007) (82) ont observé que l’ajout de λ et κ-carraghénanes à un système composé d’une phase continue d’eau et d’une dispersion d’amidon, conduit à une plus grande concentration des composés d’arôme dans la phase continue contenant les carraghénanes que dans la phase de dispersion d’amidon.

Dans une étude sur des matrices contenant des ι-carraghénanes, Juteau et al. (2004) (83) ont montré que ce polysaccharide induit une augmentation de la rétention et une diminution du transfert de masse du butanoate d’éthyle et de l’hexanoate d’éthyle mais ceci n’est pas valable avec le linalool. Par contre, Chana et al. (84) ont montré que les ι-carraghénanes en système gélifié modulent mais ne changent pas la nature des interactions avec les composés d’arôme. 1.3.2.2 Amidon

Les interactions entre les composés d’arôme et l’amidon peuvent être classées en deux catégories : premièrement, les complexes d’inclusion où les composés d’arôme sont piégés à l’intérieur des hélices d’amylose par l’intermédiaire d’interactions hydrophobes ; deuxièmement, l’implication de liaisons hydrogènes entre les groupes hydroxyles de l’extérieur des hélices d’amylose et les composés d’arôme (13, 85, 86). Certains auteurs expliquent la rétention et la vitesse de libération des composés d’arôme en partie par la structure cristalline (type-V) de l’amylose (87).

L’augmentation de la concentration d’amidon dans les gels laitiers models se traduit généralement par une diminution de la libération des composés d’arôme (2).

Certains travaux ont fait état de compétitions d’interactions entre deux composés d’arôme et l’amidon. Rutschmann et al. (88) ont montré que la complexation du décanal et de la menthone diminue la stabilité de la liaison des complexes. De même selon Wulff et al. (89), des combinaisons de complexes d’amylose avec des inclusions d’hexanal et de guaiacol peuvent être formées. Ces combinaisons impliquent de plus faibles quantités de molécules susceptibles d’être incluses dans les hélices d’amylose, comparativement à un système composé d’un seul composé d’arôme.

Les composés volatiles comme les alcohols, les aldéhydes, les terpènes et les lactones sont capables d’induire le passage de l’amylose à une structure d’hélice et d’agir en partenaires d’inclusion (90-93). Selon Tiez (2008) (94), il existe des interactions entre l’amidon et les composés d’arôme que sont l’hexanal et la menthone, mais ces interactions sont faibles. Par ailleurs, la combinaison entre ces deux composés d’arôme ne donne pas lieu à un effet de libération compétitive.

1.3.2.3 Pectines

Concernant les pectines, des liaisons de van der Waals ont été mises en évidence entre les pectines LM et les composés d’arôme dont la chaîne aliphatique contenait plus de six atomes de carbone. Braudo (2002) (95), Yoo et al. (96) ont montré que la diminution du degré d’estérification de pectines HM ou LM engendre une augmentation la libération des composés d’arôme (esters éthyliques). Les auteurs avancent l’hypothèse que la désestérification accroît le caractère hydrophile des pectines, limitant ainsi les interactions avec les composés à caractère hydrophobe. Rega et al. (2002) (97) ont montré qu’il existe une concentration en pectine (0,1 %) à partir de laquelle il y a formation d’un gel (transition sol-gel) qui engendre une diminution de la volatilité des composés d’arôme. Cependant, les auteurs n’ayant pas mis en évidence d’interaction moléculaire entre les composés d’arôme et la pectine, « l’effet réseau » (85) créé par l’enchevêtrement des pectines a été incriminé pour expliquer la diminution de la libération des composés volatils.

Les études menées sur la rétention-libération des composés d’arôme dans les yaourts donnent des conclusions différentes quant à l’effet de la pectine. En travaillant sur des yaourts allégés, Nongonierma et al. (2006) (98) ont trouvé que l’addition de pectine à un gel augmente légèrement la rétention des composés d’arôme, impliquant des interactions avec la pectine. Mais Lubbers et al. (2007) (2) ont montré qu’à partir d’une concentration de 0.1% la pectine induit une diminution de la rétention de certains composés d’arôme. De plus, selon Kora (2004) (51), la pectine a un rôle très faible dans la libération des composés d’arôme en travaillant également sur des yaourts allégés. Une autre étude menée sur des yaourts (99) indique que la pectine n’a pas d’effet sur la libération en bouche des composés d’arôme, en accord avec ce que nous avons trouvé lors d’une étude récente (100). En effet, les coefficients de partage de 13 composés (esters, aldéhydes et cétones) d’arôme mesurés dans l’eau, un gel de carraghénane et un gel de pectine étaient globalement similaires. Toutefois, l’interprétation de la modélisation de type QSAR fait état de l’implication des surfaces chargées positivement, dans la rétention des composés d’arôme par le gel de pectine.

En résumé, étant donné la divergence des auteurs sur le rôle de la pectine, il n’est pas simple de définir clairement son rôle vis-à-vis de la rétention ou de la libération des composés d’arôme sur la base des articles publiés.