• Aucun résultat trouvé

2. Imagerie quantitative multiparamétrique

2.1. Notions théoriques

2.1.2. Imagerie quantitative

Comme discuté ci-haut, les trois paramètres physiques fondamentaux les plus importants en IRM sont la densité protonique (PD), le temps de relaxation longitudinal (T1) et le temps de relaxation transverse (T2 ou T2*). Ces paramètres physiques sont directement influencés par la structure biophysique locale ou l’environnement biochimique des tissus. Les différents types de tissus biologiques possédant des propriétés distinctes, la manipulation judicieuse de la magnétisation à l’aide de séquences d’impulsions RF permet de produire des images offrant des contrastes variés, pondérées selon ces propriétés fondamentales.

De plus, la caractérisation de ces paramètres de façon quantitative permet non seulement d’obtenir un contraste visuel, important pour la détection de lésions ou de pathologies macroscopiques par exemple, mais également d’obtenir des mesures absolues, reproductibles et indépendantes des conditions de mesure, qui peuvent être employées afin d’obtenir des informations sur les caractéristiques microstructurelles du tissu sous-jacent.

Bien que la relation précise entre les paramètres fondamentaux du signal IRM et les propriétés biophysiques ne soit pas établie de façon certaine, il est clair que T1, T2 et PD sont tous influencés à divers degrés par le contenu en eau, la composition des macromolécules, des

exemple, les temps de relaxation T1 et T2 plus courts dans la matière blanche que la matière grise sont dus principalement à la teneur importante en myéline, combinée à une réduction de la fraction d’eau libre. Ainsi, un changement dans ces propriétés peut être relié aux changements biologiques conséquemment à certaines pathologies, conditions neurodéveloppementales ou au vieillissement.

Bases biophysiques

Le contraste IRM du tissu cérébral est généralement vu comme étant principalement influencé par le contenu en fer et en myéline (Stüber et coll. 2014). De plus, comme la distribution de ces substances se recouvre dans plusieurs régions corticales, plusieurs études ont montré des relations entre la concentration en myéline et en fer avec les contrastes T1 et T2*.

Par exemple, Cohen-Adad (2012) rapporte que le contraste des cartes paramétriques corticales T2* semble fortement lié à la présence de fer dans la ferritine. Le fer étant un agent paramagnétique, celui-ci induit des variations locales de susceptibilité magnétique, ce qui entraîne un déphasage plus rapide des spins. Une autre source du contraste T2* est reliée à la présence de myéline, également paramagnétique, et dont les protons de la couche d’hydratation sont caractérisés par un T2* plus court que les protons libres (respectivement ~20 ms vs ~80 ms à 3T). Séparer la contribution de la myéline et du fer au signal T2* est un sujet de recherche actuel, mais se révèle en pratique difficile étant donné que ces deux éléments se trouvent fréquemment co-localisés.

Stüber et coll. (2014) ont examiné la relation entre les paramètres T1 et T2* avec des mesures quantitatives de concentration en myéline et en fer. À l’aide d’imagerie ex vivo à ultra- haute résolution, de marquages histologiques, de même qu’en utilisant une technique de spectroscopie par rayons X, couvrant des régions du cortex en périphérie du sillon central et dans le cortex visuel, les auteurs ont ainsi déterminé les contributions de la myéline et du fer aux contrastes T1 et T2*, arguant que ces deux composantes sont responsables de la majorité du contraste dans le signal IRM. Ils ont ainsi trouvé que le contraste T1 dans le cortex de ces deux régions est relié à 36% au contenu en fer et 64% au contenu en myéline. D’un autre côté, le contraste T2* dans ces mêmes régions corticales serait expliqué à 81% par le fer et 19% par la myéline. Les auteurs concluent donc leur étude en faisant valoir que le contraste T1 est

majoritairement dû à la concentration en myéline, T1 diminuant avec l’augmentation de myéline, tandis que le contraste T2* est plutôt représentatif du contenu en fer, diminuant également avec l’augmentation du contenu en fer.

Gelman et coll. (2013) se sont intéressé à la relation entre les valeurs de T1 et le contenu en fer, de même que la fraction massique en eau, assumée proportionnelle à la densité protonique. Leur analyse par régions d’intérêts, incluant le cortex préfrontal et les structures de la matière grise sous-corticale, a démontré une relation linéaire inverse entre T1 et la concentration en fer dans ces régions, de même qu’une relation linéaire entre T1 et la fraction en eau pour ces mêmes régions. Ils ont également trouvé une forte relation linéaire entre le contenu en fer et en eau. Selon leurs résultats, les auteurs argumentent que la fraction massique d’eau explique une plus grande part de la variation de T1 à travers ces régions de matière grise que le contenu en fer.

Il est à noter que l’interprétation de la densité protonique en tant que marqueur de la quantité d’eau représente la contribution des protons en diffusion libre du LCR et de l’eau intra- et extracellulaire, mais exclue les protons de la couche d’hydratation associée aux macromolécules, dont le temps T2 très court les rend indétectables directement (Cabana et coll. 2016).

Outre la composition du tissu cortical, l’organisation structurelle de celui-ci semble jouer également un rôle important dans différents contrastes. Les études s’intéressant à la relation entre la cytoarchitecture et les contrastes quantitatifs au niveau cortical sont cependant peu nombreuses, et doivent généralement être corroborées par des analyses histologiques.

Une étude de Harkins et coll. (2015) sur les corrélations entre la microstructure de la matière blanche et les valeurs de T1, bien que non applicable directement à la matière grise corticale, peut servir d’exemple concernant l’impact de la cytoarchitecture sur les valeurs de T1. S’appuyant sur des données histologiques de moelle épinière chez le rat, cette étude tend à montrer une relation linéaire entre T1 et le diamètre axonal, alors qu’aucune relation apparente entre T1 et le contenu en myéline n’est observée. Des données in vivo chez l’humain tendent à montrer les mêmes relations dans le corps calleux. Les auteurs tentent d’expliquer cette relation entre T1 et le diamètre axonal comme étant non directement relié au contenu en myéline, mais

tout de même médiée par elle. Ils argumentent ainsi que les axones avec un plus grand diamètre ont un rapport de surface myélinisée à volume plus petit que des axones plus petits, ce qui résulte en un taux d’interaction plus faible entre l’eau libre (T1 long) et l’eau liée aux membranes de myéline (T1 court), et donc un plus grand T1 pour une fraction volumique constante de myéline. Des mécanismes similaires reliant cytoarchitecture et mesures quantitatives sont probables dans le cortex également. Cependant, la plus grande complexité organisationnelle de la matière grise corticale comparativement à la matière blanche rend l’interprétation des cartes paramétriques en termes de propriétés structurelles plus difficile.