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Influence du pH sur la flottation des sulfures

6.1. Désulfuration environnementale des tailings

6.1.1. Influence du pH sur la flottation des sulfures

Les résultats des essais concernant l’influence du pH sur la flottabilité des sulfures sont repris dans le tableau 15 et sur les courbes correspondantes représentées dans la figure 19.

Benzaazoua et Kongolo (2003) ont montré que les résidus sulfurés contenant principalement de la pyrite flottent bien à un pH neutre ou légèrement acide (pH 6) et à pH 10 lorsqu’on utilise des collecteurs sulfhydryles à longues chaînes hydrocarbonées. Des essais ont été menés à ces pH en utilisant le NaIBX respectivement comme collecteur et le Dowfroth 200 comme moussant.

Il ressort des résultats de ces tests que l’influence du pH sur la flottation globale de tous les sulfures est très faible dans l’intervalle étudié (pH 6 à 10). Comme on peut le voir par les allures des courbes de la figure 19 donnant les rendements et les teneurs cumulées en fonction du poids flotté de concentré, les rendements de récupération du cuivre et du zinc ainsi que leurs teneurs cumulées ont varié presque de la même manière.

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Tableau 15 - Résultats concernant l’étude de l’influence du pH sur la désulfuration des tailings de Kipushi Essai 1

Cuivre Zinc Conditions opératoires (Campagne 1 d80 = 75µm)

% Rdt

Cuivre Zinc Conditions opératoires (Campagne 1 d80 = 75µm)

% Rdt

Cuivre Zinc Conditions opératoires (Campagne 1 d80 = 75µm)

% Rdt

75

Avec

1Cu(6,0) : numéro essai/élément/pH

Figure 19 - Influence du pH sur la flottation du cuivre et du zinc des tailings de Kipushi, rendements (a) et teneurs (b) en fonction de la masse cumulée de concentré

0 20 40 60 80 100

0 10 20 30 40

Rendement (%)

Masse cumulée (%) 1 Cu (6,0) 2 Cu (7,4) 3 Cu (10,0) 1 Zn (6,0) 2 Zn (7,4) 3 Zn (10,0)

0 5 10 15 20 25

0 10 20 30 40

Teneur (%)

Masse cumulée (%) 1 Cu (6,0) 2 Cu (7,4) 3 Cu (10,0) 1 Zn (6,0) 2 Zn (7,4) 3 Zn (10,0)

(a)

(b)

76 Une légère amélioration de la flottabilité des minéraux de cuivre est observée à pH 6 où il est constaté que les teneurs en cuivre des concentrés sont légèrement bonnes et que les rendements évoluent légèrement à des valeurs supérieures. Mais dans l’ensemble, les rendements de récupération sont beaucoup plus influencés par le poids flotté et l’augmentation de ce dernier s’accompagne d’un entraînement des minéraux de la gangue qui dilue le concentré final. Ces différences sur le poids flotté peuvent être liées aux manipulations de l’opérateur mais également à une faible influence du pH en admettant que toutes les flottations ont été arrêtées après 12 minutes quand la mousse n’était plus minéralisée.

Les récupérations obtenues d’environ 60 % pour le zinc et d’environ 45 % pour le cuivre sont faibles comparées à celles qu’on observe habituellement à la flottation des sulfures avec les collecteurs sulfhydryles. Les faibles récupérations sont probablement dues à l’oxydation superficielle des grains sulfurés et/ou à la présence de complexes cyano-métalliques formés lors de la concentration par flottation ayant donné les tailings étudiés mais également à la finesse des grains.

Les minéraux sulfurés altérés et couverts à leurs surfaces de minéraux oxydés ou carbonatés flotteraient difficilement avec les xanthates. Pour les minéraux légèrement altérés, le broyage effectué lors du prétraitement de l’échantillon alimenté devrait par attrition permettre leur activation et améliorer leur flottabilité mais malheureusement ce broyage n’a été réalisé que sur 39 % de la matière (voir tableau 13, particules de dimension + 75 µm) et non sur l’ensemble. La présence de certains minéraux oxydés et/ou carbonatés autour des grains composés des minéraux sulfurés a été observée lors des analyses minéralogiques. C’est le cas notamment du grain de covelline couvert de malachite sur la figure 12 (d) et de certains grains de pyrite ou marcassite couverts de goethite. La probabilité que ces oxydes ou carbonates se soient formés par l’altération des sulfures présents lors de leur stockage en surface au contact de l’air et de l’eau est très grande puisque beaucoup de signes sur le terrain le confirment comme l’exemple de la formation constante de gypse qui blanchit les particules des tailings pendant la saison sèche (voir figure 6). La moindre flottabilité des minéraux de cuivre confirmerait que l’altération est plus prononcée pour les minéraux cuprifères.

Dans ses travaux sur l’influence des ions cyanures sur la flottation de la pyrite, Wet (1997) a démontré que l’état de la surface des sulfures est fortement dénaturé de façon

77 presqu’irréversible lorsque le rejet minier est passé par un procédé de cyanuration. Les ions CN- forment des complexes cyano-métalliques qui inhibent l’adsorption des xanthates à la surface des minéraux (Wang et Ferssberg, 1996 ; Makunga, 2005). Dans le cas particulier de la pyrite, il y a également aux pH supérieurs à 6,5 formation ou précipitation de ferrocyanure ferrique Fe4[Fe(CN)6]3(s) à la surface du minéral qui annule les sites positifs de la surface et par conséquent, le potentiel zêta devient négatif et les anions xanthates sont alors repoussés.

Les tailings de Kipushi résultent d’un traitement qui a utilisé le NaCN dans le circuit de flottation du cuivre pour déprimer la sphalérite et la pyrite, ce qui pourrait expliquer la faible récupération du cuivre et du zinc.

L’augmentation du poids flotté et du rendement de récupération du cuivre à pH 6 peut se justifier par l’action de l’acide sur les couches d’altération qui tend à les dégrader et favoriser ainsi le nettoyage chimique de la surface des sulfures. Tandis qu’à pH 10, on pourrait l’expliquer par la théorie de la stabilité de la collection. En effet, les xanthates sont stables dans l’intervalle de pH de 8 à 13 et le dixanthogène qui se forme par oxydation d’ions xanthates (équation 6.1) est stable dans l’intervalle de 1 à 11 (Bouchard, 2001).

2 [R – O – CS2-] 2e- + [R – O – CS2-S2C – O – R] (6.1)

La pyrite et la chalcopyrite flottent très bien en présence des xanthates à des pH inférieurs à 8 puisque leurs surfaces peuvent servir de catalyseur pour l’oxydation d’ion xanthate en dixanthogène. Ceci n’est pas le cas de la covelline qui recouvre la sphalérite après activation par les ions Cu2+. La flottation de la covelline et/ou de la sphalérite activée s’expliquent par un mécanisme de chimisorption de xanthate et donc de collection moins stable à pH faible.

Toutes ces raisons peuvent expliquer l’augmentation du poids de concentré et par conséquent une récupération plus grande du zinc et une légère amélioration de la récupération du cuivre à pH 10.

La finesse des grains peut être aussi évoquée pour expliquer cette mauvaise récupération.

Dans un processus d’altération des sulfures, les fines particules s’oxydent rapidement car elles présentent une surface plus grande au contact avec les agents atmosphériques. Nous avons constaté lors de nos analyses granulochimiques que les fractions de moins 38 µm présentent de faibles teneurs en soufre et contiennent 40 % de cuivre total et 50 % de zinc total (tableau 13).

78 Si les faibles récupérations sont dues à une oxydation superficielle des grains et à une désactivation par formation en surface des complexes cyano-métalliques, de meilleurs résultats pourraient être obtenus après sulfuration, attrition ou prétraitement à pH acide.

Ces modes d’activations sont testés dans la suite des essais de flottation et le pH de travail qui a été retenu est celui de 10 pour favoriser la collection des xanthates sur tous les minéraux sulfurés présents.