Il s’agissait d’identifier des stratégies pour rendre l’habitat accessible en
Saône-et-Loire sans en diminuer la qualité. Pour cela, comprendre quels étaient les postes
les plus importants, et ceux sur lesquels il était le plus judicieux d’agir, était
indispensable. Cet axe s’est appuyé sur deux étapes de recherche : décomposition
des coûts de l’habitat et analyse de références, qui ont permis d’aborder la question
« comment faire un habitat accessible aux personnes à faible revenu en
Saône-et-Loire ? » avec deux angles différents et complémentaires.
Dans un premier temps, un travail de décomposition approfondie des coûts de
l’habitat a été réalisé. Nous avons tenté d’aller suffisamment dans le détail pour avoir
une compréhension plus fine de ce qui influence chacune des cinq composantes de ce
coût : foncier, gestion et montage du projet, conception, réalisation et coûts différés.
Nous nous sommes basés sur les enquêtes (entretiens et recherche documentaire)
pour alimenter cette décomposition et acquérir une vision plus claire de l’ensemble
des éléments qui entrent en compte. Cette analyse a permis une compréhension plus
détaillée des impacts sur le coût global des choix faits lors des différentes étapes du
processus de la production de l’habitat. Le choix des cinq composantes principales
est issu du recoupement de plusieurs propositions de décompositions analysées.
Certaines d’entre elles ne prennent en compte que les « hard costs », c’est-à-dire
principalement les coûts de foncier et de construction. D’autres incluent également
les « soft costs », honoraires, assurances, coûts des dysfonctionnements administratifs
ou humains, développement durable, innovation, etc. Le « coût global » est une autre
manière d’envisager le coût de l’habitat qui ajoute aux coûts d’investissement (coûts
d’études, d’accompagnement, de foncier, de travaux, d’équipement, financiers) les
coûts différés (coûts de maintenance, d’exploitation et de modifications). La notion
l’on parle de coûts de l’habitat. Le couple loyer + charges est indissociable pour
garantir l’accès et le maintien de populations à revenu faible ou moyen au logement.
Nous n’avons pas abordé le « coût global élargi », qui aborde des domaines très
larges qui sortent du cadre des coûts en tant que tels, bien que le fait de privilégier
un développement local pour la production de l’habitat aille dans ce sens. Les cinq
catégories abordées (coûts de foncier, coûts de gestion et montage du projet, coûts
de conception, coûts de réalisation et coûts différés) ressortent de l’analyse des
différentes étapes d’un projet d’habitat (antérieures, simultanées et postérieures au
moment de la construction), et des différents domaines et acteurs qui interviennent
dans sa production (promotion, conception, construction, entretien, etc.). Nous avons
estimé que ces cinq composantes recouvraient de manière satisfaisante les éléments
qui construisent le coût global de l’habitat.
L’analyse d’une sélection de projets d’habitat économique réalisés en
Saône-et-Loire, en France ou dans d’autres pays, a complété ce travail (voir « récapitulatif des
projets d’habitat économique analysés et de leur coût » en annexe). Le coût constitue
le critère de choix principal pour les références analysées. La plupart des projets
ont un prix de revient plus faible que la moyenne des logements produits en France.
Certains d’entre eux ont un prix légèrement supérieur, mais restent abordables
et offrent des qualités architecturales et de vie supérieures, une consommation
énergétique réduite, ou encore un système constructif qui participe à la dynamisation
de l’économie locale. Tous les projets sélectionnés représentent un panel diversifié
de stratégies visant la production de logements économiques. Quel que soit leur
prix, ils ont des qualités d’un point de vue de l’architecture et de la qualité de vie. Ils
proposent des surfaces vitrées importantes, des espaces vastes et lumineux participant
pleinement à l’impression d’espace et de confort, des volumes ou des configurations
atypiques, des espaces extérieurs privatifs ou partagés, des besoins en chauffage
réduits. Les références choisies sont récentes (de 1993 à 2011). La sélection des
projets est diversifiée. Il s’agit principalement d’habitations principales, mais on
trouve également des maisons de vacances. Les dispositifs proposés par ces maisons
ne sont pas tous envisageables pour des résidences principales, mais les stratégies
employées pour faire économique sont intéressantes et pourraient être adaptées pour
un habitat plus confortable. Quelques uns, en plus de la destination principale qui est
l’habitation, proposent un espace dédié à des activités professionnelles. Beaucoup
de ces références se situent en Saône-et-Loire ou très proche, et sont conçues par
des architectes locaux ou réalisées par des entreprises locales. La plupart des autres
projets sont localisés dans d’autres régions de France. Quatre références sont des
opérations réalisées à l’étranger. Les projets s’implantent en ville, en périphérie
urbaine, ou encore, et principalement, dans des communes rurales, en raison de la
dominante rurale du terrain d’étude. Leurs formes urbaines sont diverses : maisons
individuelles uniques ou groupées, logements collectifs sous forme d’immeubles, de
logements intermédiaires ou de maisons de ville. Il s’agit de constructions neuves ou
de réhabilitations, d’opérations privées ou publiques, de logements en location, en
accession à la propriété, ou d’habitat coopératif.
Nous pensions, au départ, nous baser sur des comparaisons de coûts d’opérations
de logements. Nous nous sommes rapidement rendus compte qu’il était difficile
de comparer des programmes de logements uniques. Ces projets ont été construits
dans des lieux et dans des contextes urbains différents, à des moments différents.
Les conditions de marché ne sont donc pas les mêmes, le prix du terrain et de son
aménagement change beaucoup selon les opérations et les situations locales. Les
contraintes économiques de l’aménageur, du promoteur ou du maître d’ouvrage
public ou privé varient, ainsi que le programme (maison individuelle ou logements
collectifs, neuf ou réhabilitation), le système constructif, les matériaux, les
entreprises, les objectifs thermiques, etc. De ce fait, les étapes d’une opération, du
montage du projet à son fonctionnement, sont difficilement comparables. Le coût est
bien sûr une donnée indispensable pour vérifier la pertinence d’une stratégie pour
faire économique et les comparer les unes aux autres. Mais même en comparant
deux opérations de même taille construites au cours de la même période, l’analyse
budgétaire poste par poste ne suffit pas à comprendre tous les mécanismes qui
fabriquent le prix du logement. C’est pourquoi nous avons choisi de nous orienter
vers une approche qualitative plutôt que vers une analyse comparative quantitative.
L’analyse des références avec une grille qui aborde les questions de l’organisation
spatiale, des matériaux et systèmes constructifs, de la stratégie énergétique, de la
stratégie urbaine, et du processus de conception et de réalisation, a permis de mieux
comprendre les conditions précises et particulières de chaque projet et de faire
émerger les stratégies utilisées pour le montage et la conception des projets analysés.
C’est en analysant et comparant ces stratégies qu’il a été possible de proposer des
pistes qui pourraient être adaptées à un autre contexte et réutilisées dans le projet
architectural et le montage d’opération, en Saône-et-Loire en l’occurrence. Plutôt
que de proposer un modèle économique sur la maîtrise des coûts dans l’habitat,
nous avons préféré repérer les stratégies récurrentes utilisées par des architectes pour
produire un habitat de qualité et abordable, et réaliser une typologie de ces stratégies
Dans le document
Pour un habitat écoresponsable de qualité et financièrement accessible en Saône-et-Loire
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