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Hypothèses et pistes de recherche

Chapitre 1 – Convergence, vieillissement et maillages territoriaux : perspectives en

III) Hypothèses et pistes de recherche

Les hypothèses posées ici concernent premièrement l’aspect conceptuel de convergence spatiale, ensuite l’échelle d’étude à employer et pour terminer les projections.

Notre objectif est donc d’analyser les tendances et les convergences du vieillissement de population en Méditerranée dans le but de produire des interprétations de futurs possibles. Pour cela, est utilisé le concept de convergence, et plus précisément la notion des clubs de convergence. Par club, nous entendons un groupe de territoires dont les caractéristiques et les conditions initiales sont semblables. Par conséquence, les différents éléments de ce club convergeront vers une même situation à long terme. Evoquée précédemment, toute la subtilité réside dans le choix des caractéristiques définissant les divers clubs. Notre hypothèse principale pose la constitution de nos clubs sur des facteurs à la fois spatiaux et démographiques. Cette démarche n’est pas inconnue en économie [Dall’erba S., Le Gallo J., 2005] et part du principe d’une certaine dépendance des territoires entre eux. Deux espaces proches l’un de l’autre auront plus de chance de converger vers le même futur que deux espaces éloignés. Concrètement, l’espace méditerranéen sera partagé en plusieurs régions (dans le sens non-administratif) basées sur des critères spatiaux et démographiques. Ces espaces constitueront nos clubs de convergence, chacun tendant vers un futur commun en matière de vieillissement : il s’agit de la convergence spatiale. Ainsi, la dualité de rive Nord et rive Sud pourra être dépassée avec des zonages internes à ces deux ensembles génériques. Mais à quelle échelle se placer pour définir ces régions méditerranéennes ?

« L’importance relative des phénomènes migratoires restera vraisemblablement secondaire par rapport à la fécondité et à la mortalité » [Chris Wilson, 2001 : p.22] à une échelle nationale ou supranationale. Pour de telles échelles, il est absurde d’expliquer largement le vieillissement par les migrations, au vu du contrôle exercé sur le phénomène par les tendances lourdes de la mortalité et de la fécondité. A une échelle locale par contre, les migrations représentent le premier facteur explicatif de vieillissement. Une région rurale en proie à un exode vers la ville n’aurait pas un degré de vieillissement important si la majorité des jeunes ne migrait pas. Nous sommes là en présence de « graves questions d’échelles [provoquant] d’importants problèmes d’interprétation » [Caselli G., Vallin J., 2002 : p.375]. Pour un même phénomène étudié, selon l’échelle choisie, les facteurs à étudier seront différents. L’échelle nationale, de surcroît la supranationale, n’apparaissent pas appropriées pour notre recherche à cause de l’hétérogénéité spatiale. Effectivement, au sein d’un même pays, les situations régionales demeurent profondément diverses [Caselli G., Vallin J., 2002]. L’hypothèse de travail sous-jacente à cette démarche pose les échelles infranationales comme la meilleure façon de capter la réalité.

Parallèlement, il faut savoir quel(s) indicateur(s) observer dans ces ordres d’échelles. Nombre d’études démographiques portant sur les pays de la Méditerranée se contentent d’employer des indicateurs globaux dans le but d’analyses comparées, sans interroger leur pertinence pour

La Méditerranée : quels maillages territoriaux ?

49 la thématique en question. Une réflexion sur la construction des indicateurs à utiliser représente un intérêt d’autant plus important dans une démarche prospective.

La convergence spatiale implique nécessairement une vision à long terme de l’avenir. Se servir de projections apparaît comme une conséquence logique de ce raisonnement. Cependant, toute projection est synonyme d’hypothèses, toutes aussi différentes selon l’échelle considérée. Au niveau local par exemple, on peut tester l’influence des migrations sur le vieillissement des différents clubs de convergence afin d’identifier les territoires les plus sensibles. On pourrait également étudier l’évolution de l’hétérogénéité au sein d’un pays ou d’une région globale. Le vieillissement tendrait-il à s’homogénéiser ou à accentuer l’hétérogénéité existante ? Les différences de vieillissement entre l’urbain et le rural s’amenuisent-t-elles ? Ou au contraire s’amplifient-t-elles ? Comment la répartition des personnes âgées évolue-t-elle ? L’augmentation de cette catégorie d’âge sera-t-elle sensible dans le temps ? Nombreux sont les scénarios imaginables, d’où la notion de futurs possibles. Les régions méditerranéennes définies selon des critères géo-démographiques, l’application de ces scénarios permet d’en appréhender les avenirs potentiels. De la même façon, ce cheminement autorise la détection de phénomène insignifiant à l’heure actuelle, mais porteur de problèmes plus sérieux si l’on se place à un horizon temporel plus lointain. L’anticipation de ces derniers aidera les décideurs responsables de la gestion de ces espaces.

Notre approche privilégie l’échelle infranationale à cause de l’immense hétérogénéité au sein d’un même pays. L’existence de nombreuses échelles infranationales met le chercheur dans une position ambiguë. D’un côté, il dispose d’un large éventail de choix. Dans le cas de la France par exemple, la base de ses analyses peut être les maillages administratifs tels les régions, les départements, les communes ou les cantons. Mais nous pouvons très bien imaginer l’utilisation de maillages moins « conventionnels » tels que les districts scolaires ou sanitaires. D’un autre côté, cela pose un problème quant à la comparaison d’un pays à l’autre. Les régions françaises sont-elles comparables aux Länder allemands ou aux Wilayas algériennes ? Si oui, selon quel(s) critère(s) ? Si non, quel échelon administratif choisir pour chaque pays pour établir des comparaisons sur des entités territoriales semblables ? Ce souci de comparaison internationale demeure l’un des points à éclaircir.

Ce projet de recherche traite du vieillissement démographique méditerranéen, thème à enjeux. A l’aide du concept de convergence spatiale et des hypothèses posées, notre but est d’analyser les tendances et les convergences du phénomène en Méditerranée. La grande superficie de cette aire d’étude engendre forcément un questionnement de l’échelle infranationale à adopter. La multitude et la forte hétérogénéité des maillages territoriaux méditerranéens compliquent la comparaison internationale. Les études sur le MAUP et les maillages territoriaux mettent en évidence leur influence sur les résultats des analyses spatiales, statistiques ou encore cartographiques. Il apparaît donc nécessaire, voire obligatoire, de questionner les maillages méditerranéens afin de limiter les effets de l’agrégation spatiale et de promouvoir la comparaison internationale de situations infranationales. Dès lors, les maillages méditerranéens doivent être interrogés et harmonisés : préoccupation de notre deuxième chapitre.

Yoann Doignon, 2011

La Méditerranée : quels maillages territoriaux ?

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Chapitre 2 – Harmonisation des maillages