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Chapitre 2 : Développement d’une méthodologie de détermination de la sensibilité

2.2 Intérêt du laser pour l’étude des SEE

Comme cela a été montré dans le premier chapitre, les interactions ion-silicium et laser-silicium peuvent générer des paires électron-trou malgré des mécanismes physiques différents. Les ions incidents ionisent directement les atomes de silicium par des interactions coulombiennes tandis que les photons d’un faisceau laser interagissent avec le silicium par effet photoélectrique. Dans les deux cas une trace d’ionisation est créée localement dont la longueur, la répartition spatiale et la répartition temporelle sont comparées dans les paragraphes suivants.

La longueur du parcours d’un ion est finie puisqu’elle dépend de son énergie ; elle peut s’étendre de quelques microns à la totalité de l’épaisseur de la puce voire au delà. Malgré le caractère évanescent de l’onde, on considère que la profondeur de pénétration du faisceau laser est significative jusqu’à ce que la valeur de l’intensité du faisceau atteigne 37% de l’intensité initiale. Ce pourcentage correspond à une profondeur égale à l’inverse du coefficient d’absorption α, ce qui conduit à diviser l’intensité initiale I0 par e (cf. équation 1.5

chapitre 1).

La profondeur de pénétration dépend donc du coefficient d’absorption α qui dépend lui-même du dopage du matériau et de la longueur d’onde du laser. La Figure 2-2 présente l’évolution du coefficient d’absorption α pour le silicium en fonction du dopage et pour une longueur d’onde du faisceau incident de 1,06 µm. Deux remarques peuvent être faites. La première est que pour des dopages inférieurs à 1018 cm-3, la variation du coefficient α est moindre. La deuxième remarque est que la variation de ce paramètre dépend du type du dopage et qu’elle est importante pour des dopages supérieurs à 1018 cm-3. Ces deux remarques

ont des conséquences sur l’utilisation du laser dans les structures de puissance à semi- conducteurs où il existe un empilement de couches semi-conductrices de type et de dopages différents. Comme cela a été expliqué dans le premier chapitre, les tests laser se font par la face arrière. Afin d’atteindre la région de faible dopage N- (cf. figure 1.18 chapitre 1), le faisceau laser doit franchir les couches N+ ou P+ fortement dopées. Dans le cas d’IGBT NPT, l’épaisseur de ces couches n’excède pas une dizaine de microns, et dans le cas des VDMOS et des IGBT PT, elle peut atteindre plusieurs centaines de microns. L’intensité initiale du faisceau doit donc être suffisamment importante. Dans la pratique, des mesures en transmission de l'énergie laser permettent de s'assurer que le faisceau traverse la totalité de l’épaisseur de la puce.

Figure 2-2: Évolution du coefficient d’absorption dans le silicium pour une longueur d’onde de 1.06µm en fonction du dopage (type P ou N)

La Figure 2-3 présente pour différents niveaux de dopage et longueurs d’onde la distance d=1/α sur laquelle le faisceau perd 63% de son énergie initiale I0. L’ordre de

grandeur des épaisseurs des plaquettes silicium pour les composants de puissance standards est compris entre 200 µm et 1000 µm au maximum. Il est donc nécessaire de travailler avec une longueur d’onde permettant de couvrir cette gamme d’épaisseurs. Une longueur d’onde de 1,064 µm est donc parfaitement adaptée pour réaliser des tests laser par la face arrière (cf. Figure 2-3). A ce stade, le laser a un avantage sur les accélérateurs puisque ces derniers ne permettent pas d’obtenir des profondeurs de pénétration aussi élevées et qui pourrait aboutir à sous-estimer de la sensibilité des composants testés. C’est en outre plus représentatif d’une

partie importante de la population des ions rencontrés dans l’espace qui ont des LET faibles à intermédiaires associés à des parcours forts (rayons cosmiques galactiques [BEZ05]).

Figure 2-3: Distance sur laquelle le faisceau laser perd 63% de son énergie initiale, en fonction de sa longueur d’onde et pour différents dopages (d’après [DAR03])

Les répartitions spatiales et temporelles des dépôts de charges créés par les ions et par le laser présentent des différences mais peuvent être comparables sous certaines conditions d'énergie et de durée d'impulsion. Pour un ion, le rayon de la trace d’ionisation peut aller de 0,05 µm jusqu’à quelques micromètres suivant son énergie. Dans le cas du laser, le rayon de la trace d’ionisation est limité par les lois de la diffraction ; il peut valoir au minimum 1 µm pour un laser de longueur d’onde 1,06 µm. En termes de répartition spatiale, le laser est donc plus proche des ions très énergétiques. Malgré les différences de diamètre des traces d’ionisation qu'il peut exister, elles restent très inférieures aux dimensions des volumes sensibles des composants de puissance.

La durée d’établissement de la colonne d’ionisation est de quelques picosecondes pour un ion. Pour les lasers impulsionnels, cette durée est variable et peut aller de quelques femtosecondes à quelques centaines de picosecondes suivant les installations. Il faut noter que ces temps restent beaucoup plus courts que les temps de commutation des composants de puissance qui sont de l’ordre de la microseconde. Dans le cadre d’une étude dynamique (ce qui n’est pas le cas de nos travaux), la durée du dépôt de charge ne devrait pas poser de problème majeur.

Comme cela a déjà été dit, les paramètres utilisés pour caractériser les ions incidents et le faisceau laser sont différents. Pour rappel, l’énergie, le range et le LET définissent les caractéristiques d’un ion pénétrant dans un matériau et la longueur d’onde, l’intensité I et le diamètre définissent celles du faisceau laser. Ces différences conduisent naturellement au problème de l’équivalence énergétique ion-laser. En d’autres termes, il existe un travail à réaliser avant de pouvoir utiliser le laser pour caractériser de manière quantitative l’impact d’un ion donné. Différents auteurs se sont penchés sur ce problème complexe (notamment [POU00], [DAR03], [MIL06]). Ce problème ne sera pas le cœur de notre étude et nous proposerons simplement une démarche permettant de corréler l'énergie laser au LET des ions pour les MOSFETs de puissance testés. Peu d'études laser ayant été réalisées par le passé sur des composants de puissance, nous allons donc montrer que malgré la différence des mécanismes de générations des charges, le laser peut tout à fait simuler les effets électriques dus à l’impact d’ions lourds dans les MOSFETs de puissance. Les résultats obtenus à l’aide de ces deux moyens de tests seront comparés. Ces résultats portent sur la détermination des sections efficaces, de l’aire de sécurité et de cartographies laser de sensibilité. Les paragraphes suivant commencent donc par présenter les installations expérimentales puis définissent ces notions avant d’aborder les résultats proprement dit.