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3. IMPLICATION DU DIMORPHISME SEXUEL

Le sexe des individus est un paramètre important dans la réponse cellulaire aux expositions environnementales car il est susceptible de faire varier le niveau de sensibilité d’un individu à une exposition donnée. Ce dimorphisme sexuel peut être observé aux différents niveaux de l’échelle des systèmes de régulation biologiques et avoir des conséquences directes sur le niveau de sensibilité des individus à une exposition donnée [76-78].

La première différence constatée s’observe au niveau même des chromosomes. Les femelles ayant deux chromosomes X et les mâles, un chromosome X accompagné d’un chromosome Y (de longueur, de séquence et d’expression différentes de X), ils subissent des influences environnementales et hormonales différentes. Selon le sexe des individus, cette différence chromosomique s’exprimera de façon différente dans les tissus tout au long de la vie.

Les chromosomes sexuels ont une grande importance dans l’expression des sensibilités individuelles.

On compte environ 600 gènes différentiellement exprimés selon le sexe dans le blastocyste de la souris au stade E 3.5. Chez le bovin, l’analyse ontologique montre une surexpression liée au métabolisme des protéines dans les blastocystes femelles. A contrario, le métabolisme global du glucose est deux fois plus important chez le mâle et la voie des pentoses phosphates quatre fois plus importante que chez les femelles. Ces observations ayant été confirmées dans des embryons humains montrent l’existence d’un dimorphisme sexuel d’ordre chromosomique capable de moduler l’expression génique en l’absence de toute influence hormonale sexuelle.

L’expérience montre aussi que l’ablation ou la supplémentation hormonale ne suffit pas à effacer certaines différences métaboliques.

La deuxième différence s’observe au niveau des hormones sexuelles produites et de leur influence sur l’expression des gènes. Les hormones testiculaires ont aussi une influence dans certaines régions spécifiques du cerveau mais aussi sur la mort et la prolifération cellulaire au stade développemental périnatal.

Ces différences sexuelles ayant été récemment observées par imagerie à résonance magnétique (IRM). Elles confirment l’existence d’un dimorphisme sexuel au niveau de nombreuses structures du cérébrales dont le développent et/ou le fonctionnent diffère [79].

La dernière différence vient des rapports sociaux culturels qu’entretient l’individu avec son environnement. Ceux-ci influent sur l’expression du genre mais aussi sur l’expression même des gènes par l’intermédiaire de phénomènes épigénétiques. Dès la naissance, l’influence maternelle et sociétale peut agir sur le déterminisme phénotypique et psychique par l’intermédiaire de mécanismes épigénétiques.

3.1. DIFFERENCES EPIGENETIQUES.

Les niveaux de régulations épigénétiques dépendent étroitement des influences chromosomiques, gonadiques et sociétales. La méthylation des promoteurs géniques liés à l’expression des récepteurs aux œstrogènes peut avoir des répercussions comportementales tardives sur le sentiment d’instinct maternel.

Des travaux effectués chez le rongeur montrent que l’état conformationnel de la chromatine est impliqué dans la régulation gènes associée au dimorphisme sexuel.

Il existe une différence temporelle de reprogrammation entre les gamètes mâles et femelles qui implique une différence de sensibilité des individus aux expositions environnementales à âge égal.

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3.2. DIFFERENCES GENETIQUES.

Au stade E10.5 chez la souris, une cinquantaine de gènes impliqués dans les processus de différenciation, de prolifération cellulaires, de régulation transcriptionnelle et signalisation sont exprimés de manière différente dans le cerveau embryonnaire des mâles et des femelles [80].

La proportion des gènes sexuellement modulés varie d’un organe à l’autre. Seuls 8% de ces gènes sont exprimés similairement dans tous les organes.

Dans le cerveau adulte, 14 % des gènes sont exprimés de manière différente et cette proportion s’élève à 70 % dans le foie [78].

Par exemple, les gènes codant pour Cyp2a2 (cytochromes P450) sont exclusivement exprimés chez les mâles alors que Cyp2c12 l’est pour les femelles [81].

3.3. DIFFERENCES METABOLIQUES.

Selon le sexe, on observe des différences métabolisme des embryons mais aussi au niveau de leur vitesse de développement, de leur taille mais aussi de leur sensibilité en terme de morbidité.

Chez le rongeur adulte, des différences moléculaires de régulation hépatique, rénale, cérébrale et cardiaque sont observables [82]. Néanmoins, ces différences fluctuent avec l’âge, l’état de santé des individus et les conditions environnementales.

3.4. DIFFERENCES PHENOTYPIQUES.

Chez le fœtus et le nouveau-né, des différences sexuelles peuvent être aussi observées au niveau des cerveaux (volume des noyaux de certaines régions cérébrales, nombre des neurones, densité et nombre des synapses, morphologie gliale, morphologie de l’hippocampe pouvant à la suite d’un stress précoce expliquer des incidences comportementales tardives) [83].

3.5. DIFFERENCES TOXICOLOGIQUES ET PHARMACOLOGIQUES.

On observe des différences de pharmacocinétique et de pharmacodynamie selon le sexe des individus. Ces différences contribuent à la part d’efficacité thérapeutique ou de toxicité des xénobiotiques. Ces différences peuvent s’expliquer par des différences de niveaux d’expression des gènes associés à certaines enzymes du système de détoxification telles que les cytochromes P450 (impliquées dans le métabolisme des stéroïdes, des acides gras, des médicaments et d’autres xénobiotiques) mais aussi au niveau de l’accumulation des protéines membranaires de transport des cellules tubulaires rénales (impliquées dans la clairance des xénobiotiques) [81].

3.6. DIFFERENCES GENERATIONNELLES.

D’un point de vue intergénérationnel, le dimorphisme sexuel intervient suivant différent modes d’action.

Le premier mode résulte de l’effet d’une transmission somatique de perturbateurs métaboliques (facteurs nutritionnels, stress maternel in utero voire pendant l’allaitement) qui peuvent agir directement sur les cellules somatiques durant la période fœtale et périnatale [84, 85].

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Le second mode se fait par l’intermédiaire des lignées germinales parentales dont les périodes de sensibilité à l’environnement varient selon le sexe des individus [86, 87].

La transmission intergénérationnelle de l’empreinte d’un stress environnemental dépend à la fois du sexe du parent exposé et de celui de sa progéniture [88, 89].

La différence sexuelle d’un effet environnemental dépendra aussi de la génération considérée [90].

Selon le sexe des individus considérés, une exposition donnée pourra avoir des répercussions directes ou indirectes sur la descendance

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