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4. DISCUSSION

4.1 Identification des corrélats liés à la dépression postnatale

Pour le premier objectif, les liens entre les corrélats potentiels et la dépression postnatale ont d’abord été observés de façon indépendante. Sur les 18 corrélats ciblés, cinq démontraient un lien systématique avec la dépression postnatale, soit la dépression prénatale, le stress psychologique prénatal, le stress psychologique postnatal, l’état de santé de la mère et le développement mental de l’enfant. Les corrélations allaient dans le sens attendu, ainsi des scores plus élevés pour la dépression prénatale ou pour le stress

psychologique étaient associés à des scores plus élevés de dépression postnatale. De même, des associations négatives étaient observées pour l’état de santé de la mère et pour le développement mental de l’enfant, pour lesquels un score plus faible était associé à des symptômes dépressifs plus importants. Deux autres corrélats étaient aussi significatifs pour au moins un temps de mesure, soit la qualité de la relation conjugale et le revenu familial, dont les liens allaient dans le sens attendu. Ces résultats convergent avec ceux obtenus par les études recensées, puisque ce sont toutes des variables pour lesquelles des liens significatifs avaient été trouvés précédemment. D’ailleurs, pour l’état de santé de la mère, la qualité de sa relation conjugale et son revenu familial, des liens significatifs avaient été trouvés dans toutes les études recensées les ayant considérées de façon indépendante (Akincigil et al., 2010; Beeghly et al., 2003; Dennis et al., 2012; Dudley et al., 2001; Horwitz et al., 2007; Mayberry et al., 2007; McLennan et al., 2001; McMahon et al., 2005; Wang et al., 2011). Pour la dépression prénatale, seule l’étude de Chaudron et al. (2001) s’y était intéressé de la même façon que nous, soit en mesurant les scores de dépression durant la grossesse. Ils obtenaient des résultats similaires aux nôtres. Deux autres études, celles d’Areias et al. (1996) et de Dennis et al. (2012) avaient plutôt mesuré l’historique de dépression en général, et avaient aussi obtenus des résultats significatifs. Ainsi, le fait que la mère ait eu des symptômes dépressifs par le passé, pendant la grossesse ou avant, aurait un impact significatif sur la dépression postnatale. Aucune des études recensées n’avaient considérées le stress psychologique spécifiquement. Toutefois, les études de Horwitz et al. (2007) et Leigh et Milgrom (2008) ont rapporté des liens significatifs entre la dépression postnatale et le stress parental ou les symptômes anxieux, ce qui se rapprochent des résultats que nous avons obtenus pour le stress psychologique. Aucune des études recensées ne s’était intéressée au développement mental de l’enfant. Certaines variables, comme l’âge de la mère, son niveau de scolarité et son statut conjugal avaient été identifiées comme significatives dans la majorité des études recensées, dont celles de Horwitz et al. (2007), de McLennan et al. (2001) et de Wang et al. (2011), et pour lesquelles aucun lien n’a été trouvé dans notre étude. Pour l’âge de la mère, notre échantillon était composé de mères âgées entre 15 et 25 ans, alors que dans la majorité des études recensées, les mères étaient plus âgées, ayant régulièrement une moyenne d’âge autour de 30 ans. Ces différences

pourraient expliquer les divergences entre les résultats obtenus. En ce qui concerne le statut conjugal de la mère, la difficulté à trouver des liens indépendants avec la dépression conjugale pourrait être expliqué par le fait qu’il y avait relativement peu de variance pour ces variables dans notre échantillon, puisque seulement 9% des mères étaient célibataires. Dans les études recensées, les proportions étaient plus importantes, particulièrement pour les études d’Horwitz et al. (2007) et de Beeghly et al. (2003), dont les échantillons étaient composés d’entre 20% et 41,7% de femmes célibataires. Ces études montraient pour leur part des liens significatifs à tous les temps de mesure pour cette variable. Pour le niveau de scolarité, nous avons séparé les mères en deux groupes, soit celles qui n’avaient pas complété leur secondaire, ou celles avaient complété leur secondaire ou plus. Toutefois, dans la majorité des études recensées, la scolarité est mesurée de façon plus précise, en la divisant par exemple en trois ou quatre niveaux au lieu de deux, ce qui peut expliquer la divergence dans les résultats obtenus (Horwitz et al., 2007; Mayberry et al., 2007; McLennan et al., 2001).

Par la suite, les variables ont été examinées de façon simultanée, en considérant uniquement celles ayant un lien significatif indépendant avec la dépression postnatale. Lorsque regardé ainsi, le stress psychologique postnatal était la seule variable liée significativement à la présence de symptômes dépressifs aux trois temps de mesure, et les corrélations étaient positives et fortes. Le stress psychologique tel que mesuré dans notre étude n’avait pas été considéré dans les études recensées. Toutefois, Horwitz et al. (2007) et Leigh et Milgrom (2008) avaient utilisé des mesures de stress parental ou d’anxiété et ces concepts étaient fortement liés à la dépression postnatale lors des analyses multivariées. De plus, dans notre étude, le revenu familial était significatif à 3 et 15 mois postnatal, alors que la dépression prénatale, l’état de santé de la mère et le développement mental de l’enfant étaient toutes des variables significatives trois mois après la naissance. La majorité des études recensées avaient aussi obtenus des liens significatifs entre ces variables et la dépression postnatale lors des analyses multivariées (Akincigil et al., 2010; Areias et al., 1996; Chaudron et al., 2001; Leigh et Milgrom, 2008; Horwitz et al., 2007; McLennan et al., 2001), à l’exception de développement mental de l’enfant, qui n’avait pas été considéré

par aucune des études recensées. Parmi nos corrélats, rappelons que lorsque considérés de façon indépendante, le stress psychologique prénatal avait un lien significatif avec la dépression postnatale à tous les temps de mesure, alors que la qualité de la relation conjugale était significative à 3 et 8 mois postnatal. Or, ces liens ne se sont pas maintenus lorsque ces variables ont été observées conjointement avec d’autres variables prédictives. Ces résultats suggèrent que certains des autres corrélats ont pu jouer dans ce cas un rôle de médiation. Ainsi donc, l’effet du stress psychologique prénatal et de la qualité de la relation conjugale sur la dépression postnatale pourrait être indirect et être expliqué par d’autres variables incluses dans les analyses multivariées. Dans les études recensées, seules celles d’Akincigil et al. (2010) et d’Horwitz et al. (2007) obtenaient toujours un lien significatif pour la qualité de la relation conjugale lorsque considérée simultanément avec d’autres variables. Dans l’étude d’Akincigil et al. (2010), aucune variable concernant l’état psychologique de la mère (p.ex. stress, historique de dépression, etc.) n’avait été incluse dans les analyses, ce qui pourrait expliquer la divergence entre les résultats. Cela pourrait vouloir dire que de telles variables jouent un rôle médiateur dans la relation entre la qualité de la relation conjugale et la dépression postnatale. Toutefois, pour Horwitz et al. (2007), la qualité de la relation conjugale demeurait significative même en présence de variables psychologiques. Le temps de mesure pour cette étude est toutefois autour de 24 mois postnatal, ce qui pourrait expliquer les différences dans les résultats obtenus. Les hypothèses de médiation impliquant d’autres variables psychologiques de la mère devraient donc être examinées plus spécifiquement. L’étude de Reck, Zietlow, Müller et Dubber (2015) avait d’ailleurs déterminé que le lien maternel avec l’enfant pouvait être un médiateur de la relation entre la dépression postnatal et le stress parental. Pour le stress psychologique prénatal, seule l’étude de Leigh et Milgrom avait inclus une mesure similaire au stress, soit l’anxiété prénatale, et le lien significatif obtenu lorsque cette variable est considérée conjointement avec d’autres ne tient plus en présence du stress parental postnatal. Ces résultats convergent donc avec ceux que nous avons obtenus. En résumé, le stress psychologique, la dépression prénatale, le revenu familial, l’état de santé de la mère ainsi que le développement mental de l’enfant sont des corrélats ayant un poids

relatif plus important, comme ils demeurent liés significativement à la dépression, même en présence d’autres variables.

Nous avons observé que pour la totalité des études recensées, tout comme dans la nôtre, la majorité des corrélats considérés sont de niveau ontosystémique, soit lié directement à la mère. Toutefois, la moitié des études recensées, dont celles d’Akincigil et al. (2010) et de Horwitz et al. (2007) ont inclus des variables de tous les niveaux écologiques pris en considération dans notre étude (ontosystème, microsystème et exosystème), alors que seule l’étude de Chaudron et al. (2001) n’a considéré que des variables d’un seul niveau, soit l’ontosystème. De même, autant lorsque les corrélats de la dépression étaient examinés de façon indépendante ou simultanée, la majorité de ceux liés à la dépression postnatale étaient de niveau ontosystémique (Horwitz et al., 2007; McLennan et al., 2001; Wang et al., 2011), ce qui converge avec les résultats que nous avons obtenus. Les autres niveaux écosystémiques étaient tout de même représentés dans les résultats de notre étude, comme dans celles recensées. Cela signifie que les corrélats directement liés à la mère sont particulièrement importants à considérer, bien que les corrélats liés à l’enfant ou au conjoint (microsystème), au revenu familial ou au soutien social (exosystème) ne soient pas à négliger.

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