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2. Etude bibliographique : utilisation du rhodium(III) pour l’activation

2.5. Formation de liaison CC par activation CH catalysée par le rhodium(III)

2.5.3. Hydroarylation d’alcynes

Le premier exemple d’hydroarylation a été décrit par Fagnou et al. en 2010. Dans leur publication, les auteurs rapportent la fonctionnalisation d’indole LI.70 en position C2 catalysée par un complexe cationique de rhodium(III) (LI.19) en présence d’un excès d’acide pivalique qui favorise ici l’étape de protonolyse. Mis à part le fait d’être essentiel à la fonctionnalisation régiosélective de LI.70, le groupe directeur carboxamide présente l’avantage d’être facilement

coupé en milieu alcalin pour générer l’amine correspondante. Un grand nombre de groupes fonctionnels tels que des silanes (LI.72a), des cyclopropyles (LI.72b), des esters (LI.72c) ou des éthers silylés (LI.72d) sont tolérés dans les conditions réactionnelles utilisées ([RhCp*(CH3CN)3][SbF6]2, PivOH, iPrOAc, 90 °C, 15 h) et les rendements obtenus s’étendent de 67% à 99%. Des alcynes hétérocycliques sont également tolérés comme le montre l’obtention de LI.72e à partir de LI.71e avec un excellent rendement de 99% (Schéma 37).51

Schéma 37

L’obtention majoritaire du produit d’addition syn permet d’écarter la possibilité d’une activation électrophile de l’alcyne par le complexe cationique LI.19 qui, si tel été le cas, donnerait majoritairement le composé trans.52 Cependant les auteurs soulignent que cette addition syn pourrait provenir d’une isomérisation du produit d’addition trans, mais cette hypothèse a été rapidement réfutée, puisqu’une expérience contrôle menée à partir d’un mélange (Z)/(E) (2.2:1) a montré qu’aucune isomérisation n’avait lieu dans les conditions réactionnelles utilisées. Ces observations ont amené les auteurs à postuler un mécanisme dans lequel l’intermédiaire LI.73 serait obtenu après métallation dirigée par le groupe carboxamide. La coordination de l’alcyne LI.71 par le rhodium (LI.74) puis l’insertion migratoire du rhodium

51 Schipper, D. J.; Hutchinson, M.; Fagnou, K. J. Am. Chem. Soc. 2010, 132 (20), 6910–6911.

dans la triple liaison conduirait à l’intermédiaire LI.75. Enfin, la protonolyse mènerait au produit souhaité LI.72 et le catalyseur serait régénéré pour boucler le cycle catalytique. Notons que ce mécanisme restera valable pour les réactions présentées par la suite (Schéma 38).51

Schéma 38

En 2014 et 2016, les équipes de Shi et de Loh ont décrit l’hydroarylation d’alcynes avec, comme point commun, l’utilisation d’un amide primaire comme groupe directeur. Dans un premier temps, Shi et al. ont utilisé cette stratégie pour fonctionnaliser la position C3 de la pyridine

LI.76. En dépit d’une sensibilité à l’encombrement stérique en position C4 comme dans le

composé LI.78f, la méthode développée présente une très haute tolérance fonctionnelle notamment vis-à-vis des halogènes ou des esters (LI.78a-g). La gamme d’alcynes utilisables n’est pas restreinte à des alcynes substitués par des groupes aromatiques puisque la réaction est particulièrement efficace avec des alcynes substitués par des groupes aliphatiques comme ça a été le cas avec le 4-octyne LI.77g qui conduit au produit LI.78g avec un rendement de 94%. On notera que le rôle de Cu(OAc)2 n’est pas celui d’oxydant comme nous avons l’habitude de le voir mais celui d’acide de Lewis permettant ici de complexer l’azote de la pyridine, évitant ainsi sa coordination au rhodium qui entraînerait une inhibition de la réaction de couplage (Schéma 39).53

Schéma 39

Par la suite, l’équipe de Loh a réalisé l’ortho-fonctionnalisation de benzamides (LI.79) avec des limites similaires à celles évoquées précédemment (Schéma 40).54

Schéma 40

L’emploi de tétrazole comme groupe directeur a également été étudié, notamment par le groupe de Yu qui, en 2015, a décrit la mono- et la difonctionnalisation de dérivés de 2-méthyl-5-phényl-2H-tétrazoles LI.82 par hydroarylation d’alcynes LI.83 catalysée par le rhodium(III). Ces auteurs ont montré que dans le cas d’alcynes possédant des groupes aryles

para-substitués ou non substitués (LI.82a-e), la réaction était difficilement contrôlable et que seuls les produits difonctionnalisés LI.84a-e étaient obtenus et cela indépendamment de la nature des substituants en position para. Cette réactivité peut en partie être expliquée par un excès d’alcynes LI.83 (3 équiv) dans le milieu réactionnel. En revanche, la substitution du noyau aromatique en position méta (LI.82f) permet l’obtention du produit de monofonctionnalisation sur le carbone du noyau aromatique le moins encombré, en position ortho (LI.84f) et ce, avec un rendement de 94%. Bien entendu, la substitution en ortho (LI.82g) conduit au produit monofonctionnalisé en position ortho (LI.84g) avec un rendement de 92%. Cela étant, la réaction est relativement efficace et de très bons rendements allant de 57% à 99% en produits de couplage sont obtenus (Schéma 41).55

Schéma 41

Signalons que le rhodium(I) est également capable d’activer des liaisons CH. Il semble donc inéluctable de discuter les travaux de Deng et al. qui, dans la même veine, ont rapporté l’hydroarylation d’alcynes en employant un benzotriazole comme groupe directeur (LI.85) et un complexe de rhodium(I) LI.87 comme catalyseur. Ainsi, en présence de 2.5 mol % de catalyseur de Wilkinson LI.87 et de 5 mol % d’AgOTf les produits d’ortho-fonctionnalisation LI.88 sont obtenus de manière relativement efficaces (3998%). L’originalité de cette méthode réside dans la gamme d’alcynes pouvant être impliquée dans

cette réaction puisque des alcynes non symétriques et aliphatiques LI.88g-h peuvent être utilisés (Schéma 42).56

Schéma 42

Au vu de ces résultats, nous pouvons nous demander si l’obtention exclusive du produit de monofonctionnalisation LI.88 provient de l’utilisation du benzotriazole comme groupe directeur, bien plus encombrant que celui utilisé précédemment par l’équipe de Yu (Schéma 41), qui favoriserait la monofonctionnalisation, ou si cela provient de l’utilisation du catalyseur de rhodium(I), en l’occurrence, le catalyseur de Wilkinson. À ces questions, les auteurs n’apportent pas de réponses. Cependant, ces derniers proposent un mécanisme comparable à celui décrit auparavant dans le cas du rhodium(III) (Schéma 38). Ainsi, après génération d’une espèce cationique de rhodium(I) LI.89 par action d’AgOTf, l’intermédiaire

LI.90 serait obtenu après activation de la liaison CH du noyau aromatique en position ortho.

Une coordination de l’alcyne par le rhodium (LI.91) suivie d’une insertion syn de ce dernier dans la triple liaison conduirait à l’intermédiaire LI.92. Après élimination réductrice, le produit désiré LI.88a serait obtenu et le rhodium(I) serait régénéré (Schéma 43).

Schéma 43

Dernièrement, Nicholls et al. ont rapporté l’ortho-fonctionnalisation de N-pivaloyl anilines

LI.93 par hydroarylation d’alcynes (LI.94). En dépit du large champ d’application de cette

méthode, plusieurs limites sont à noter. Tout d’abord, la substitution du noyau aromatique en position ortho diminue de manière drastique l’efficacité de la réaction mais surtout, la sélectivité (E)/(Z) n’est pas contrôlée (LI.95a-b). Nous pouvons imaginer que l’encombrement stérique et la forte répulsion entre le groupe tert-butyle et le groupe R1 en ortho ne favorise pas la formation du rhodacycle intermédiaire, entraînant une perte de réactivité. Cette hypothèse est confirmée par les résultats obtenus lors de l’utilisation de N-pivaloyl anilines substituées en position méta sur le cycle aromatique (LI.93c-e). Les produits correspondants (LI.95c-e) sont alors obtenus avec des rendements allant de 50% à 90% et une bien meilleure sélectivité (E)/(Z) de 99:1. D’autre part, les alcynes disubstitués portant des substituants alkyles conduisent dans

le meilleur des cas à de faibles rendements (LI.88o) et même à une absence de réactivité comme dans le cas du substrat LI.88q (Schéma 44).57,58,59

Schéma 44

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