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4 FACTEURS DE PERFORMANCE

4.7 F ACTEURS RÉGLEMENTAIRES

4.7.2 Instruments économiques

Trois grandes catégories d’instruments économiques sont les plus utilisées par les gouvernements :

 Les frais d’élimination;

 Les systèmes “payer pour jeter” ou Pay As You Throw (PAYT);

 La responsabilité élargie du producteur.

Au Québec, deux de ces catégories sont utilisées pour le moment. La responsabilité élargie du producteur ainsi que les frais d’élimination. Le présent travail analysera abondamment leurs utilisations et leurs résultats dans le prochain chapitre. Les systèmes PAYT, quant à eux, ne sont pas très connus au Québec. Les prochains paragraphes en expliquent la nature, leurs avantages et leurs inconvénients.

Un système PAYT est une tarification en fonction de ce qui a est jeté basé sur le principe du pollueur-payeur. Cette mesure est beaucoup utilisée aux États-Unis et est communément appelée le PAY AS YOU THROW ou PAYT. Contrairement à ce qui se fait au Québec, soit un tarif fixe déterminé par les municipalités et facturé une fois l’an aux propriétaires immobiliers, le PAYT est un frais déboursé au volume et plus rarement au poids, facturé directement à la personne qui dépose son sac à la rue.

Kinnaman et Fullerton (2000) rapportent que des frais de 1 $ américain par sac ont permis de réduire de 44 % les ordures collectées pour l’élimination dans les municipalités étudiées, alors que la collecte sélective n’a augmenté que légèrement pour le même territoire. La question est de savoir où sont allées les matières résiduelles qui ne n’ont pas pris ni le chemin de l’élimination, ni le chemin du centre de tri. Est-ce une réduction réelle de la production de matières résiduelles ou une augmentation de l’abandon sauvage? Il faut dire qu’à cette époque, la collecte porte-à- porte était assez rare et les citoyens devaient apporter leurs matières dans les points de dépôt. L’étude plus récente de Bucciol et autres (2011) prend en compte les effets de la collecte porte-à- porte et du système de paiement au volume. Ils ont conclu que cette combinaison donnait une

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augmentation de 18 % pour la collecte sélective. Cependant, il n’a pas eu de diminution significative sur la production totale de matières résiduelles. Leur recherche démontre aussi que les comportements délinquants ne sont pas significatifs lorsque les données de plusieurs municipalités sont agrégées.

Les performances sont très attrayantes. Cependant ce système n’est pas parfait et certains y font quelques reproches. Entre autres, il présente un enjeu d’équité social. Les frais chargés en fonction du volume ne prennent pas en compte la capacité de payer du ménage ou de sa production. Celle-ci peut varier beaucoup selon la présence d’enfants ou de retraités, éléments plus difficiles à contrôler. Aussi, les ménages plus riches peuvent se permettre plus de déchets, alors que les démunis doivent veiller au grain pour débourser le moins possible. Ces frais peuvent être perçus comme le prix à payer pour avoir le droit de jeter autant que souhaité et oublier l’importance de la réduction, transformant les frais en permission (Bucciol et autres, 2011). Un autre problème est l’augmentation de l’abandon sauvage de déchets ou encore de l’incinération non contrôlée dans les foyers résidentiels. Les régions rurales où les terrains sont grands, la surveillance (officielle ou non) est légère et où les feux dans la cour arrière sont permis sont plus sujet à ce genre d’abandon. Alors que dans les quartiers densément peuplés, ce sont les conteneurs commerciaux qui servent de dépôts sans frais (Kinnaman et Fullerton, 2000; Bucciol et autres, 2011; Huang et autres, 2011). La Suisse, qui avait largement adopté cette méthode de tarification, a dû réviser à la baisse les frais au volume parce qu’il y avait trop de déchets abandonnés ou brûlés à des endroits inappropriés (OCDE, 2008). Il n’est pas évident de savoir quel tarif sera le plus efficace et il faut probablement quelques essais et erreurs avant de trouver le montant idéal.

Malgré ces controverses, cette méthode à des attraits indéniables et elle se répand de plus en plus. Plusieurs pays de l’OCDE ont utilisé un système de redevance sur le volume de déchets éliminés. En moyenne, leurs collectes municipales ont vu le volume de leurs déchets réduire de 7,11 % (OCDE, 2011).

Une conclusion s’impose avec ce genre d’incitatif : il n’est pas pertinent dans toutes les municipalités. Le système PAYT est plus coûteux à administrer que le frais fixe annuel. Ainsi, les frais de gestion doivent être inférieurs au profit relié à la réduction des coûts d’élimination.

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Un avantage qui n’est pas abordé dans les articles analysés est la prise de conscience que doit faire le participant lorsqu’il est facturé à la pièce plutôt qu’avec un frais fixe annuel. Si pour chaque sac, ou bac rempli, des frais sont facturés au participant, celui-ci sera sans doute tenté de participer à sa réduction afin de réduire sa facture mensuelle. Le citoyen qui paie un frais fixe, souvent intégré à ses taxes foncières, n’a rien qui le motive à connaître sa production et encore moins à la contrôler. Les préoccupations premières des Canadiens sont leurs finances personnelles et le contexte économique, alors que les enjeux environnementaux prennent la dernière place dans leurs préoccupations (Tassoni, 2012). Un système PAYT permet de mesurer ce que le participant met à la rue. En mesurant, il peut alors contrôler et ultimement réduire sa production de matières résiduelles. « On ne contrôle que ce que l’on mesure! » (Laperrière, 2010). En touchant la partie la plus sensible du participant, soit son porte-monnaie, ce dernier se retrouve devant deux possibilités : payer et ne rien faire ou investir pour réduire sa production (Bourassa, 2012).

Plusieurs études ont démontré que la tarification incitative peut jouer un rôle important sur les performances en gestion des matières résiduelles. Que ce soit par des intérêts, des compensations financières, des récompenses, ou des tarifs en fonction de ce qui est jeté, les chercheurs s’entendent pour dire qu’il y a un impact positif sur les quantités recyclées (Suttibak et Nitivattananon, 2008; OCDE, 2008; Kinnaman et Fullerton, 2000; Hornik et autres, 1995; Watkins et autres, 2012).

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