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Imagerie diagnostique non-invasive du cancer du sein

Chapitre 2 : Le cancer du sein: quelle contribution additionnelle l'élastographie peut-elle

2.3 Imagerie diagnostique non-invasive du cancer du sein

La palpation étant une méthode limitée et peu reproductible pour la mise en évidence de masses dans le tissu mammaire, la mammographie, basée sur l'imagerie par rayons X, est actuellement la méthode de référence dans le cadre de l'imagerie non-invasive mais irradiante du sein. En effet, la méthode présente une bonne sensibilité, permettant ainsi la détection de masses suspicieuses, en dépit d'une spécificité moyenne puisque 95% des biopsies recommandées après une mammographie sont négatives (Elmore, Armstrong 2005). La méthode à elle seule permet donc difficilement de distinguer les masses bénignes des masses malignes. De plus, les performances de la mammographie sont liées à l'âge de la patiente. En effet, chez les femmes jeunes (en deçà de 40 ans), les tissus mammaires sont plus denses; les seins sont alors dits radio-opaques, rendant le diagnostic plus difficile à établir. La sensibilité de l‘examen chute ainsi de 85% pour des femmes au-delà de 50 ans à 50-70% pour des femmes plus jeunes. Cependant, la densité des tissus mammaires étant reconnue comme un facteur de risque du cancer du sein (Boyd, Gua 2007), de nombreuses biopsies inutiles sont réalisées chaque année, induisant d'importants coûts aux systèmes de santé, mais aussi un important stress des patientes (Keyzer-Dekker, De Vries 2012), (Brett, Bankhead 2005).

Afin de limiter l'opérateur-dépendance de la mammographie, i.e. les variations liées à l'interprétation des résultats par le clinicien, une table de scores (Tableau 2-1) a été proposée par le collège américain de radiologie appelée classification BI-RADS (Breast Imaging- Reporting and Data System). Cette dernière est basée sur les caractéristiques des masses, telles que la forme, la taille, l'orientation et la présence de microcalcifications (Lazarus, Mainiero 2006) (Figure 2.4). La classification BI-RADS suit une échelle ordinale en 6 catégories. Ainsi,

avéré de malignité. La ''pierre angulaire'' de la classification, tant du point de vue de la patiente que des moyens mis en œuvre, se situe dans la distinction des lésions de type BI-RADS 3 et 4. En effet, tandis qu'une lésion de catégorie 3 justifiera un simple suivi à court terme, la biopsie sera recommandée pour la catégorie 4 et au-delà. Bien que la probabilité de malignité puisse être faible dans cette catégorie, l'utilisation de la biopsie permet de déterminer la nature cancéreuse ou non de la lésion. Par conséquent, afin d'éviter d'éventuels retards dans la prise en charge des patientes, le recours à la biopsie dès lors qu'une lésion suspicieuse est détectée, est compréhensible, en dépit des conséquences citées plus haut que cela implique.

Ainsi, la mammographie est une modalité d'imagerie essentielle dans le diagnostic du cancer du sein, mais présente cependant des limitations telles que l'utilisation de radiations ionisantes, une spécificité limitée, ainsi qu'un inconfort, voire une douleur chez la patiente lors de l'examen (Warner 2011). Enfin, le réel apport de la méthode chez les femmes en deçà de 50 ans est remis en question, en considérant la faible spécificité, ou encore les risques de sur diagnostic (i.e. traiter de manière radicale des tumeurs qui n'auraient probablement jamais évoluées) (Jorgensen 2010).

Tableau 2-1. Classification BI-RADS: Évaluation finale après lecture des images mammographiques et recommandations adéquates.

Catégorie Évaluation Recommendations

1 Négatif Examens de routine. Rien à signaler. 2 Bénin Examens de routine. Bénignité confirmée. 3 Probablement bénin Haute probabilité de bénignité (>98%).

Recommandation de suivi à court-terme. 4 Masse suspecte Probabilité moyenne de malignité (2-95%).

Biopsie à considérer. 5 Haute suspicion de

malignité

Haute probabilité de malignité (>95%). Mise en oeuvre des actions appropriées.

Figure 2.4 Exemple de mammographie d'un carcinome invasif (cercle) apparaissant comme une masse diffuse aux contours mal définis. Les flèches indiquent la présence de microcalcifications (non visibles sur l'image du fait de la résolution). Adapté de (Shin, Kim 2011).

2.3.2 L'ultrasonographie

La pertinence de l'utilisation de l'ultrasonographie dans le diagnostic du cancer du sein a été démontrée par sa capacité à distinguer efficacement les kystes (liquides) des masses solides, ainsi que son indépendance face à la densité du tissu mammaire (Nothacker, Duda 2009), (Corsetti, Houssami 2008). Combinée à la mammographie, la méthode permet d'atteindre une sensibilité de 89%, mais influe peu sur la spécificité (70%) (Berg, Blume 2008, Flobbe, Nelemans 2002). Parmi les critères diagnostiques associés à la malignité, on citera l'orientation de la masse par rapport à la surface de la sonde (parallèle ou non), l'irrégularité des contours, l'aspect lobulaire et la présence de cônes d'ombre induits par la masse suspecte (Rahbar, Sie 1999), (Madjar,, Mendelson 2008) (Figure 2.5). En revanche, la résolution de la méthode d'imagerie ne permet pas, à l'heure actuelle, une bonne visualisation des microcalcifications pouvant indiquer la présence d'un carcinome intraductal. Une autre limitation de l'échographie dans sa forme actuelle est l'acquisition d'images dans des plans

arbitraires (technique main libre) tandis que d'autres modalités (tomograhie et IRM) sont multiplanaires.

L'ultrasonographie présente donc les avantages d'être portative, peu dispendieuse, reproductible car non-ionisante, mais elle permet aussi l'imagerie temps réel lors de procédures invasives telles que la biopsie. Cependant, la place de l'imagerie ultrasonore dans le diagnostic du cancer du sein reste discutée: bien que permettant la détection de tumeurs invisibles à la mammographie, notamment chez les jeunes femmes (Girardi, Tonegutti 2013), (Nothacker, Duda 2009), la pertinence de l'ajout systématique de la modalité en complément de la mammographie n'est pas reconnue par l'ensemble de la communauté (Brancato, Binardi 2007).

Figure 2.5 Exemples d’images ultrasonores obtenues dans les cas (a) d’un kyste, (b) d’un fibroadénome et (c) d’un carcinome. Le kyste et le fibroadénome présentent des contours réguliers à l’inverse du carcinome.

2.3.3 L'imagerie par résonance magnétique

L'imagerie par résonance magnétique, couplée à la mammographie, a démontré d'excellentes performances en terme de sensibilité (Lord, Lei 2007), mais présente simultanément une spécificité limitée (Peters, Borel Rinkes 2008), intimement liée au choix des critères représentatifs de malignité tels que la cinétique d'absorption des agents de contraste (Mahoney, Gatsonis 2012) mais aussi à la difficulté d'interprétation en dépit de la bonne résolution spatiale de la modalité (Pages, Millet 2012) (Figure 2.6). Temps de traitement, accessibilité et coûts rendent difficile l‘utilisation massive de l‘IRM dans un cadre diagnostique public du cancer du sein, justifiant son emploi pour les patientes à haut risque

uniquement. Néanmoins, la modalité se prête bien au monitoring de traitements par chimiothérapie (Martincich, Montemurro 2004), à la mise en évidence de métastases (de Bresser, de Vos 2010), (DeMartini, Lehman 2008), ainsi que lors de l‘évaluation préopératoire (Hollingsworth, Stough 2008, Santamaría, Velasco 2008).

Figure 2.6 Imagerie par résonance magnétique d'un carcinome invasif (cercle jaune). L'excellente résolution spatiale de la méthode permet de distinguer les ramifications de la tumeur au sein du tissu mammaire. Adapté de (Millet, Pages 2012).

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