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1.5 Facteurs de dysfonction podocytaire

1.5.5 Hormones et facteurs de croissance

Plusieurs hormones et facteurs de croissance sont essentiels au bon fonctionnement et à la survie des podocytes. Il est connu que certains de ces facteurs ont une signalisation altérée par une hyperglycémie chronique, augmentant de ce fait la dysfonction et l’apoptose des cellules. C’est le cas notamment pour des facteurs comme l’angiotensine II, le VEGF, l’insuline et l’IGF.

1.5.5.1 Angiotensine II

L’angiotensine II (Ang II) est une composante majeure du système rénine-angiotensine et possède plusieurs rôles physiologiques. Ce peptide participe à la régulation de la pression artérielle et stimule la sécrétion d’aldostérone, provoque une vasoconstriction des artérioles dans le rein, augmente la réabsorption du sodium dans le tubule proximal, contribue à la relâche de l’hormone antidiurétique (ADH) et stimule la sensation de soif (Stevenson et Datta, 1998). L’angiotensine II est générée lorsque l’angiotensine I est convertie par

l’enzyme ACE. En condition d’hypertension au niveau rénal, Ang II est significativement augmenté et contribue à l’apoptose des cellules mésangiales et des podocytes (Berman et al., 2013). Il a été démontré que la surexpression du récepteur de type 1 de l’angiotensine II (AT1R) dans les podocytes de rats provoque des dommages structuraux aux podocytes et dérègle l’attachement des pédicelles (Hoffmann et al., 2004). L’activation de AT1R via l’angiotensine II provoque un stress au niveau du réticulum endoplasmique en augmentant l’expression des protéines GRP78, une protéine chaperonne, et de l’Eukaryotic initiation

factor 2 (elF2α) ainsi que la phosphorylation de PKCδ. Il en suit une augmentation de la

phosphorylation de la MAPK p38, une augmentation de l’expression de Bax et de l’activité du sodium-hydrogen antiporter 1 (NHE1), déclenchant ainsi l’apoptose des podocytes (Cardoso et al., 2018). L’Ang II affecte également les podocytes en empêchant la phosphorylation de la néphrine par la kinase Fyn, ce qui crée une désorganisation du cytosquelette d’actine (Yu et al., 2013). En clinique, des bloqueurs du système rénine- angiotensine, tels que des antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II et des inhibiteurs d’ACE, sont utilisés pour diminuer les dommages rénaux des patients (Roscioni et al., 2014).

1.5.5.2 VEGF

Il s’agit d’un facteur de croissance ayant plusieurs rôles au sein du rein, comme la survie cellulaire, la migration et la prolifération des cellules endothéliales. La cascade de signalisation se produit après la liaison du VEGF avec le récepteur VEGFR1 ou VEGFR2. Dans les glomérules, les podocytes sont responsables de la sécrétion du VEGF-A, une isoforme parmi les cinq connues, qui va permettre le maintien des capillaires dans le glomérule (Veron et al., 2011). Dans un modèle murin où le VEGF est inhibé ou délété, une augmentation de l’apoptose des podocytes a été démontrée, en plus d’un effacement des fentes de filtration, d’une perte de cellules mésangiales et des fenestrations des cellules endothéliales et d’une albuminurie élevée. Ces souris présentent de nombreuses caractéristiques de la néphropathie diabétique, suggérant un rôle essentiel du VEGF dans la survie podocytaire et l’intégrité glomérulaire (Eremina et al., 2008). Dans les premiers stades de la néphropathie diabétique, des niveaux élevés de VEGF sont observés, mais diminuent rapidement dans les stades avancés de la maladie. Cette perte de l’expression du VEGF corrèle avec une apoptose accrue des podocytes (Tung et al., 2018).

1.5.5.3 L’insuline

L’insuline est une protéine globulaire découlant de la proinsuline, elle-même formée d’une chaine A, d’une chaine B et d’un peptide C. Le clivage de cette protéine entraine la formation de l’insuline et la libération du peptide C, l’insuline ayant un rôle important dans l’augmentation de l’endothelial nitric oxyde synthase (eNOS) dans les cellules endothéliales (Luppi et al., 2013). L’insuline est sécrétée par les cellules bêta du pancréas et nécessaire pour l’entrée du glucose dans plusieurs types de cellules, car elle permet la translocation de transporteurs de glucose à la membrane plasmique. L’insuline possède également un rôle dans la stimulation de la synthèse d’acide gras et de triglycérides et dans l’inhibition de la lipolyse dans le tissu adipeux pour réduire les niveaux plasmatiques d’acide gras (Dimitriadis

et al., 2011).

Les voies de signalisation de l’insuline sont essentielles à la survie podocytaire et au bon fonctionnement du glomérule. Un groupe de recherche a démontré l’importance de ces voies en utilisant des souris ayant une délétion du récepteur de l’insuline spécifiquement dans les podocytes. Ces souris non diabétiques développent une pathologie qui est similaire à la néphropathie diabétique, comme une albuminurie, une augmentation de la matrice extracellulaire, un épaississement de la membrane basale, une perte de morphologie ainsi que l’apoptose des podocytes. Au niveau des pédicelles, l’hypertrophie des podocytes provoque un changement au niveau de la structure des pédicelles et un effacement des fentes de filtration (Welsh et al., 2010). La signalisation de l’insuline est étudiée depuis longtemps dans notre laboratoire. Une étude réalisée par notre équipe a démontré que l’hyperglycémie cause une inhibition des voies de signalisation de l’insuline dans les podocytes associée avec l’augmentation de la protéine tyrosine phosphatase SH2 domain containing protein tyrosine

phosphatase 1 (SHP-1) (Drapeau et al., 2013). Une autre étude faite par notre laboratoire a

observé que le palmitate, un acide gras, semble inhiber la signalisation de l’insuline dans les podocytes en favorisant la phosphorylation de l’insulin receptor substrate 1 (IRS-1) en sérine 307, ce qui inhibe la cascade de signalisation et favorise la dysfonction podocytaire (Denhez

1.5.5.4 L’insulin-like growth factor

L’IGF est un facteur de croissance qui possède une structure similaire à l’insuline et qui agit au niveau de plusieurs organes et participe à l’entrée de glucose dans les cellules au niveau périphérique, à la lipogenèse ainsi qu’à la synthèse de glycogène (Wittenbecher et al., 2019). On retrouve deux isoformes d’IGF, soit IGF-1 et IGF-2. L’isoforme IGF-1, le plus étudié, agit au niveau des podocytes en augmentant la migration, la différentiation et la survie cellulaire. L’IGF-2, quant à lui, semble avoir un rôle moins bien compris au sein du glomérule. Au niveau du rein, les podocytes sont les cellules responsables de la sécrétion de la majorité des IGF, avec une production d’IGF-2 environ dix fois plus grande que d’IGF-1 (Hale et al., 2013).

L’importance des IGFs dans la croissance et l’intégrité rénale a déjà été prouvée à maintes reprises. Chez des souris avec une délétion du gène pour IGF-1, il a été démontré que celles- ci naissent avec un poids plus faible que la normale alors que leurs reins sont significativement plus petits et possèdent un nombre moins élevé de néphrons. Une surexpression d’IGF-2 n’est pas suffisante pour compenser la perte de production d’IGF-1 et son impact sur la croissance de ces souris, démontrant le rôle important de l’IGF-1 dans le développement rénal. Au contraire, des souris qui vont surexprimer IGF-1 naissent avec un poids plus élevé et possèdent des reins et des glomérules plus gros que des souris contrôles, sans montrer de signes pathologiques (Bach et Hale, 2015). Chez les souris possédant une diminution de la production d’IGF-2, une protéinurie peut être observée après 18 mois d’âge, comparativement aux souris contrôles. Ces souris possèdent également des dommages aux glomérules, notamment une augmentation de la matrice extracellulaire, une expansion du mésangium ainsi qu’une dysfonction podocytaire. Ces résultats suggèrent qu’un dérèglement dans la signalisation de l’IGF peut avoir un impact non seulement sur les podocytes, mais également sur l’ensemble du glomérule et l’intégrité du rein.

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