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Impact du filtrage sur la relation de "Minobe"

III.2 Sensibilité des résultats à la méthodologie

III.2.4 Impact du filtrage sur la relation de "Minobe"

Minobe et al (2008) a mis en évidence une corrélation négative entre la divergence du vent de surface et le laplacien de la SST (relation 0.1.4). Cette étude porte sur les structures de meso-échelle stationnaires associées au passage du Gulf Stream au large de la côte Est de l’Amérique du Nord. Des données de réanalyse, moyennées sur plusieurs années (5 ans) ont été utilisées. En revanche, les travaux s’intéressant aux relations (0.1.1), (0.1.3) et (0.1.2), étudient des champs moyennées sur des durées beaucoup plus courtes (6 1 mois e.g. Desbiolles et al,2014;Perlin et al,2014). Les corrélations entre div(Vs0) et 52SST0ont été calculées à partir de champs moyennés sur toute l’année, en été, en hiver et en juillet 2007, et filtrés grâce à des filtres gaussiens de différents écart-types σ. Les résultats sont présentés FigureIII.19. Les corrélations sont toujours inférieures à 0.55 (en valeur absolue), quelque soit le filtre et la durée de la moyenne utilisés. Seules celles calculées à partir des champs moyens en été dépassent 0.25 lorsque σ >40 km, atteignant 0.54 pour σ=350 km. Les corrélations sont par ailleurs positives, ce qui n’est pas cohérent avecMinobe et al(2008).

Les structures de meso-échelle du vent dans le Pacifique Sud-Est semblent donc suivre une loi décrite par (0.1.1), et non pas par (0.1.4). Cette région est très différente de celle étudiée parMinobe et al (2008) par de nombreux aspects :

- Tout d’abord, le système d’upwelling du Pérou-Chili ne présente pas de structures de meso-échelle stationnaires et permanentes comparable à celle du Gulf Stream : La SST moyennée de 2002 à 2006 ne montre que la présence du gradient côte-large associé à l’upwelling, mais celui-ci est principalement situé dans la région cotière où les effets orographiques sont importants.Brachet et al(2012) a suggéré que la dynamique atmosphérique pourrait être différente selon que l’on étudie des structures de meso-échelle permanentes et stationnaires présentes dans un champ moyen sur une longue durée (> 1 an), ou des structures présentes dans une moyenne de quelques jours . - L’intensité des anomalies de SST est beaucoup plus faible dans le Pacifique Sud-Est que dans la région du Gulf Stream où les fronts de SST peuvent représenter des

varia-0 50 100 150 200 250 300 350 −1 −0.5 0 0.5 1 Correlation Ecart−type du filtre (km) annuel ete hiver juillet

Fig. III.19 Corrélations entre div(Vs0) et 52SST0 en fonction de l’écart-type du filtre gaussien ayant permis de calculer les anomalies. Les courbes noire, rouge, bleue et bleue pointillée correspondent à des anomalies calculées à partir de champs de CPL16A moyennés respectivement sur toute l’année, de janvier à mars, de juillet à septembre et en juillet 2007.

tions de ∼ 10 °C sur 100 km. Bourras et al(2006) a, en effet, avancé l’hypothèse que les mécanismes de la réponse atmosphérique pourraient être différents selon l’inten-sité des anomalies de SST car la hauteur jusqu’à laquelle s’étend leur influence serait différente.

-Les conditions climatiques moyennes du Pacifique Sud-Est sont très différentes de l’Atlantique Nord-Ouest. En particulier, le sommet de la CLA présente une inversion très marquée (voir Chap. II), qui peut largement moduler la réponse de la CLA aux anomalies de SST (Hashizume et al,2002, Chap.IV). L’étude deLambaerts et al(2013) met en évidence une corrélation entre la divergence du vent et le laplacien de SST uni-quement dans des conditions de vent très faible (6 1 m s−1). Lorsque le vent est plus intense, la divergence de ses anomalies devient alors proportionnelle à graddw(SST0), ce qui correspond donc à la relation (0.1.2) (Riwal Plougonven, communication per-sonnelle). Le vent de surface du Pacifique Sud-Est dépassant les 5 m s−1, il serait donc cohérent que les anomalies de TV soient décrites par la relation (0.1.2) et non pas par (0.1.5).

Conclusion du chapitre

Les observations satellite ont montré que le champ de meso-échelle de l’intensité de la TV est corrélé à celui de la SST : à plus de 150 km de la côte, jusqu’à 35 % de la variabilité de l’intensité de la TV est expliquée par une relation linéaire entre k−τ k0 et

SST (0.1.1). La corrélation et le coefficient de proportionalité associé à (0.1.1) varient spatialement et temporellement : ils sont plus forts en hiver (austral) qu’en été, et au Pérou (9 °S-18 °S) qu’au Chili (18 °S - 27 °S).

Les simulations couplées montrent également une forte corrélation entre k−τ k0et SST0. Le modèle surestime jusqu’à 50 % l’intensité de la réponse de la TV aux anomalies de SST. Néanmoins, les variations spatiales et saisonnières de cette intensité sont proches de celles des observations.

Nous avons tiré parti de la haute résolution du modèle (1/12 °) pour analyser en détail l’origine des variations spatiales de l’intensité du couplage. Près de la côte, la meso-échelle de TV est faiblement corrélée (R ∼ 0.4) aux anomalies de SST car la variabilité de la TV due aux effet orographiques y est plus forte. Au Chili, l’intensité de la réponse de la TV à la meso-échelle de SST est plus faible qu’au Pérou car, au large de 81 °W, le vent est moins régulier et moins fort.

Dans ce chapitre nous avons également montré que l’estimation des caractéristiques de couplage entre k−τ k0 et SST0est sensible au type de filtre utilisé pour isoler la meso-échelle océanique. Le filtrage temporel retient une partie de la grande-meso-échelle, et élimine au contraire certaines structures de petite taille. Nous avons donc choisi d’utiliser un filtrage spatial.

Ce choix nous a permis d’étudier les interactions SST-TV pour différentes tailles de meso-échelle. Plus les structures sont fines, plus la réponse de la TV aux anomalies de SST est forte. Un filtre gaussien d’écart-type 150 km extrait efficacement les structures de tailles inférieures à 300 km.

Les corrélations entre le laplacien de SST et la divergence du vent (relation0.1.4) ont également été calculées. Elles sont cependant très faibles et montrent que le Pacifique Sud-Est n’est pas une région où ont lieu les interactions décrites par Minobe et al (2008) et Lambaerts et al(2013).

Mécanismes de la rétroaction de la

SST sur la tension de vent

L’analyse des données satellite et des simulations numériques a donc montré que les anomalies de meso-échelle de l’intensité du vent de surface et de la TV étaient proportionelles à celles de la SST dans la région du Pacifique Sud-Est. Les mécanismes de l’ajustement de la CLA aux anomalies de SST sont analysés dans ce chapitre à l’aide des simulations, afin d’expliquer les variations saisonnières de l’intensité du couplage océan-atmosphère. Cette étude a fait l’objet d’un article publié dans Climate Dynamics et présenté ici.

IV.1 Résumé

Le modèle couplé WRF-OASIS-NEMO a été utilisé pour étudier les interactions SST-Vent à meso-échelle dans le Pacifique Sud-Est. Après avoir comparé la relation entre les anomalies d’intensité de la TV et de la SST dans les simulations et dans les observations, nous analysons les mécanismes de la réponse du vent à la meso-échelle de SST dans la simulation CPL16A (appelée "CPLM" dans l’article, et qui utilise le schéma de CLA MYNN).

Les variations de la vitesse du vent au dessus des fronts de SST sont analysées grâce à des composites des termes du bilan de quantité de mouvement dans la direction du vent. Au dessus d’un gradient de température de l’océan, lorsque le vent souffle du froid vers le chaud, celui-ci est accéléré près de la surface, et déccéléré en altitude (au dessus de 200 m). Au contraire, du chaud vers le froid, le vent est freiné près de la surface et accéléré au dessus de 100 m.

Le bilan de quantité de mouvement montre que l’accélération du vent de surface est due à des anomalies du cisaillement de tension turbulente, les anomalies de gradient de pression ayant un rôle négligeable. En altitude (au dessus de 100 m), ces dernières deviennent cependant importantes pour expliquer les anomalies de vitesse. La faible intensité des anomalies des gradients de pression à la surface de l’océan pourraient être expliquée par un effet de compensation des anomalies de pression par les variations de la hauteur de la CLA (back-pressure effect), décrit parLindzen and Nigam(1987) et renforcé par la présence d’une inversion de température dans la région (Hashizume

et al,2002).

Près de la surface, les anomalies de la tension turbulente sont créées par des ano-malies du coefficient de mélange KM et sont proportionelles au cisaillement de vent de grande-échelle k∂Z−→v k. Elles sont pour moitié compensées par les anomalies de meso-échelle du cisaillement de vent.

Les anomalies de KM sont dues à une augmentation de l’énergie cinétique turbulente au dessus des anomalies chaudes de SST, et une diminution au dessus des anomalies froides. Une analyse du bilan de TKE montre que le terme de flottabilité est responsable de ces variations, le terme dû au cisaillement de vent étant négligeable.

L’intensité de la réponse de KM à la meso-échelle de SST est inchangée entre les mois d’hiver et d’été mais k∂Z−→v k est plus intense en hiver, expliquant que la ré-ponse de l’intensité de la tension turbulente (et donc de la TV) soit plus forte à cette saison. Les variations de k∂Z−→v k sont forcées par le déplacement saisonnier de grande-échelle et quasi-méridien de l’anticyclone du Pacifique Sud-Est, responsable de l’intensité moyenne du vent de surface.

La sensibilité des résultats au choix de la paramétrisation de CLA a été testée en analysant également la simulation CPL1cA (CPLY dans l’article), qui utilise le schéma de CLA YSU, au lieu de MYNN. A nouveau, les anomalies de la tension turbulente sont créées par celles de KM. Les variations de cisaillement vertical de tension turbulente sont responsables d’anomalies de l’intensité du vent près de la surface. Leur ampli-tude est comparable à celles de CPL16A (noté CPLY dans l’article), les anomalies de gradient de pression étant négligeables près de la surface.

La principale différence entre les deux simulations est une absence d’anomalies de ci-saillement de vent dans les 100 premiers mètres de la CLA au dessus des anomalies de SST dans CPL1cA. En conséquence, les anomalies de tension turbulente sont unique-ment dues aux anomalies de KM sans être compensées par les anomalies de cisaillement de vent. Cette absence de modification du cisaillement au dessus de la meso-échelle océanique n’est pas cohérente avec les observations. Il s’agit vraisemblablement d’une limitation de la capacité des schémas non locaux, comme YSU, à représenter correc-tement les processus d’ajuscorrec-tement de la CLA aux anomalies de SST de fine échelle spatiale.