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La thèse d’Anthony Janin est un travail sur la caractérisation du comportement en dynamique et des ca-ractéristiques de rupture d’un assemblage collé pour l’industrie aéronautique. Le potentiel des assemblages collés dans ce domaine est considérable dans la mesure où cela permettrait d’éviter des assemblages par rivetage et d’alléger les appareils. L’enjeu est de caractériser le comportement en dynamique du joint de colle, alors que l’outil de mesure (les barres d’Hopkinson) ne donne accès qu’à une information très glo-bale (déplacements et forces au droit de l’échantillon). Ainsi les barres ne permettent de caractériser que la structure collée, comme dans un certain nombre d’études [224–226], et non le joint de colle lui-même. Il s’agit d’un aspect important, car les calculs prédictifs pour concevoir les structures en aéronautique né-cessitent des modèles de comportement pour les joints et non le comportement apparent d’une structure collée. Par ailleurs, si des travaux portent sur la caractérisation des joints dans un régime de sollicitation en quasi-statique [227,228], les quelques études en régime dynamique ont été menées sur des échantillons plats simples (single-lap joint et double-lap joint) [224–226], qui ne permettent d’investiguer que le compor-tement en cisaillement des joints.

Le premier aspect de ce travail a donc été de développer des conditions d’essais et un nouvel échan-tillon permettant de tester en dynamique le joint de colle sous différents types de sollicitations. En effet, si quelques essais avaient été réalisés en adaptant le montage des barres d’Hopkinson pour réaliser des charge-ments sous torsion [229] ou en tension [230], chaque montage expérimental ne permettait d’explorer qu’un unique état de contrainte. L’alternative que nous avons choisie est donc de concevoir un échantillon nouveau pour être testé avec le montage classique des barres d’Hopkison en compression, et qui permette de réaliser différents états de chargement multiaxiaux. Pour cela, parmi de nombreux types d’échantillons conçus pour identifier la ténacité des matériaux homogènes (et non des assemblages collés) [231–234], nous avons adapté le disque brésilien [235,236]. Dans un régime quasi-statique, un échantillon inspiré du disque brésilien a été proposé pour les assemblages collés [237,238] (disque sandwich). Cet échantillon permet de réaliser une infinité de chargements multiaxiaux différents en orientant l’échantillon dans la machine d’essai. Cepen-dant un disque s’adapte mal aux barres d’Hopkinson pour le régime dynamique, car le contact entre les barres n’est pas assez franc. Ainsi, les différents états de contrainte pour solliciter le joint ont été obtenus en développant un échantillon sandwich constitué de deux demi-dodécagones en aluminium collés, permet-tant trois orientations différentes de chargement pour les essais aux barres (cf. figure4.1b). Par ailleurs, des “becs” sont ajoutés pour limiter les effets de bords. Une procédure de préparation des surfaces, de collage et

de polissage (cf. figure4.2a) permet d’obtenir des échantillons identiques dans de bonnes tolérances. Le second aspect important est de permettre une analyse locale pour identifier les caractéristiques du joint de colle. En effet, en plus de l’information globale apportée par le système des barres d’Hopkinson, des mesures locales ont été produites en ajoutant une caméra rapide (cf. figure4.1a) et un mouchetis sur l’échantillon pour mesurer le champ de déplacement autour du joint par corrélation digitale d’images (DIC) [230,239–243]. Les limites technologiques contraignent à un compromis entre la résolution des images et la fréquence d’acquisition. En optimisant les mouchetis [244], réalisés à l’aérographe et en choisissant un éclairage flash pour fournir suffisamment de lumière pendant la courte durée de l’essai, nous avons obtenu une résolution micrométrique avec une fréquence d’acquisition suffisante pour suivre la déformation au cours des tests (cf. figure4.2b).

(a) Vue schématique du montage expérimental. (b) Plan de l’échantillon DODECA.

FIGURE4.1 – Schémas de conception du dispositif expérimental.

(a) 1) Dispositif de collage. 2) Échantillon collé avec polis-sage. 3) Échantillon après polispolis-sage.

(b) Photographie du dispositif avec l’échantillon peint et la caméra rapide.

FIGURE4.2 – Dispositif expérimental.

Les résultats de la corrélation d’image sont présentés au cours du temps à la figure4.3. Le joint est trop fin pour que l’on puisse mesurer précisément les déplacements dans son épaisseur. En revanche, on peut mesurer précisément, les déplacements tangentiels et normaux dans les substrats de part et d’autre du joint. Cette information assez locale permet d’identifier les sauts de déplacement en cisaillement et en tension subis par le joint, et ainsi d’identifier la déformation dans le joint. Sur cette base et moyennant quelques approximations, on peut sans faire de calcul inverse, identifier un comportement approximatif du joint (cf. figure4.4) en utilisant uniquement les données expérimentales disponibles. Bien sûr, ce comportement ap-parent du joint ne dispense pas d’établir un modèle inverse pour caractériser un modèle de comportement. Nous avons donc développé une méthode inverse pour identifier le comportement du joint de colle. Il s’agit d’un sujet très étudié pour diverses applications [245–253]. Parmi plusieurs approches bien établies

u (μm) -0.8 3.0 1.1 u (μm) 45.0 70.8 57.9 u (μm) 4.0 13.5 8.7 u (μm) 217 367 292 v (μm) -0.3 3.4 1.6 v (μm) 52.3 69.7 61.0 v (μm) 6.3 14.2 10.2 v (μm) 321 353 337 t = 1 μs t = 41 μs t = 14 μs t = 180 μs t = 1 μs t = 41 μs t = 14 μs t = 180 μs

Horizontal displacement U

Vertical displacement V

FIGURE4.3 – Champs de déplacements obtenus par corrélation.

(a) Force normalisée en fonction de la déformation en ci-saillement pour le cas à 45et différents essais.

εxy

σ

xy

15°, V = 5.0 m/s 45°, V = 5.8 m/s

(b) Comportement approximatif pour deux angles d’im-pact différents.

FIGURE4.4 – Comportement du joint.

[254,255], nous nous sommes orientés vers une méthode inverse par mise à jour de calculs aux éléments finis (finite element model updating method (FEMU)). Il s’agit simplement de simuler l’essai grâce à un mo-dèle aux éléments finis, qui prend en entrée les paramètres constitutifs du comportement du joint de colle. On tente ensuite d’optimiser le comportement du joint de sorte à minimiser l’écart entre les mesures et les résultats du calcul.

Une étude préliminaire a permis de montrer que le meilleur système à modéliser est l’échantillon pris entre deux portions de barres modélisées en 3D, auxquelles on ajoute des éléments unidimensionnels pour laisser les ondes mécaniques se propager librement. Pour faire cette étude trois conditions ont été testées (1) figure 4.5a l’échantillon seul (chargé à droite et à gauche par les forces mesurées aux barres), (2) fi-gure4.5bl’échantillon pris entre deux portions de barres (chargé à droite et à gauche par les forces mesurées

aux barres) et (3) figure4.5cl’ajout d’éléments unidimensionnels avec un chargement à gauche uniquement et une condition aux limites libre à droite en fin de barre. La première condition n’est pas satisfaisante dans la mesure où la dispersion du signal due aux effets de contact entre les barres et l’échantillon ne sont pas pris en compte, car on ne dispose que de la force résultante. La seconde condition n’est pas satisfaisante non plus, car il existe toujours un décalage temporel entre la propagation numérique des ondes et la me-sure, donc le signal imposé à gauche n’est pas parfaitement synchronisé (lorsqu’il a traversé l’échantillon et les portions de barres) avec le signal mesuré et imposé à droite, créant des réflexions d’ondes irréalistes. Seule la troisième condition donne des résultats presque identiques à une simulation complète de l’essai en 3D. Ce compromis entre temps de calcul et précision semble être le bon.

(a) Échantillon seul. (b) Échantillon et barres tronquées.

Sb,in

position +0

(c) Échantillon et barres prolongées par des éléments 1D. FIGURE4.5 – Différents calculs pour simuler l’essai.

Le modèle finalement utilisé pour l’identification inverse du comportement du joint est présenté fi-gure4.6. Les points rouges montrent les positions où les résultats du calcul sont extraits et comparés aux mesures et les figures à droite montrent la comparaison entre les mesures et les calculs après minimisation. L’optimisation numérique quoique relativement difficile à mettre en oeuvre et à régulariser permet d’identi-fier les paramètres du comportement du joint. Il est à noter que le modèle s’appuie sur une estimation de la loi de contact entre l’échantillon et les barres. Cette dernière est incorporée dans la boucle de minimisation pour chaque essai car les contacts dépendent des rugosités locales, qui varient d’un essai à l’autre du fait que les échantillons ne sont pas identiques et que chaque impact modifie la rugosité des barres. Le com-portement du joint sous trois chargements triaxiaux différents est ainsi caractérisé. On peut ainsi établir une surface d’élasticité et de rupture (cf. figure4.7) pour présenter le comportement tridimensionnel du joint.

Ces recherches ont permis d’établir une procédure d’essai pour caractériser les joints collés en régime dynamique et peuvent donc avoir un impact intéressant sur le processus de certification des parties collées dans l’aéronautique, pour l’allègement des appareils.

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