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Paul Labarthe, Nos

médecins contemporains. Paris : Lebigre-Duguesne libraires éditeurs, 1868. 1. Dolbeau 2. Jaccoud 3. Maisonneuve 4. Le Fort 5. Bouchut 6. Richet 7. Pajot 8. Broca 9. Piorry 10. Ricord 11. Gosselin 12. Depaul 13. Gavarret 14. Littré 15. Bouchardat 16. Wurtz 17. Tardieu 18. Jobert de Lam-balle 19. Robin 20. Bouillaud 21. Velpeau 22. Trousseau 23. Nélaton 24. Tarnier

Au tout début de l’année 1866, la France compte 6081 étudiants en médecine, 5316 inscrits à Paris, 313 à Montpellier, 442 à Strasbourg. Seuls 2000 à 2800 étudiants de la Faculté de Paris sont réellement présents aux cours, les autres n'ayant qu'une inscription

administrative.181 Dès le début, Wurtz doit gérer les conflits sociaux ou politiques qui

occupent les élèves, les controverses doctrinales entre professeurs et enfin les conflits de personnes, sans oublier encore les problèmes de salubrité des locaux, l’approvisionnement des laboratoires et le manque de place pour la bibliothèque, pour les cours, la recherche. Mais ce sont surtout les conflits doctrinaux qui vont durer le plus longtemps et lui demander le plus d'attention.

Quand Wurtz accepte ce décanat, l'École de médecine est déjà sous haute surveillance des politiques. Charles-Philippe Robin (1821-1885) prône dans ses cours un matérialisme assez marqué pour susciter des remontrances de la part du ministre de l'Instruction publique Victor Duruy (1811-1894) : "Vous êtes à l'École pour faire de

l'anatomie et non de la métaphysique. Si voussortez encore de l'enseignement que l'État

vousa confié, attendez-vous à une révocation"182

Le cours de chimie est bientôt confié à A. Naquet. Élève prodige de Wurtz depuis 1859, agrégé de la Faculté de médecine en science accessoire en 1863, il assure dès 1865 à la Faculté de médecine de Paris un cours de chimie complémentaire. En 1866, il apparaît déjà sur une liste émanant du vice-recteur de l'Académie, sur laquelle figurent les noms

d'étudiants arrêtés pour cause de manifestation.183 En 1867, il est arrêté pour des propos

anti-napoléoniens prononcés au premier congrès de l'Association internationale des travailleurs puis déchu de ses droits d'enseignement. Il retourne alors à ses recherches en chimie dans le laboratoire de Wurtz.

1867 Victoire du "matérialisme" dans l'enseignement médical

La Faculté est selon Jean-François Braunstein, comme l'héritière de François

Joseph Victor Broussais (1772-1838).184 Son matérialisme serait défendu corps et âme

181 article 7954, J. méd. chir. prat., 1870, p. 94-95.

182 Duruy, Victor, Notes et souvenirs (1811-1894), Paris : Hachette, 1901, tome 1, p. 360.

par les dits positivistes du moment. "Si le nom de Broussais est encore connu par les médecins de la deuxième moitié du XIXème siècle, Bernard, Charcot ou Bouchard, c'est à l'évidence à travers Auguste Comte et ses disciples, qui ont popularisé "le principe de Broussais"185

Le principe de Broussais est le pilier de l’organicisme. Broussais explique les phénomènes vitaux et leur altération par l’organisation du corps et de ses composants, de leurs interactions. De là, découle l’idée que le corps n’est qu’une somme d’organes et de fonctions et non un tout indivisible dont l’âme serait l’élément insaisissable prédominant.

Toutefois, si le matérialisme a envahi l'École de médecine de Paris, Comte n'a de cesse de le dénoncer, au point de trouver dans le vitalisme de l'École de médecine de Montpellier un secours pour défendre l'indivisibilité de la nature humaine. D'après Braunstein, le matérialisme ne fait, pour Comte, que méconnaître l'échelle des priorités qui distingue l'homme des autres animaux. "Négliger l'action du moral sur le physique, du cerveau sur le corps, ou , plus largement, ignorer le caractère synthétique de l'homme, corps et cerveau, c'est ne voir que l'animal en lui, et pour le médecin dégénérer en vétérinaire." Dans les années 1860 "vitalisme et positivisme ont le même adversaire : le matérialisme".186

Cette adoption du matérialisme médical est pourtant renforcée par les médecins biologistes qui se disent positivistes et qui, contre Comte, subordonnent la médecine à la biologie. En témoigne le cas célèbre de Littré, présenté par Braunstein comme un "positiviste dissident" face aux "positivistes orthodoxes" : "(…) la médecine ne dépend plus, justement dans la partie théorique, qui est celle des systèmes, que de la biologie.

Le lien de la subordination entre les deux est désormais indissoluble".187

Cette distinction entre positivistes orthodoxes et positivistes dissidents n'apparaît nullement dans les discours des étudiants parisiens au congrès de Liège. Ils proclament haut et fort leur adhésion au matérialisme qu'ils lient à leur esprit révolutionnaire. Le

184 Braunstein, J.-F., Broussais et le matérialisme - médecine et philosophie au XIXe siècle. Paris : Méridiens Klincksieck, 1986. 326 p.

185 Braunstein, J.-F. Broussais et le matérialisme - médecine et philosophie au XIXe siècle. Paris : Méridiens Klincksieck, 1986. p. 203.

186 Braunstein, J.-F. Broussais et le matérialisme - médecine et philosophie au XIXe siècle. Paris : Méridiens Klincksieck, 1986. pp. 219-221.

matérialisme du Congrès de Liège ne serait-il pas dans la mouvance de la libre pensée ? C'est en tout cas la constatation que feront les protagonistes du débat de 1868, que nous verrons plus tard, quand ils noteront qu'une contre-pétition est signée des étudiants qui

se sont rendus à Liège pour le droit à la libre pensée.188 Si les premières sociétés de libre

pensée ne furent, comme le souligne Jacqueline Lalouette, que des sociétés d'enterrements civils, avec le retour en France des proscrits dans les années 1860, il est

certain que leur athéisme se conjugue bien au matérialisme et au républicanisme.189 De

plus, comme le rappelle Annie Petit, les années du Second Empire sont marquées, dans l'histoire de la philosophie positive, par la scission entre Littré et Comte. Littré

républicain, ne peut admettre le ralliement de Comte à l'Empire.190 Le républicanisme

de Littré n'empêche pas son prosélytisme en faveur de "son positivisme". Ainsi, pour les opposants au matérialisme, il est aisé de faire l'amalgame entre ces libres penseurs athées, l'esprit révolutionnaire et le positivisme. Pour compléter cette percée des mouvements matérialistes, athées et libres-penseurs, parait en français en 1865, l'ouvrage de Ludwig Buchner, Force et matière. Regnard, qui préfacera, en 1891, l'ouvrage de Buchner, le qualifiera de "catéchisme de la jeunesse". Après un chapitre intitulé "l'immortalité de la matière" et un autre "l'infini de la matière", viennent des affirmations nettement matérialistes telles que: "Le cerveau est le siège et l'organe de la pensée".191

Dans la deuxième moitié des années soixante, les étudiants ont donc leur catéchisme matérialiste. En réponse à cette profession de foi, deux voix s'élèvent. La première est celle de Paul Janet qui répond à Buchner, avant même que son ouvrage soit traduit de

l'allemand.192 L'autre voix est celle de Elmé Marie Caro qui publie en 1867 Le

187 Littré, Émile La Science au point de vue philosophique. Paris : Didier et Cie, 1873. p. 243.

188 L'enseignement supérieur devant le Sénat, discussion extraite du "Moniteur" avec préface et pièces à l'appui, Paris : J. Hetzel, 1868, p. 264.

189 Lalouette, Jacqueline, "La libre pensée" Le XIXe siècle : science, politique et tradition. / Poutrin, Isabelle dir. Paris : Berger-Levrault, 1995. pp. 509-510.

190 Petit, Annie, "les mouvements positivistes" Le XIXe siècle : science, politique et tradition. / Poutrin, Isabelle dir. Paris : Berger-Levrault, 1995. pp. 487-488.

191 Buchner, Ludwig, Force et matière, études populaires d'histoire et de philosophie naturelles. Paris : C. Reinwald, 1869. 3ème éd. française. p. 184.

192 Janet, Paul, Le matérialisme contemporain en Allemagne : examen du système du docteur Büchner, Paris : G. Baillière, 1864. IX-182 p.

matérialisme et la science.193 Bien que le titre comporte le mot matérialisme, le premier chapitre ne parle que de positivisme. La connivence entre les deux doctrines est clairement affichée, ne serait-ce que dans les intitulés des chapitres : "Le matérialisme scientifique. Ses origines. Ses affinités secrètes avec le positivisme". Ainsi perdure et se

renforce l'association entre positivisme et matérialisme.194

C'est pourquoi, vers 1866, le positivisme est brandi comme étendard par des étudiants matérialistes athées, alors même que le fondateur du mouvement était foncièrement hostile au matérialisme. Ceci montre la complexité de l’héritage positiviste dans les années 1860. D’un côté, les professeurs qui prônent la méthode expérimentale comme seule heuristique invoquent la philosophie positive. D’un autre côté, des penseurs qui professent tour à tour le matérialisme, l'athéisme, l'anticléricalisme, la libre pensée peuvent se réclamer de Littré, qui est l’un des chefs de file du mouvement positiviste. C'est en tout cas, ce que montre le congrès de Liège au travers de ses participants comme Regnard, Rey, Casse, Lafargue.

Pourtant les ramifications du mouvement positiviste sont ignorées par ses ennemis, les défenseurs du vitalisme qui sont encore bien installés dans l'enseignement de l'École et

refusent d’identifier l’homme à la somme de ses constituants.195 Ainsi, deux camps

s'affrontent encore et toujours ouvertement, en dépit des dissidences qui habitent chacun des camps. Un professeur comme Andral, est toujours titulaire d'une chaire qu'il a obtenue, en raison de son hostilité au système de Broussais, lorsque la Faculté fut

fermée en 1822.196 La persistance du vitalisme ne signifie pas immobilisme. Dans les

années 1860, la Faculté se tourne de plus en plus vers la science expérimentale. Parallèlement, comme le dit Georges Weisz, une nouvelle conception du savoir médical émerge, demandant des transformations correspondantes dans les programmes d'enseignement. Les professeurs répercutent dans la faculté le credo de Claude Bernard : la médecine devient plus scientifique que philosophique et doit donc faire place à

193 Caro, Elme-Marie, Le matérialisme et la science. Paris : Hachette, 1867. VI-292 p.

194 Braunstein, Jean François, Broussais et le matérialisme médical - médecine et philosophie au XIXe

siècle. Paris : Méridiens Klincksieck, 1986. p. 233.

195 Fruton étudie l'opposition entre mécanisme et vitalisme dans Fruton, Joseph. Stewart, Molecules and

Life, Historical Essays on the Interplay of Chemistry and Biology. New York, London, Toronto:

Wiley-interscience, [1972]. X-579 p.

196 Braunstein, Jean François, Broussais et le matérialisme médical - médecine et philosophie au XIXe

l’observation et à l’expérimentation.197 Ainsi, les professeurs, et surtout les agrégés dont les cours complémentaires ont été créés par Duruy dans les années 1860, vont se réclamer majoritairement pour la science expérimentale. Il reste que cette réforme commence timidement, et avant 1870 l’enseignement dogmatique et magistral, des professeurs en chaire, domine. Ce système a pu survivre parce que l'élite médicale continuait d'aller en dehors de la faculté dans le très grand nombre d'hôpitaux pour former les futurs médecins. Wurtz épaule l’action des agrégés en faveur de l'enseignement pratique. En février 1867, il annonce que c'est la Faculté (autrement dit, lui) qui désormais fixera les heures des cours d'été. Cette mesure lui permet d'en finir avec l'habituel privilège des anciens professeurs qui s'accordaient le droit de fixer leur

emploi du temps avant les autres enseignants.198 De leur côté les étudiants manifestent

une volonté d’avoir un enseignement moins doctrinal et plus professionnalisé lors des cours de Baillon en 1867. Ils reprochent à son enseignement de la botanique en première année d'être trop solennel, trop spécialisé pour une discipline qui reste auxiliaire dans la formation des médecins.

Même si les professeurs manifestent, pour la grande majorité, une velléité de se tourner vers la "science expérimentale", il appartient au doyen de prendre les mesures concrètes pour que ces velléités deviennent réalités. En 1871, Wurtz rappelle que l'enseignement que l'on demande aux agrégés ne doit pas être solennel ni donné ex cathedra. Il doit être

familier et autant que possible pratique.199

Ces professeurs et agrégés, qui se tournent résolument vers l'expérimentation, sont victimes de l’amalgame entre positivisme et matérialisme Aux yeux des étudiants leur action en faveur de la méthode positive en médecine les range dans le camp des sympathisants du matérialisme.

197 Voir Claude Bernard, Introduction à l'étude de la médecine expérimentale. Paris : J. B. Baillière, 1865. 400 p. etG. Wiesz "The Reform and Conflict in French Medical Education" The Organization of

Science and Technology in France: 1808-1914 / ed. by Robert Fox - George Weisz, Cambridge; London;

New York: Cambridge University Press; Paris : Ed. de la Maison des sciences de l'homme, 1980. pp. 61-94.

198 AN : AJ16/6255 Procès verbaux de l'assemblée des professeurs, séance du 23 février 1867.

À la Faculté de médecine de Paris, parmi les étudiants, il y a ceux qui jugent

l'enseignement trop matérialiste et ceux qui pensent qu'il pourrait l'être bien plus.200 Ce

sont ces derniers qui bien souvent se font le plus entendre. Le manque d'unité et de cohérence dans l'enseignement fait déjà en 1865 couler beaucoup d'encre, surtout à la suite du congrès de Liège, où quelques étudiants ont clamé haut et fort leur adhésion aux thèses matérialistes et révolutionnaires face aux thèses déistes. En effet, les étudiants, la presse, vont scruter les enseignements de l’École et souvent assimiler, parfois trop rapidement, telle ou telle parole à l’adoption ou non de la théorie matérialiste.

Les années 1860 apparaissent donc comme une période de transition où, s'il y a une majorité des enseignants qui défendent une approche expérimentale de la médecine, il en existe encore, et ils sont de poids, pour qui le rôle d’un professeur est d'enseigner des doctrines et de prévenir la progression des doctrines matérialistes qui dégradent la nature humaine .Ainsi, d'après H. Favre de la France médicale, en imposant un certain compromis entre les doctrines enseignées pour calmer les esprits, la Faculté a non seulement perdu de son indépendance intellectuelle mais aussi de la richesse des polémiques qui font qu'une science avance. Un des grands problèmes débattus dans les journaux médicaux est le manque de doctrine fixe, de méthode précise :"Vitaliste d'aspiration, positiviste de tempérament se trouvent liés à la même chaîne de pédagogie et d'examens."201

Les élèves se trouvant sans guide ne peuvent, ajoute Favre, que réagir violemment à l'enseignement qui blesse leur conviction. Les étudiants matérialistes seraient blessés dans leur conviction par les quelques professeurs dits vitalistes et réciproquement.

200Et bien sûr une majorité qui ne se prononce pas. Les étudiants de médecine (sages-femmes, officiers de santé, et praticiens) ne viennent généralement pas de famille très favorisée. Les études ont un objectif immédiat de professionnalisation. Les parents investissant généralement énormément d'argent pour ces études, beaucoup ne pouvaient se permettre d'être exclu de l'école. Les manifestations étudiantes sont généralement menées par des futurs praticiens, non par les futurs officiers de santé ou sages-femmes. S'ils forment la majorité des étudiants de l'école, il ne faut pas oublier qu'ils n'étaient pas les seuls. Voir Bartier, John, "Étudiants et mouvements révolutionnaire au temps de la première internationale",

Mélanges offerts à J. Jacquemin. Liège : Université libre de Liège, 1968. 317 p. et Martineaud, Jean-Paul, La commune de Paris, l'Assistance publique et les hôpitaux en 1871, Paris : l'Harmattan, 2004. 288 p.

L'incohérence des enseignements et les troubles estudiantins qui s'ensuivent trouvent leur origine dans le manque d'autonomie de la Faculté dans sa gestion et dans son enseignement. Pour la nomination des professeurs, la Faculté propose, l'Empereur nomme. De même pour la création des chaires, pour leur définition et même pour la validation des diplômes. La Faculté se trouve liée aux décisions de l'Empereur pour ce qui est des financements, des créations de chaires, des nominations des professeurs et du doyen, mais elle se trouve également face au Conseil académique qui décide seul des sanctions infligées aux étudiants en cas de voie de fait, qui décide d'appuyer telle ou telle candidature, tel changement… Or dans ce Conseil académique, le doyen (représentant du gouvernement puisque nommé par lui) est le seul représentant de la Faculté. Il y côtoie les membres désignés comme lui par leur fonction comme les doyens des Facultés de droit ou de lettres, mais également les membres nommés par le ministre qui sont toujours des représentants de l'État et de l'Église. Au ce panel de représentants du pouvoir, il faut ajouter le ministre de l'Instruction publique qui a le rôle de recteur, le vice-recteur et l'inspecteur d'Académie attaché spécialement à l'École de médecine et les inspecteurs généraux de l'enseignement supérieur qui sont souvent professeurs de l'École.

Le poids de l'autorité politique fait que la Faculté ne peut que subir les décisions de l'Empereur et les troubles estudiantins qu'elles engendrent. En effet ces nominations créent une situation où tel enseignement coexiste avec tel autre alors que philosophiquement ils sont inconciliables. Ces nominations imposées peuvent alors être perçues comme une entrave au développement de la médecine expérimentale et donc au progrès de la science médicale. Alors se dessinent deux tendances qui divisent non seulement le professorat mais également les étudiants. Il en résulte des troubles à tous les cours tantôt par les partisans des doctrines dites matérialistes au cours des professeurs dits vitalistes, tantôt des partisans vitalistes aux cours des professeurs dits matérialistes. Et l’engrenage de la revanche fait que les violences perdurent.

Quant à la majorité des professeurs qui essaient de ne pas montrer leur conviction philosophique, ils sont à chaque cours épiés dans leurs propos par des inspecteurs de police, des membres du clergé, des journalistes… et aussi vite, ils sont, comme nous le verrons plus tard, catalogué comme adepte de tel ou tel système philosophique. Aussi en vient-on à penser que seule la création d'institutions libres avec un jury mixte d'examen permettrait à l'étudiant d'apprendre selon ses convictions. De même que la décadence de telle ou telle institution prouverait ses théories obsolètes.

En conclusion, tout et son contraire peut être reproché à la Faculté. Elle peut être accusée de se reposer sur les acquis de Broussais, en niant toute évolution, toute pensée différente qu’elle soit vitaliste ou matérialiste. On peut également lui reprocher de ne professer aucune doctrine fixe ou au contraire de prêcher le matérialisme. La seule évidence qui n’est pas remise en cause est que la Faculté de Paris est loin d’être

majoritairement vitaliste à l’instar de la Faculté de Montpellier.202

Une vague de départs

Lorsque Wurtz accepte le décanat en janvier 1866, le corps professoral est constitué de vingt-sept professeurs en chaire, seuls avec les professeurs honoraires à avoir droit de vote lors des assemblées des professeurs sur les questions d’administration posées à la Faculté. 203

Parmi ceux-ci, certains expriment clairement leurs options philosophiques comme Robin, d’autres sont connus pour leurs anciennes participations gouvernementales, leur ferveur catholique… seuls quatre ne sont pas membres de l’Académie de médecine. Sept sont nés avant 1800, et ont donc plus de 65 ans. Parmi eux six sont connus pour le catholicisme. À l'opposé, parmi les plus jeunes, Charles Robin et Jules Gavarret, sont connu pour leur penchant vers une république laïque. Si la césure opérée entre "les vieux" et "les jeunes" est caricaturale, il semblerait qu'elle s'opère dans les esprits et que la Faculté, comme Duruy verraient d'un bon oeil quelques départs à la retraite.

202 Pour une meilleure compréhension de la controverse qui anima les Facultés de médecine de Paris et

de Montpellier, voir : Raynaud, Dominique, "La controverse entre organicisme et vitalisme : étude de sociologie des sciences" Revue française de sociologie, 1998, 39 (4), pp. 721-750. Pour l'auteur "Le règlement de la controverse fut étranger à une négociation sociale de la vérité, et tourna à la faveur de ceux qui eurent la productivité scientifique la plus élevée. " Voir aussi Weisz, Georges, The Emergence of

Modern Universities in France, 1863-1914. Princeton, N.J.; Guildford, G.B.: Princeton University Press,

cop. 1983. p. 49. qui explique également la compétition entre les trois facultés et entre les écoles de médecine entre elles via le nombre d'étudiants les fréquentant.

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