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au pâturage : cas particulier du cheval

1/ Ingestion journalière

1.3/ Ingestion volontaire à l’herbe

A l’inverse, Arnold (1984) avait pu observer que le temps de pâturage des chevaux diminuait (jusqu’à 11h/jour) avec l’augmentation de la quantité de ressource disponible, notamment parce que la taille de la bouchée augmentait conjointement. Les chevaux paraissent donc capables d’ajuster leur comportement alimentaire aux contraintes liées à certaines caractéristiques structurelles du couvert végétal, ce dans le but d’essayer de maintenir leurs niveaux d’ingestion volontaire. A ce jour, aucune étude ne s’est encore intéressée à l’effet de la qualité du couvert pâturé sur les temps d’alimentation journaliers des chevaux.

1.3/ Ingestion volontaire à l’herbe

Les niveaux d’ingestion réalisés par les herbivores varient dans de très larges proportions selon les situations de pâturage ; leurs facteurs de variations sont bien documentés pour les ruminants et font l’objet de nombreuses synthèses (voir notamment Van-Soest 1994b; Allison 1985; Demment et al. 1995; Baumont et al. 2000; Prache & Peyraud 2001). Selon les études (et les conditions expérimentales), les niveaux d’ingestion de bovins ont été estimés entre 13 et 29gMO/kgPV (Baker et al. 1981; Ferrer Cazcarra et al. 1995; Peyraud et al. 1996; Parga et al. 2000; Ribeiro Filho et al. 2005) alors que ceux réalisés par des moutons ont pu atteindre de 12 jusqu’à 45gMO/kgPV (Penning et al. 1991; Penning et al. 1994). L’abondance des données récoltées a permis d’aboutir à des modèles plus ou moins complexes de prévision des niveaux d’ingestion en relation avec la disponibilité de l’herbe et la conduite du pâturage, dont la précision reste tout de même variable (10 à 25% d’erreur dans Delagarde & O'Donovan 2005 pour des vaches laitières ; 10% d’erreur dans Jouven et al. 2008 pour des vaches allaitantes et leurs veaux).

Comparativement aux ruminants, les chevaux sont capables de consommer de plus grandes quantités de fourrages, et notamment des fourrages grossiers de qualité médiocre, ceci grâce à la rapidité de leur transit (Duncan et al. 1990). Au pâturage, les connaissances sont largement plus limitées qu’à l’auge mais semblent confirmer la supériorité des niveaux d’ingestion des chevaux (Figure 9, Ménard et al. 2002).

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Figure 9 : Ingestion de matière sèche (gMS/kgPV0.75/jour) pour des chevaux (●, PV : 410-850kg) et des bovins (○, PV : 310-570kg) lors des mois de mai, juin et octobre 1998, juillet et septembre 1999. Le nombre de jours de mesure est indiqué pour chaque mois. Les différences significatives entre espèces sont indiquées par : * p<0.05, ** p<0.01, *** p<0.001 (Ménard et al. 2002).

Un certain nombre d’études récentes ont néanmoins mis en évidence sans qu’on puisse les expliquer d’importantes variations d’ingestion chez des animaux dont les besoins étaient à priori comparables. Ainsi, les niveaux d’ingestion observés ont pu atteindre 38gMS/kgPV/jour pour des juments en lactation en pâturage continu en Camargue (Duncan 1992) et 26 à 32gMS/kgPV/jour chez des poulains de race de trait en croissance conduits sur des prairies naturelles humides (Marais Poitevin, pâturage continu, Ménard et al. 2002). Ces valeurs sont comparables avec l’ingestion réalisée par des individus à fort besoin à l’auge (voir Duncan 1992 pour une synthèse). Il est par contre étonnant que ces niveaux d’ingestion soient également comparables avec ceux de juments de trait à l’entretien conduites en pâturage continu sur des prairies naturelles humides (34gMS/kgPV/jour, Fleurance et al. 2001). Ces niveaux d’ingestion ont été largement supérieurs à ceux obtenus avec la même méthodologie par Mesochina (2000, 21gMO/kgPV/jour) chez des poulains de selle en croissance conduits en pâturage tournant sur des prairies temporaires (Corrèze). Ainsi, il existe encore peu de données des niveaux d’ingestion des chevaux au pâturage et les larges variations observées sont certainement au moins en partie imputables aux diverses situations

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ingérées ont été mesurées (e.g. caractéristiques des prairies, conduite des animaux, méthodes de mesures).

A ce jour, peu de tests expérimentaux ont été mis en place dans des conditions contrôlées afin de mesurer l’influence propre de différentes caractéristiques de la végétation sur l’ingestion de matière sèche des chevaux au pâturage. Mesochina (2000) a par exemple pu montrer que les niveaux d’ingestion de jeunes chevaux mesurés sur des couverts de 3 à 35cm, dont la quantité de MS et la qualité offertes ont varié conjointement à la hauteur, sont restés constants grâce à une augmentation de leur temps de pâturage journalier sur les couverts les plus ras. En revanche, la croissance des chevaux en a été affectée. Dans la plupart des études qui ont rapporté des mesures d’ingestion, les caractéristiques de l’herbe (hauteur, biomasse, digestibilité, qualité), n’ont pas pu être reliées aux niveaux d’ingestion réalisés au pâturage (Duncan 1992; Ménard et al. 2002). Néanmoins, il est probable que plusieurs facteurs aient pu jouer simultanément et ces résultats ne permettent pas de conclure quant à l’effet de la quantité et/ou de la qualité de la végétation.

L’ingestion des ruminants augmente avec la quantité d’herbe disponible (suivant par exemple une relation quadratique pour des vaches, Peyraud et al. 1996). Plusieurs études ont rapporté que les ruminants sont capables d’augmenter leur temps de pâturage journalier afin de compenser la faible vitesse d’ingestion liée à la diminution de la hauteur de l’herbe (Allden & Whittaker 1970; Penning et al. 1991; Penning et al. 1994; Ferrer Cazcarra et al. 1995) ou au contraire d’augmenter leur vitesse d’ingestion afin de compenser une restriction dans le temps d’accès au pâturage (Iason et al. 1999). Mais dans chacune de ces études, la compensation n’a pas été complète et les animaux n’ont pas réussi à maintenir leurs niveaux d’ingestion sur des couverts herbacés de faible hauteur (notamment 3cm pour des moutons dans Penning et al. 1991, Figure 10 ; et < 7cm pour des bovins dans Baker et al. 1981).

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Figure 10 : L’influence de la hauteur de l’herbe (mm) sur (a) l’ingestion d’herbe (gMO/kgPV/jour), (b) le temps de pâturage (min/jour, ●), de rumination (■) et passé inactif (○) et (c) sur la fréquence de mouvements de mâchoires totaux (n/min d’alimentation, ○), de bouchées (●) et de mastications (■) de moutons au printemps (Penning et al. 1991).

L’ingestion de nutriments est également régulée par l’apport en énergie et la qualité du fourrage pâturé. Lorsque la disponibilité en herbe n’est pas limitante, les niveaux d’ingestion des ruminants sur des couverts à digestibilité élevée sont principalement régulés par des mécanismes de « feedback » (rétrocontrôle) ayant pour but d’éviter la consommation en excès de certains nutriments dont le catabolisme est coûteux en énergie (Van-Soest 1994b; Pittroff & Kothmann 1999). L’accumulation des produits de la fermentation dans le rumen et/ou dans le sang peut également induire un phénomène de satiété (e.g. sur des rations riches en

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contraintes physiques telles que la capacité digestive qui vont influer sur l’ingestion volontaire des ruminants. Il existe ainsi une relation négative entre ingestion et teneur en fibres de la ressource, largement expliquée par un effet de satiété, impliqué par la forte distension du rumen et le temps accru nécessité par la réduction du fourrage en petites particules (Van-Soest 1994b; Faverdin et al. 1995; Baumont et al. 2000). Les chevaux ne possèdent pas le même système digestif (« hind-gut fermenters ») et les contraintes liées à l’encombrement du tractus sont beaucoup plus limitées du fait de la rapidité de passage des particules alimentaires. Ils pourraient donc se trouver nettement moins contraints par la qualité de la ressource que ne le sont les ruminants (Janis 1976). Les quelques résultats obtenus uniquement à l’auge, n’ont pas permis d’établir clairement cette relation : d’après Cymbaluk (1990), Martin-Rosset & Doreau (1984b) et Duncan (1992), les chevaux maintiendraient des niveaux d’ingestion identiques quelle que soit la qualité de ce qu’ils ingèrent ; des études récentes suggèrent au contraire qu’ils pourraient manger moins sur des foins fibreux (Dulphy et al. 1997b; Mesochina 2000). La relation entre qualité de la ressource et niveaux d’ingestion nécessite donc d’être clarifiée expérimentalement.