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La lignée cellulaire THP-1 est connue pour être un modèle bien adapté pour étudier les fonctions cellulaires des monocytes/macrophages impliquées dans le système immunitaire inné (Chanput et al., 2014; Park et al., 2007). Les chaînes saccharidiques liées aux glycoprotéines et aux glycolipides sont des ligands à la fois des lectines bactériennes et immunitaires telles que les sélectines, les galectines ou encore les SIGLECs (Chung et al., 2013; Macauley et al., 2014; Mondal et al., 2015). Ces interactions lectine-glycanne régulent les processus d'adhésion cellulaire, la différenciation cellulaire, les mécanismes d'apoptose ainsi que les voies de signalisation impliquées dans la production de cytokines et la phagocytose de pathogène (Park et al., 2011). Cette première partie a permis de mettre au point une méthodologie pour l’analyse de la glycosylation des cellules immunitaires et de mettre en évidence les variations du glycome lors de la différenciation de la lignée monocytaire THP-1 en macrophages, mais également de mettre en lumière la glycosylation totale de ce modèle cellulaire. En combinant différentes approches analytiques telles que l'analyse structurale des glycannes par spectrométrie de masse, la détection d'épitopes glucidiques par cytométrie en flux et la quantification de l'expression de gènes codant pour des glycosyltransférases par qPCR, nous avons montré que la différenciation des cellules THP-1 monocytaires en macrophages conduit à un remodelage des profils de glycosphingolipides et de N-glycannes. Nous avons caractérisé pour la première fois par spectrométrie de masse le profil en glycosphingolipides de cette lignée et établi que la synthèse de nombreux gangliosides (GM3, GM2, GD3, GM1 et GD1) est considérablement augmentée lors de la différenciation de celle- ci. L'augmentation du nombre de structures de type gangliosides après la différenciation des THP-1 est directement corrélée avec la surexpression de l'ARNm de la ST3GAL5 (GM3 synthase). Des études antérieures ont déjà démontré que la différenciation induite par le PMA dans des lignées de cellules leucémiques humaines HL-60 et U937 en macrophages, active la voie PKC ERK ; il s’en suit une régulation de la GM3 synthase, et par conséquent la synthèse de GM3 (Choi et al., 2007; Momoi et al., 1986; Nojiri et al., 1986).

données suggèrent fortement que l’expression de la GM3 synthase est un carrefour métabolique dans la synthèse des gangliosides, lors de la différenciation monocyte/macrophage.

Après les profils de glycosphingolipides, nous avons caractérisé le N-glycome des monocytes THP-1 et des macrophages en utilisant deux méthodes différentes lors de la préparation des échantillons. D'une part, les N-glycannes ont été libérés à partir de glycopeptides et ensuite per-O-méthylés, dans le but d’augmenter la sensibilité de l’analyse en spectrométrie de masse, évitant également une perte des acides sialiques et permettant aussi des informations de séquences déduites à partir de la fragmentation MS/MS (Ionel Ciucanu and Kerek, 1984; Domon and Costello, 1988). En parallèle, nous avons utilisé une deuxième méthode d’analyse pour étudier nos échantillons. Cette méthode est un procédé de préparation d'échantillons à haut débit développé récemment qui consiste à libérer N-glycannes à partir de glycoprotéines fixées sur une membrane de PVDF dans une plaque 96 puits, suivie d'une dérivation chimique des glycannes permettant la stabilisation et la discrimination des masses des acides sialiques liés en α2,3 et α2,6.

Le but de l’utilisation de deux méthodes n’était pas de comparer les performances (débit, sensibilité, robustesse ...) de chacune, mais plutôt d'obtenir des données complémentaires concernant la structure des N-glycannes. Bien que des structures glycanniques similaires soient observées dans les spectres MS de N-glycannes perméthylés et éthyl-estérifiés, nous avons constaté des divergences de résultats entre ces deux méthodes. Par exemple, le taux de N-glycannes sialylés est significativement plus faible lorsque les N-glycannes sont éthyl- estérifiés par rapport aux N-glycannes perméthylés (25% contre 38%), alors qu'aucune différence n'est observée concernant les taux de fucosylation (80%). Ce type de différence n’est pas surprenant puisque les deux méthodes de préparation d'échantillons diffèrent en de nombreux points (c'est-à-dire l'extraction / dénaturation de protéines, la libération et la dérivation de glycannes, la purification des glycannes dérivés ...). Néanmoins, malgré ces différences, les deux méthodes ont révélé une augmentation de la proportion de N-glycannes de type complexe. En effet, alors que les N-glycannes oligomannosidiques sont prédominants dans les cellules THP-1 non-différenciées, comme indiqué dans la base de données du CFG (http://www.functionalglycomics.org/glycomics/publicdata/glycoprofiling.jsp) (“Home : Functional Glycomics Gateway,”), les N-Glycannes de type complexe représentent le type

majoritaire dans les cellules THP-1 différenciées. Cette augmentation des N-glycannes de type complexe est directement corrélée à une surexpression des ARNm d’enzymes jouant un rôle clé dans la régulation de la maturation des N-glycannes. En particulier, trois β-N-acétyl- glucosaminyltransférases (MGAT1; MGAT4A; MGAT5), impliquées dans la maturation et la ramification des N-glycannes, sont surexprimées de manière significative suite au traitement par le PMA. Contrairement aux cellules THP-1, il a été relevé que dans la lignée monocytaire HL-60, MGAT1 et MGAT5 sont sous-exprimées après différenciation par le PMA (Liu et al., 1998; Zhao et al., 2003). De la même manière, une augmentation modérée de l'expression de ST6GAL1 est enregistrée suite à la différenciation des cellules THP-1 alors que cette enzyme est réprimée dans HL-60 (Taniguchi et al., 1998). Cet écart peut s'expliquer par une régulation différentielle de l'expression des gènes de glycosyltransférases entre ces deux lignées cellulaires leucémiques, comme décrit précédemment par Gassen et al. (Gassen et al., 1998). De plus, nos résultats montrent une augmentation de l'expression de B4GALT1, une β-1,4- galactosyltransférase impliquée dans la synthèse des épitopes de type 2 polyLacNAc. Cette enzyme pourrait être responsable de l'augmentation des structures de polyLacNAc observées par spectrométrie de masse après différenciation des cellules THP-1. Ces structures polyLacNAc peuvent servir de substrats accepteurs pour différentes modifications comme la sialylation et la fucosylation. Nous avons détecté des N-glycannes de type complexe principalement mono-fucosylés et une diminution des structures multi-fucosylées après traitement par le PMA. Ce résultat est conforté par l'augmentation du taux d'ARNm codant

FUT8 et la diminution du niveau d'ARNm de FUT4. FUT8 est une α-1,6-fucosyltransférase

responsable de l'addition d’un résidu de fucose sur le premier résidu de GlcNAc du noyau des

N-glycannes. Par des expériences de cytométrie en flux, Plattner et al. ont précédemment

observé une fixation accrue de la LCA (Lens culinaris agglutinin), une lectine qui reconnaît les

N-glycannes complexes di- et tri-antennés fucosylés en α1,6, suite à la différenciation induite

par PMA des cellules THP1 (Cummings and Etzler, 2009; Plattner et al., 2009). Cette variation de fucosylation peut influer la régulation de diverses activités biologiques comme la phagocytose, la présentation et la capture des antigènes ainsi que la polarisation M1/ M2 des

des monocytes (Stamatos et al., 2005). Une autre sialidase NEU3, située à la membrane plasmique, a été décrite comme étant régulée à la baisse sur des cellules THP-1 différenciées par le PMA (Liang et al., 2006). Cette surexpression de NEU1 peut être responsable du déclin de la sialylation de l'α2,6 et de l’épitope Sialyl Lewis X à la surface cellulaire des cellules macrophagiques. Plusieurs études ont prouvé la perte de l'épitope Sialyl Lewis X lors de la différenciation des lignées monocytaires U937 et HL-60 en macrophages (Gadhoum and Sackstein, 2008; Klein et al., 1998; Trabelsi et al., 1997). De plus, Julien et al. ont montré que l’expression du Sialyl Lewis X au niveau des O-glycannes de PSGL-1 est régulée lors de la différenciation des cellules dendritiques (Julien et al., 2007). Cependant, nous n'avons pu observer aucune variation significative du O-glycome lors de la différenciation des cellules THP-1 en macrophages. Cela suggère que la variation de Sialyl-Lewis X sur les THP-1 est contrôlée par la N-glycosylation. La sialylation régule l'adhésion cellulaire et le processus d'apoptose des monocytes/macrophages (Liu et al., 2011; Seales et al., 2005; Semel, 2002; Swindall and Bellis, 2011). Le traitement par PMA des monocytes induit une perte de la sialylation de l'intégrine α5β1 via la voie de signalisation PKC/ERK et une adhérence cellulaire accrue à la fibronectine. L’adhésion cellulaire via l'intégrine α5β1 est également régulée par le niveau d'expression de MGAT5, et son activité est impliquée dans l'adhésion et la transmigration des cellules monocytaires THP-1 (Yang et al., 2012). Les activités relatives de ces différentes glycosyltransférases semblent être cruciales pour la différenciation cellulaire. L’ensemble des résultats présentés dans ce chapitre ont fait l’objet d’une publication parue dans Journal of Proteome Research (Delannoy et al., 2016). Cela a permis de mettre en lumière l’ensemble du glycome des cellules THP-1, mais également de mettre en place une méthodologie capable de montrer les variations de glycosylation en spectrométrie de masse. Cette méthodologie peut être ensuite appliquée à l’étude de la glycosylation des macrophages dans des contextes inflammatoires ou infectieux.

Glycosylation

changes

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