I. ETAT DE L'ART DES ACTIONNEURS TOLERANTS AUX FAUTES
I.6. P RECONISATIONS POUR LE MOTEUR
I.6.2. Indépendance Electrique
I.6.2.1.Principe
L'indépendance électrique est une nécessité liée aux conséquences de certaines fautes,
comme un court-circuit sur un interrupteur, qui empêche complètement le fonctionnement. De
même, un circuit ouvert sur un interrupteur ou sur une phase n'empêche pas complètement le
fonctionnement, mais le dégrade très fortement en diminuant les libertés de pilotage des
phases restantes.
Il faut donc que le système soit capable, même en cas d'apparition d'une faute,
d'alimenter les autres phases de manière à pouvoir fournir le couple nécessaire.
L'indépendance électrique se traduit donc par la capacité à alimenter une phase le mieux
possible quel que soit l'état des autres. Le système global doit être capable d'alimenter le reste
de la machine en énergie pour maintenir le meilleur fonctionnement possible.
Cette indépendance dépend directement de la structure de l'onduleur et de
l'alimentation de la batterie. L'alimentation de la batterie ayant été supposée assurée, il reste la
structure de l'onduleur à définir. Plusieurs approches sont possibles.
I.6.2.2.Solutions
(1)Favoriser la tolérance sur l'électronique de puissance
Il existe des solutions considérant l'électronique de puissance comme la plus
importante source de défaillance [25] [26] [27] [28]. Ces solutions n'ont donc pas de moyen
particulier pour lutter contre un court-circuit dans les bobines, mais ont été créées pour limiter
l'encombrement de la redondance des moteurs. Ces solutions utilisent alors la redondance
pour l'alimentation et donc l'onduleur, mais joue sur la structure et le bobinage de la machine
pour ne pas en mettre une seconde (Figure I-15, Figure I-16 et Figure I-17).
Figure I-15 Machine alimentée par deux onduleurs [25] (une dent sur deux connectée sur chacun d'eux)
Figure I-16 Machine ayant chaque dent enroulée par deux bobines alimentées chacune par un onduleur différent [26]
Figure I-17 Machine alimentée par un double réseau triphasé distribué dans la machine par deux groupes de trois anneaux où se connectent les bobines [28]
Des structures d'onduleurs tolérantes à plus ou moins de fautes sur les interrupteurs ont
été créées et un article d'une équipe de l'université du Wisconsin-Madison en collaboration
avec General Motors [29] en fait une synthèse. Certaines de ces structures apparaissent
comme plutôt complexes dans leur conception.
(2)Utiliser des Fusibles
Certaines des propositions de cet article [29] intègrent des fusibles pour isoler un
défaut sur un interrupteur (Figure I-18). Ces deux structures utilisent des circuits annexes (à
base de thyristors) pour court-circuiter un fusible et ainsi isoler la branche malade. Le brevet
[30] utilise lui aussi des fusibles (Figure I-19), mais cette fois les fusibles sont situés entre les
bobines d'une même phase.
Figure I-18 Exemples de structures d'onduleurs tolérants à certaines fautes et intégrant des fusibles
Figure I-19 Onduleur isolant un court-circuit dans les bobinages à l'aide de fusibles
L'utilisation de fusibles n'est cependant pas un choix technologique complètement
adapté. Même s'il permet d'isoler les défauts, il peut être considéré comme maillon faible
rajouté au système global. Il améliore alors la disponibilité, mais fait baisser la fiabilité. Un
des postulats de l'équipe de Newcastle Upon Tyne [13] a d'ailleurs été de mettre de côté cette
piste dès le début de la réflexion.
(3)Connecter le point neutre
Une méthode classique pour améliorer les tolérances des onduleurs est la connexion du
point neutre. L'article de synthèse précédemment cité [29] en montre d'ailleurs plusieurs dont
la Figure I-20 est un exemple. Le fait de connecter le point neutre au point milieu de la source
apporte en effet des possibilités de commande intéressantes.
Utilisé en cas de court-circuit
Connection du neutre en cas de circuit-ouvert
Figure I-20 Onduleur avec dispositif de connexion du neutre en cas de circuit ouvert (utilisation de fusibles en cas de court-circuit)
Dans le cas d'un interrupteur bloqué en ouverture avec les autres continuant à être
piloté de façon normale, la connexion du point neutre permet de diminuer les ondulations de
couple [18] [31].
Mais le principal avantage de cette méthode est de pouvoir générer des signaux
indépendants sur chaque phase. Dans le cas d'une machine triphasé, mais avec un onduleur à
trois bras avec le neutre relié, il est alors possible, dans des cas tels qu'un circuit ouvert sur un
interrupteur ou sur une phase, de piloter la machine sur les deux phases restantes. Il est alors
possible, en utilisant un déphasage de ±π/3 au lieu des ±2*π/3 (Figures I-21), d'obtenir un
couple d'amplitude moins élevée qu'en nominal mais limitant les ondulations de couple [18]
[29] [31]. Pour obtenir le même couple, il faut augmenter l'amplitude des courants d'un facteur
3 (comme montré sur la figure de gauche des Figures I-21), mais avec pour conséquence un
échauffement de la machine plus important pouvant la détériorer rapidement.
IA IB’ IC IC’ 6π 6 π IB I IB’ IC’ π 3 t
Il est aussi possible de connecter le point neutre à un bras supplémentaire sur
l'onduleur (Figure I-22). Cela à l'avantage de ne pas obliger à avoir accès au point milieu du
bus continu. Un point à prendre en compte est que le courant passant par la connexion du
point neutre après la faute est plus élevé que les courants vus par les phases encore saines.
Figure I-22 Onduleur avec le point neutre connecté à un quatrième bras
(4)Diviser l'onduleur en plusieurs sous parties
Afin de donner une indépendance totale au niveau électrique, l'équipe de Newcastle
Upon Tyne à préféré fournir un onduleur indépendant à chaque phase [13] [32] [33] [34]
(Figure I-23).
Figure I-23 Alimentation d'une phase de la machine avec un pont en H indépendant.
Ce principe est d'ailleurs utilisé par d'autres [15] [16] [35] [36] (voir exemple Figure
I-24) et est cité dans l'article de comparaison [29]. En fournissant une alimentation
indépendante pour chaque phase, une liberté supplémentaire sur la gestion des fautes et les
possibilités d'alimentation est obtenue.
Figure I-24 Structure avec un onduleur pour chaque phase [35] (deux bobines diamétralement opposées par phase)
Le pont en H présente l'intérêt de confiner les courants de circulation, après un
court-circuit sur un interrupteur (voir partie I.4.2.2), à la phase en faute, que ce soit phases
alimentées ou non. De plus, cette méthode réduit le courant circulant dans les interrupteurs en
utilisation normale. En effet, à la place d'une connexion classique en étoile des phases qui
impose une tension simple aux bornes des bobines, chaque phase est alimentée par la tension
du bus continu, c'est à dire l'équivalent de la tension composée du cas classique. Une
diminution dans un rapport 3 de l'amplitude du courant nominal apparait. Cela permet de
réduire les coûts et l'encombrement d'un interrupteur. Donc même si cette solution en réclame
plus, elle est peut-être économiquement viable. Le coût d'un tel système serait donc à chiffrer
par rapport à un système classique pour tirer des conclusions. D'après l'article [29], le surcoût
est estimé à environ 15 % pour une machine triphasée.
Toujours dans le but de réaliser un pont en H pour chaque phase, différentes
configurations sont possibles pour limiter les sources d'alimentation. Ces configurations sont
présentées dans l'article [37] et une est utilisée par [38]. La Figure I-25 et la Figure I-26
présentent des configurations données par l'article.
Figure I-25 Onduleur avec deux lignes DC en cascade
Figure I-26 Onduleur avec tous les ponts en H sur la ligne DC