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3.2 Relation entre paramètres procédé et structure

3.2.3 Influence du temps de mélange

Nous avons dans un deuxième temps étudié l’influence du temps de mélange. Trois échantillons ont été préparés à une vitesse de 100 tr/min, une température de 180°C et trois temps de mélange différents de 5, 10 et 20 minutes. On s’attend à ce que le temps de mélange aide à la dispersion via l’érosion et l’exfoliation.

§ Paramètres procédé

Les paramètres procédé sont analysés ici. La Figure 3.27a présente l’évolution du couple pendant le mélange pour les trois nanocomposites. On voit bien que les courbes se superposent. La Figure 3.27b montre la valeur du couple mesuré à la fin du procédé en fonction de la durée de mélange. On observe ici une évolution peu marquée entre les deux paramètres, avec une valeur de 4,3 N.m pour un mélange d’une durée de 5 minutes, 3,9 N.m pour un mélange de 10 minutes et enfin 4,1 N.m pour un mélange de 20 minutes. La valeur de couple est légèrement supérieure pour une durée de cinq minutes car la Figure 3.27a nous montre bien que le couple n’est pas encore stabilisé au bout de cinq minutes, mais qu’il le devient seulement au bout de 10 minutes.

Figure 3.27 : Evolution a) du couple en fonction du temps pour les trois nanocomposites et b) du couple final en fonction du temps de mélange

La Figure 3.28a présente l’évolution de la température en fonction du temps pour les trois mélanges. On voit que le modèle thermique est en adéquation avec les courbes expérimentales et fournit des valeurs de température finale très proches des valeurs mesurées. La Figure 3.28b décrit l’évolution de la température finale en fonction du temps de mélange. On voit ici qu’au bout de 5 minutes de mélange, la température atteinte est légèrement supérieure à la température de consigne (186°C pour une consigne de 180°C). Pour des temps de mélange plus longs, on observe l’apparition d’un plateau. La température atteint 192°C que ce soit pour un mélange de 10 ou de 20 minutes.

Figure 3.28 : Evolution a) de la température en fonction du temps pour les trois nanocomposites et b) de la température finale en fonction du temps de mélange

La Figure 3.29a montre l’évolution de l’énergie mécanique spécifique pendant le mélange pour les trois nanocomposites. Les courbes se superposent logiquement. La Figure 3.29b présente les valeurs d’énergie mécanique spécifique fournie à l’échantillon pendant le mélange (à partir de t = 2 minutes) en fonction du temps de mélange. On observe comme attendu une évolution linéaire entre les deux paramètres.

a) b)

Figure 3.29 : Evolution de a) l’énergie mécanique spécifique en fonction du temps pour les trois nanocomposites et b) l’énergie mécanique spécifique de mélange en fonction du temps

§ Observations microscopiques

Les échantillons ont été observés au MEB et les images obtenues sont présentées sur la Figure 3.30. On remarque qu’au bout de 5 minutes de mélange, il reste encore quelques grosses et moyennes particules. Au-delà, ce nombre diminue et il ne reste que quelques particules moyennes. On n’observe toutefois pas de différence visuelle marquante entre un temps de mélange de 10 et de 20 minutes.

Figure 3.30 : Images MEB des nanocomposites mélangés à 3 durées différentes a) 5 minutes, b) 10 minutes et c) 20 minutes, pour une vitesse de 100 tr/min

Figure 3.31 : Evolution du rapport d’aires en fonction du temps de mélange

a) b) c)

La mesure du rapport d’aires confirme ces observations (Figure 3.31). Le rapport d’aires est en effet relativement élevé au bout de 5 minutes de mélange (0,48%), puis il chute drastiquement ensuite pour atteindre 0,16% au bout de 10 minutes de mélange. Il n’évolue presque plus ensuite, atteignant 0,15% pour 20 minutes de mélange, la courbe semblant atteindre un plateau.

§ Etat d’intercalation

Les échantillons ont été analysés par diffraction des rayons X (Figure 3.32a). On remarque que pour tous les échantillons, le pic de diffraction 001 est déplacé vers les plus petits angles par rapport au pic de l’argile pure, ce qui indique bien une intercalation. Mais le pic de l’échantillon mélangé pendant 5 minutes est moins bien défini et ne présente pas la forme d’un pic, d’où une incertitude plus importante sur le calcul de la distance interlamellaire (Figure 3.32b). Ce graphe montre néanmoins qu’il n’y a pas de doute sur l’intercalation des chaînes polymères pendant le mélange. Toutes les distance interlamellaires des nanocomposites ont une valeur supérieure à 3,7 nm contre 3,28 nm pour l’argile pure. Mais l’incertitude sur le calcul et le manque de tendance sur l’évolution de ce paramètre avec le temps de mélange laisse à penser que le phénomène d’intercalation intervient très tôt dans le mélange et ne dépend pas des conditions de mélange, comme l’avait déjà observé Lertwimolnun (2006).

Figure 3.32 : a) Diffractogramme des nanocomposites à trois durées de mélange différentes, b) Distance interlamellaire correspondante

§ Caractérisations rhéologiques

Les analyses rhéologiques effectuées sur les trois nanocomposites nous renseignent sur le réseau formé par les particules d’argile (Figure 3.33). La mesure du module de stockage montre que, pour les trois nanocomposites, un plateau est atteint à basse fréquence. On remarque que la valeur du plateau est relativement faible pour un temps de mélange de 5 minutes (G’ ~ 100 Pa), mais on n’observe quasiment pas de différence entre les échantillons ayant été mélangés pendant 10 et 20 minutes, avec une valeur de plateau d’environ 200 Pa.

On retrouve cette tendance sur la mesure de la viscosité complexe (Figure 3.33b). Bien que les trois nanocomposites présentent un seuil à basse fréquence, celui de l’échantillon à t = 5 min est bien inférieur aux deux autres, qui eux sont quasiment confondus.

Figure 3.33 : Analyses rhéologiques, a) Evolution du module de stockage et b) de la viscosité complexe en fonction de la fréquence angulaire pour les trois temps de mélange

Cette tendance est confirmée avec le calcul de la contrainte seuil en fonction du temps de mélange (Figure 3.34). On voit que la valeur de la contrainte seuil est relativement faible pour un temps de mélange de 5 minutes (105 Pa). Elle augmente bien jusqu’à 10 minutes de mélange (210 Pa), puis semble évoluer encore légèrement, jusqu’à atteindre une valeur de 248 Pa au bout de 20 minutes. Si l’on considère que ce paramètre est directement lié au niveau d’exfoliation, on en conclut que l’exfoliation de l’argile augmente fortement entre 5 et 10 minutes de mélange et légèrement moins au- delà.

Figure 3.34 : Evolution de la contrainte seuil en fonction du temps de mélange

Le Tableau 3-8 résume les valeurs des paramètres du modèle de Carreau-Yasuda à seuil calculées pour les trois nanocomposites. On remarque ici que la valeur de la viscosité newtonienne varie peu entre les différents mélanges.

Tableau 3-8 : Valeurs des paramètres du modèle de Carreau-Yasuda à seuil pour les cinq nanocomposites

tmélange (min) σ0 (Pa) η0 (Pa.s) λ (s) a m

5 105 3020 0,14 0,32 0,46

10 210 3190 1,57 1,05 0,59

20 248 3390 2,23 1,15 0,57

Ces résultats confirment l’influence marquée du temps de mélange sur l’exfoliation de l’argile et sur l’état de dispersion général de l’argile aux différentes échelles.

§ Synthèse

Un des objectifs de cette étude est de pouvoir relier les paramètres qui caractérisent la dispersion de l’argile à un seul paramètre de mélange au lieu de devoir différencier l’influence du temps et de la vitesse de mélange. Cela permettrait à terme de pouvoir comprendre et anticiper les résultats. La Figure 5.35 montre l’évolution du rapport d’aires, et la Figure 3.36 celle de la contrainte seuil, en fonction de l’énergie mécanique spécifique pour tous les essais effectués.

Figure 3.35 : Evolution du rapport d’aires en fonction de l’énergie mécanique spécifique

Ces deux courbes permettent de synthétiser les résultats. On voit une évolution logique du rapport d’aires en fonction de l’énergie mécanique spécifique, avec un paramètre qui évolue beaucoup pour de faibles énergies, puis qui semble se stabiliser aux plus fortes énergies, que ce soit en augmentant le temps de mélange ou bien la vitesse de rotation. De même, l’évolution de la contrainte seuil en fonction de l’énergie montre une évolution linéaire pour de faibles énergies (jusqu’à 150 kWh/t environ), puis semble tendre vers un plateau aux plus fortes énergies. Ce graphe laisse penser qu’il existe, pour un mélange donné, un niveau d’énergie optimal, assez important pour délaminer une forte quantité de feuillets d’argile et améliorer l’état de dispersion, au-delà duquel l’état de dispersion ne s’améliore pas voire se dégrade. Médéric et al. (2009) ont observé ce même phénomène sur des mélanges PA12/argile, en trouvant un niveau d’énergie de « transition » de 140 kWh/t, une valeur confirmée par Lertwimolnun (2006) sur des mélanges PP/PP-g-MA/argile. L’énergie mécanique spécifique est donc un bon paramètre pour décrire à lui seul l’état de dispersion de l’argile à plusieurs échelles.