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Implication du métabolisme des monocarbones dans la pathogénie des MICI

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Parties III : MALADIES INFLAMAMATOIRES CHRONIQUES INTESTINALES ET

1) Implication du métabolisme des monocarbones dans la pathogénie des MICI

a) Hyperhomocystéinémie et MICI

Une hyperhomocystéinémie modérée est fréquente chez les sujets atteints de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI). Etant donné qu’une hyperhomocystéinémie est un facteur de risque de thromboses dans la population générale et que les patients avec MICI présentent un risque accru de maladie thrombotique, plusieurs équipes ont cherché à expliquer ce risque accru par une hyperhomocystéinémie. D’après des données de la littérature, l’homocystéine pourrait promouvoir une inflammation muqueuse chronique par le biais d’un stress oxydant, d’un stress du réticulum endoplasmique (RE), et d’une activation de facteurs pro- inflammatoires (Roybal, Yang et al. 2004).Les anomalies épigénétiques (méthylation de l’ADN) associées à une hyperhomocystéinémie et à une carence en folates pourraient quant à elles expliquer, au moins en partie, l’augmentation du risque de cancer colorectal observée chez les malades souffrant de MICI. Une autre étude montre que le niveau d’homocystéine plasmatique est corrélé à l’activité, au nombre de poussées, à la sévérité et à la durée de la RCH (Drzewoski, Gasiorowska et al. 2006).

L’ensemble de ces éléments pourrait permettre une meilleure compréhension de la physiopathologie des MICI.

En 2001, l’équipe de Papa décrivait l’existence d’une hyperhomocystéinémie chez 26,5% des patients atteints de MICI contre 3,3% chez les sujets sains (Papa, De Stefano et al. 2001). Cette tendance a été retrouvée chez des patients souffrants de rectocolite hémorragique chez lesquels la prévalence de l’homocystéinémie est de 30% contre 10 % chez les contrôles (Zezos, Papaioannou et al. 2005).

Depuis 1998, onze autres études ont étudié la concentration de l’homocystéine plasmatique chez les patients atteints de MC ou de RCH. Parmi eux, dix études ont retrouvé que le taux d’homocystéine est plus élevé chez les patients atteints de MICI que chez les sujets sains (Tableau 5). Deux études ont également étudié la concentration de l’homocystéine sur des prélèvements de muqueuse colique chez des sujets atteints de MICI : les taux intra-muqueux s’avèrent nettement plus élevés que chez les sujets sains (Danese, Sgambato et al. 2005), suggérant l’implication de l’hyperhomocystéinémie dans la pathogénie des MICI.

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Tableau 5 : Le niveau de l’homocystéinémie chez les sujets atteints de MICI et les sujets sains (Peyrin-Biroulet, Rodriguez-Gueant et al. 2007).

b) Stress oxydant

L’homocystéine provoque une production des espèces réactives de l’oxygène (ROS) et par conséquent un stress oxydant. De nombreuses études ont mis en évidence le rôle majeur joué par les espèces réactives de l’oxygène dans la survenue des lésions de la muqueuse colique au cours des MICI (Kruidenier, Kuiper et al. 2003). De plus, l’homocystéine sensibilise les cellules au stress oxydant en diminuant l’expression de nombreuses enzymes anti-oxydantes dont la glutathion peroxydase (GPX) et l’hème oxygénase-1 (HO-1) (Outinen, Sood et al. 1999).Une diminution du pouvoir antioxydant a ainsi été rapportée chez les sujets atteints de MICI (Dincer, Erzin et al. 2007).

c) Inflammation

Il a été montré in vitro que l’homocystéine pouvait stimuler la production de plusieurs facteurs pro-inflammatoires tels que MCP-1 (monocyte chemoattractant protein-1), une chémokine pour les monocytes, et l’interleukine IL-8, une chémokine pour les lymphocytes T et les neutrophiles, ceci via l’activation du Necrosis Factor kappa B (NF-kB). Par ailleurs, l’homocystéine est capable de moduler la réponse inflammatoire en régulant la synthèse de molécules d’adhésion comme VCAM-1 (vascular cell adhesion molecule-1), ICAM-1 (intercellular adhesion molecule- 1) et PAI-1 (plasminogen activator inhibitor-1) (Wang, Woo et al. 2002).

75 L’expression de ces 3 molécules étant augmentée chez les patients atteints de MICI (Jones, Banks et al. 1995).L’homocystéine pourrait également provoquer des lésions de la muqueuse intestinale par un effet cytotoxique médié par le tumor necrosis factor-�� (TNF-�). En effet, l’homocystéineinduirait une mort cellulaire en augmentant la capacité du TNF-��à détruire les potentiels membranaires mitochondriaux (Ratter, Gassner et al. 1999). L’homocystéine induit ainsi une inflammation sur l’endothélium microvasculaire d’intestin humain en stimulant l’expression de VCAM-1,MCP-1 et la phosphorylation de p38 (Danese, Sgambato et al. 2005). Au total, les lésions induites par l’homocystéine via une augmentation de molécules d’adhésion, de cytokines et de chémokines pourraient participer au maintien d’une inflammation chronique de la muqueuse intestinale chez les patients atteints de MICI.

d) Hypométhylation

La méthylation des régions promotrices du génome joue un rôle majeur dans la régulation de l’expression des gènes. Une hyperméthylation entraîne une répression, alors qu’une hypométhylation est associée à une activation de gènes (Peyrin-Biroulet, Barraud et al. 2004). L’homocystéine influence le niveau de méthylation de l’ADN car :

1) la reméthylation de l’homocystéine produit de la méthionine, le précurseur de la S- adénosylméthionine (SAM), qui est un donneur de groupes méthyles impliqués dans plus de cent réactions de méthylations dans notre organisme;

2) SAH, est un puissant inhibiteur des enzymes responsables de la méthylation de l’ADN, les méthyltransférases; l’inhibition de ces dernières par une hyperhomocystéinémie est donc responsable d’un état d’hypométhylation dans la cellule. Cette hypométhylation pourrait alors avoir comme conséquence d’activer certains gènes pro-inflammatoires chez les sujets atteints de MICI.

Par ailleurs, une hypométhylation globale de l’ADN associée à une hyperméthylation spécifique de gènes suppresseurs de tumeurs est un trait caractéristique des cellules tumorales, comme cela été rapporté avec une hyperméthylation spécifique des promoteurs des gènes p16 et hMLH1 (human mutL homologue 1) dans les tumeurs colorectales (Peyrin-Biroulet, Barraud et al. 2004). Une hypométhylation globale de l’ADN, peut-être secondaire à une hyperhomocystéinémie par carence en folates, a été mise en évidence dans les formes sévères de RCH (Gloria, Cravo et al. 1996). Ces données pourraient donc expliquer, au moins en partie, le risque accru de cancer

76 colorectal chez les sujets souffrant de MICI. Plus récemment, une hyperméthylation du récepteur aux œstrogènes a été proposée comme un marqueur du risque de néoplasie colorectal dans la RCH, soulignant l’implication possible d’anomalies épigénétiques dans la carcinogénèse colorectale au cours des MICI (Fujii, Tominaga et al. 2005).

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