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Chapitre 1 : Contexte scientifique et objectifs

1.4. Hydrologie des zones humides alluviales

Les zones humides alluviales sont principalement influencées par l’hydrologie du bassin versant (Keddy, 2010). Le débit et donc la hauteur d’eau du cours d’eau est le principal facteur permettant la connectivité entre le cours d’eau et la plaine alluviale (Junk et al., 1989 ; Tockner et al., 2000). Cette connectivité entraine un processus de transfert d’eau, de nutriments et d’organismes entre les divers compartiments de l’écotone et des écosystèmes environnants (Tockner and Stanford, 2002). Les plaines alluviales montrent un échange fort de manière horizontale entre les compartiments mais également des échanges verticaux lors des crues ou dans la zone hyporhéique (Figure 9 ; Peyrard et al., 2008 ; Vidon et al., 2010). Les zones humides alluviales sont des zones d’interaction entre plusieurs milieux. Elles constituent une zone de déposition de sédiments lors des événements de crues et des échanges sont effectués entre eaux de surface et eaux souterraines (Figure 9). Ce sont des zones extrêmement productives en termes de biomasse et sont très diversifiées à l’échelle mondiale (Tockner and Stanford, 2002). Cette productivité accrue est due à leur proximité avec le cours d’eau qui leur apporte continuellement des nutriments et leur situation

topographique qui leur fait recevoir d’autres nutriments depuis les zones agricoles par ruissellement (Mitsch and Gosselink, 2000).

Figure 9 : Représentation des principaux écoulements dans les zones humides alluviales (Vidon et al., 2010).

1.4.1. Interactions entre cours d’eau et aquifère

Les caractéristiques pédologiques comme la porosité ou la structure du sol ainsi que les conditions hydrologiques et climatiques régissent les interactions entre le cours d’eau et les eaux souterraines (Winter, 1999). La géomorphologie (caractéristiques de pente, de largeur et de profondeur des cours d’eau et des plaines alluviales) permet de classer les zones d’échange nappe-cours d’eau à large échelle en plusieurs catégories (Larkin and Sharp, 1992) :

- les zones d’échange dominées par les écoulements de subsurface, c’est-à-dire que les écoulements souterrains sont perpendiculaires au cours d’eau et donc interagissent peu avec le cours d’eau,

- les zones d’échange dominées par les écoulements souterrains profonds, où ces écoulements sont cette fois-ci parallèles au cours d’eau,

- les zones d’échange mixtes où les deux types d’écoulement interviennent en simultané.

Les échanges entre les eaux de surface et les eaux souterraines se font généralement par infiltration des eaux de surface vers la nappe phréatique ou par exfiltration des eaux de nappe vers les eaux de surface. Au niveau d’une zone humide alluviale, ces échanges sont contrôlés par certains facteurs, notamment les différences de hauteur de nappe et de conductivité hydraulique entre le cours d’eau et les sols des plaines alluviales (Woessner, 2000) mais aussi la géomorphologie du cours d’eau (Steiger and Gurnell, 2003). Ces facteurs entrainent trois cas de figure d’échange nappe-cours d’eau dépendant de la différence de hauteur d’eau entre le cours d’eau et la nappe. Lorsque la hauteur de la nappe est supérieure à la hauteur du cours d’eau sur une section donnée, l’eau de la nappe s’écoule vers le cours d’eau. Cette condition se déroule généralement lors des périodes d’étiage. A l’inverse, lorsque la hauteur d’eau du cours d’eau est supérieure à celle de la nappe sur une section donnée, l’eau se déplace vers la nappe par infiltration. On parle de recharge de la nappe. Enfin, lorsque les crues créent des débordements du cours d’eau dans les zones humides alluviales, l’eau peut s’infiltrer sur toute la zone de débordement et la recharge de la nappe équivaut au volume d’eau infiltré alors que la décrue entraine une vidange de la nappe. Ce volume infiltré dépend de la crue, de sa durée et de son intensité ainsi que des caractéristiques pédologiques des sols affectés par la crue, à savoir la conductivité hydraulique et la capacité de stockage restante de l’aquifère (Sophocleous, 2002). Ces conditions de stockage et de drainage de la nappe s’alternent au cours du cycle hydrologique du cours d’eau ce qui profère un effet tampon à l’aquifère sur la dynamique du régime hydrologique (Brunke and Gonser, 1997). Ce volume échangé peut être quantifié comme une différence de charge hydraulique entre la nappe et le cours d’eau (Sophocleous, 2002). Cette quantification peut se faire en appliquant la loi de Darcy qui exprime le débit d’un volume d’eau passant à travers un milieu poreux (ici, la surface d’interface nappe-cours d’eau).

1.4.2. Interface d’échange : la zone hyporhéique

Tous les échanges évoqués précédemment soulèvent la présence d’une zone de mélange entre eaux de surface et eaux de nappe au niveau du cours d’eau. Cette zone est appelée zone hyporhéique (Figure 10 ; Orghidan, 1959 ; Winter, 1999). Krause et al. (2011) la définit comme « une zone de transition, spatialement et temporellement dynamique, située entre les masses d’eau de surface et souterraines et qui possède des caractéristiques physiques (température) et biogéochimique (forts gradients chimiques) spécifiques du fait du mélange eaux de surface - eaux souterraines et qui fournit un habitat dynamique et un potentiel refuge pour les espèces ». Il est également évoqué que cette zone se définit comme une partie de la zone saturée possédant au moins 10% d’eau de surface (Triska et al., 1993 ; Lautz and Siegel, 2006).

Figure 10 : Représentation de la zone hyporhéique selon le modèle conceptuel de Triska et al. (1989). (Tirée de Vervier et al., 1992). La zone hyporhéique agit comme interface et zone de mélange entre eaux de surface et eaux souterraines.

Les facteurs influençant la dynamique des échanges dans la zone hyporhéique sont divers et dépendent de l’échelle prise en compte (Krause et al., 2011 ; Peyrard et al., 2011). A l’échelle du cours d’eau, les échanges dans la zone hyporhéique sont dépendants de la géomorphologie du lit du cours d’eau (Cardenas and Wilson, 2007) et de la perméabilité des sédiments (Packman and Salehin, 2003). A l’échelle du bassin versant, ces flux hyporhéiques sont liés à la largeur du cours d’eau, la profondeur des sols et les caractéristiques pédologiques de l’aquifère (Brunke and Gonser, 1997 ; Malcolm et al., 2005).

Cette zone de mélange a un impact certain sur la dynamique des cycles biogéochimiques que ce soit pour les nutriments ou les contaminants (Figure 11 ; Valett et al., 1996 ; Pinay et al., 1998 ; Vervier et al., 2009 ; Lewandowski and Nützmann, 2010 ; Peyrard et al., 2011 ; Marmonier et al., 2012). Elle présente de fait une forte activité biogéochimique (Boulton et al., 1998 ; Bencala, 2000 ; Sophocleous, 2002 ; Krause et al., 2011 ; Peyrard et al., 2011).

Figure 11 : Fonctions hydrobiogéochimiques de la zone hyporhéique dans son rôle de mélange des eaux de surface et des eaux souterraines. Adapté de Krause et al. (2011).

1.4.3. Echanges hydrologiques durant les crues

Les crues contribuent au lien qui existe entre le cours d’eau et ses plaines alluviales. Cette connectivité a été intégrée dans le Flood Pulse Concept (FPC) de Junk et al. (1989). Le FPC associe le cours d’eau et ses plaines alluviales dans une dynamique d’échanges et d’interactions sur de nombreux processus, qu’ils soient hydrologiques ou écologiques. Le

FPC intègre les crues comme un facteur déterminant dans le degré de connectivité hydrologique, biogéochimique et écologique tout au long de la plaine alluviale (Tockner et al., 2000). Ce concept a initialement été créé pour comprendre de manière détaillée le fonctionnement des plaines alluviales tropicales, qui ont un rôle majeur dans le régime hydrologique des bassins tropicaux et a été adapté pour les zones tempérées. Les crues de par leur alternance, façonnent les zones humides alluviales et ont un rôle sur la dynamique des processus biogéochimiques dans ces milieux.

1.5.

Biogéochimie des bassins versants et des zones humides

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