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Interactions entre les cellules de LLC et les cellules du microenvironnement

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3. Physiopathologie de la leucémie lymphoïde chronique

3.3.2 Interactions entre les cellules de LLC et les cellules du microenvironnement

Dans le ganglion, les cellules leucémiques reçoivent des signaux de survie et de prolifération par leurs interactions avec diverses cellules du microenvironnement. De nombreuses cytokines sécrétées par les cellules stromales jouent un rôle primordial dans la survie et la maturation des lymphocytes B. En retour, ces derniers sécrètent des facteurs solubles qui façonnent le microenvironnement (figure 14).

Interactions LB-LLC et cellules folliculaires dendritiques

Les FDC, situées dans les centres prolifératifs, activent les LB-LLC par leur capacité à présenter l’antigène, ainsi que par la sécrétion de facteurs solubles tels que BAFF. Dans un modèle murin de LLC, le dialogue entre les FDC et les cellules tumorales met en jeu les axes CXCR5-CXCL13 et récepteur à la lymphotoxine beta (LTβR)/lymphotoxine alpha beta (LTαβ). Ce dialogue est essentiel à la localisation des LB-LLC dans les follicules lymphoïdes et à la progression de la LLC dans ce modèle (81).

Interactions LB-LLC et cellules « nurse-like »

Les Cellules Nurse-Like (NLC) sont des cellules accessoires essentielles à la survie et la prolifération des cellules tumorales dans le ganglion. Elles sont dérivées de la lignée myélomonocytaire et considérées comme des macrophages associés aux tumeurs (TAM). Après une culture à haute densité de cellules mononuclées du sang périphérique (PBMC) de patients atteints de LLC, les monocytes se différencient spontanément et protègent les LB- LLC de l’apoptose (82, 83). Dans les ganglions, les LB-LLC activés sécrètent des chimiokines, telles que les CCL3 et CCL4, qui attirent les NLC (84, 85). En retour, les NLC attirent par chimiotactisme et induisent la survie des cellules tumorales par la sécrétion des CXCL12 et CXCL13. Les NLC expriment également le CD31, BAFF et APRIL (A PRoliferation-Inducing Ligand) et présentent des antigènes, tels que la calréticuline ou la vimentine, qui activent le BCR des cellules tumorales (83, 85, 86). De plus, les cellules stromales médullaires sécrétent des vésicules extracellulaires (microparticules et exosomes), générant ainsi une résistance à l’apoptose et une augmentation des capacités de migration des cellules B (87).

Le phénotype des NLC a été particulièrement étudié. En effet, les macrophages activés peuvent acquérir deux profils phénotypiques ayant des propriétés distinctes : les macrophages M1 et M2, par analogie avec la polarisation Th1 et Th2 des lymphocytes T. Stimulés par des produits bactériens ou des cytokines pro-inflammatoires, les macrophages M1 produisent des cytokines pro-inflammatoires (l’IL12 et l’IL23), de l’oxyde nitrique et des réactifs oxygénés intermédiaires (ROI) et montrent une activité de présentation d’antigène élevée. Ils amplifient la réponse Th1 et sont également impliqués dans l’immunité anti- tumorale. Plutôt observés dans des réactions de type cicatrisation ou en cas de réponse à une infection parasitaire, les macrophages M2 sécrètent quant à eux des cytokines anti-

inflammatoires comme l’IL10 et à très faible niveau l’IL12. S’ils sont impliqués dans la promotion de la réponse Th2 et le remodelage tissulaire, leur capacité à promouvoir la croissance tumorale a également été démontrée (88). In vivo, dans le modèle murin µ-TCL1, les NLC dérivées des monocytes expriment un phénotype dit M2 et pro-tumoral. La déplétion de ces macrophages par le clodronate ou un anticorps anti-CSF1R (récepteur indispensable à la transition monocyte-macrophage) permet de contrôler la progression de la LLC (89, 90).

Enfin, la capacité des LB-LLC à sécréter des exosomes permet aux cellules stromales d’acquérir un phénotype de type « Cancer Associated Fibroblast » et apporte ainsi un nouvel éclairage sur la capacité des LB-LLC à remodeler leur microenvironnement tumoral (91).

Interactions LB-LLC et lymphocytes T

Dans la LLC, le dialogue entre les lymphocytes B et les lymphocytes T est nécessaire à la prolifération tumorale. En effet, une stimulation avec du CD40L augmente la survie des cellules B tumorales in vitro (92). En revanche, la capacité de réponse à cette stimulation in

vitro diffère entre les patients stables et les patients évolutifs (93). Dans les ganglions, ces

cellules B de LLC secrètent les chimiokines CCL3, CCL4, CCL22 et CCL27 qui permettent le recrutement des lymphocytes T (94).

L’existence d’une altération de ce dialogue T-B contribue également au déficit immunitaire T observé dans cette maladie. Le répertoire lymphocytaire T est profondément modifié dans la

LLC. Il est classiquement observé une augmentation oligo-clonale des LT CD8+ qui ont un

phénotype activé mais qui présentent un défaut de cytotoxicité et de capacité à proliférer.

Parmi la population CD4+, il existe une augmentation du nombre de lymphocytes T

régulateurs, qui a été corrélée à l’évolutivité de la maladie (95).

Les lymphocytes T CD4+ et particulièrement les T CD8+ expriment des marqueurs

phénotypiques dits d’épuisement (ou « T-cell exhaustion ») tels que le PD1 (Programmed Death 1) qui interagit avec le ligand de PD1 (PD1-L) qui lui est présent à la surface des lymphocytes B tumoraux (96, 97). Plusieurs études montrent un défaut de formation de la synapse immunologique entre les LB-LLC et les lymphocytes T. Ce défaut est lié à une diminution de la fonction présentatrice d’antigène des lymphocytes B, à une altération des interactions entre les molécules de co-stimulation (CD40/CD40-L) et à un défaut de

polymérisation d’actine au niveau des lymphocytes T (98-100).

En plus de ces contacts cellulaires, les LB-LLC secrètent des cytokines immunomodulatrices, telles que l’IL6, l’IL-10 et le TGFß1 (Transforming Growth Factor beta 1). Du fait des caractéristiques phénotypiques communes entre les LB-LLC et certaines populations Breg (expressions du CD5, CD24, CD27 et CD38) et de l’existence d’un déficit lymphocytaire T marqué dans la LLC, plusieurs équipes tentent de définir phénotypiquement et fonctionnellement la sous-population tumorale qui sécrète de l’IL10 et d’identifier les mécanismes régulant cette sécrétion (101). Deux études démontrent la capacité des LB-LLC à produire de l’IL10 après 48 heures de stimulation ex-vivo par du CpG (oligonucléotide stimulant le Toll-like Receptor 9 TLR9). Ces travaux montrent également une corrélation entre la capacité de sécrétion de l’IL10 et le statut mutationnel des IGHV ; l’induction d’IL10 en réponse à une stimulation avec du CpG étant supérieure dans les cellules des patients LLC-M par rapport à celles des malades présentant une LLC-NM (102, 103). De plus, le modèle murin de LLC (µ-TCL1) révèle la fonctionnalité des cellules B tumorales à inhiber la sécrétion de TNF-α par les monocytes ; inhibition qui implique l’IL10 (103). Par ailleurs, une stimulation avec BAFF du récepteur TACI (Transmembrane Activator and Cyclophilin ligand Interactor) entraîne la production d’IL10 par les LB-LLC (104). Une étude de la régulation de la sécrétion de l’IL10 montre qu’elle est corrélée à une hypo-méthylation du locus de l’IL10 et requière STAT3 dans les cellules tumorales des patients LLC-M (102).

Figure 14. Interactions entre les LB-LLC et les cellules du microenvironnement ganglionnaire (adapté de Ten Hacken, 2014) (105).

Dans les ganglions lymphatiques, les cellules du microenvironnement transmettent des signaux de survie et de prolifération aux LB-LLC. Réciproquement, les LB-LLC sécrétent des chimiokines qui attirent les lymphocytes T et les NLC et sécrétent des cytokines immunomodulatrices telles que l’IL10 ou le TGFβ1.

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