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Chapitre 1. Revue de littérature

2. Bibliothèques universitaires

2.1. Historique

Afin de bien comprendre les enjeux qui concernent actuellement les bibliothèques universitaires, il importe de connaître les origines de celles-ci. Notre recherche portant sur les bibliothèques universitaires dans une optique nord-américaine anglophone, nous avons concentré notre historique des bibliothèques universitaires sur le Royaume-Uni ainsi que sur les États-Unis. Ainsi, il s’agit d’un court portrait historique localisé et non pas d’un portrait mondial.

2.1.1. Les origines

Les premières universités – Paris, Oxford, Salerno et Bologne – ont été créées à la fin XIIe siècle et étaient axées sur les professions ecclésiastiques, médicales et juridiques. La bibliothèque n’y jouait pas un rôle central, car l’enseignement reposait principalement sur la discussion, la tradition orale étant prédominante et les livres étant rares et dispendieux (Brophy, 2005, p. 3). Par exemple, la bibliothèque de l’université de Cambridge contenait 122 ouvrages en 1424 et la collection se développait principalement grâce aux dons (Brophy, 2005, p. 29). À l’époque, comme les livres étaient copiés et que chaque volume était différent, la valeur des bibliothèques était évaluée selon le nombre de volumes qu’elle contenait. L’invention de l’imprimerie, à la moitié du XVe siècle, a changé ce paradigme; les exemplaires de chaque livre étaient identiques et une collection pouvait être reproduite fidèlement dans plusieurs établissements (Brophy, 2005, p. 29-30). Au cours du XVIIe siècle, la production de livres s’est accélérée, plus de nouveaux titres paraissaient et plus d’exemplaires de chaque titre étaient mis en circulation. Cette période a également vu naître

une manière plus rapide de diffuser les nouvelles connaissances que les monographies : le

Journal des savants, en France, et le périodique Philosophical Transaction of the Royal Society en Angleterre, tous deux fondés en 1665 (Brophy, 2005, p. 30).

Du côté des États-Unis, la première université fondée – Harvard, en 1636 – (Mech, 1996, p. 346) a accueilli le don de 300 ouvrages de John Harvard, ce qui a mené à la création de la première bibliothèque universitaire américaine (Weiner, 2005, p. 2). Avant la révolution américaine, la majorité des livres étaient importés d’Angleterre; les imprimeries locales produisant environ 60 ouvrages par année au XVIIe siècle et dans la première moitié du XVIIIe siècle. Les bibliothèques des collèges des colonies avaient des collections disparates développées à partir de dons, car aucun budget n’était alloué pour l’achat de document. Généralement, les bibliothèques étaient ouvertes quelques heures par semaine et étaient gérées par un professeur (Weiner, 2005, p. 2).

2.1.2. Du XIXe siècle et XXe siècle

Le début du XIXe siècle a été marqué, au Royaume-Uni, par une volonté populaire de rendre l’éducation accessible aux travailleurs, ce qui entraîna la création, entre autres, de la Preston Institute for the Diffusion of Knowledge en 1826, dont le premier employé était un bibliothécaire (Brophy, 2005, p. 5). Le nombre de collèges techniques et d’universités a augmenté significativement au cours du XIXe siècle, mais leurs bibliothèques n’étaient pas développées de manière uniforme. La récession majeure des années 1920 et 1930 ainsi que les deux Guerres mondiales ont également nui au développement des bibliothèques. Encore en 1950 et en 1960, le développement des collections était parfois minimal dans certaines institutions (Brophy, 2005, p. 30-31). En 1967, le Commitee on Libraries of the University Grant Chancellor a déposé un rapport, le Parry Report, qui reconnaissait l’importance des bibliothèques universitaires et recommandait que 6 % des dépenses d’exploitation de chaque université soient consacrés à leurs bibliothèques (Brophy, 2005, p. 32). Quelques années plus tard, en 1976, le Atkinson Report a mis de l’avant l’idée controversée d’élaguer les documents obsolètes ou qui n’étaient pas utilisés et a souligné l’importance de la collaboration entre les différences institutions et sur le prêt entre bibliothèques (Brophy, 2005, p. 33). Finalement, un dernier rapport, le Follet Report, publié en 1992, a mis l’accent sur le besoin de la

bibliothèque de s’adapter aux changements dans l’enseignement, notamment la présence d’étudiants adultes et de ceux à temps partiel qui ont des besoins autres que les jeunes étudiants à temps plein, ainsi que sur l’utilisation des technologies de l’information (Brophy, 2005, p. 35-36).

Les chercheurs américains ont réalisé l’importance de la publication rapide de leurs résultats de recherche et s’ensuivit la création d’environ 9 000 périodiques de 1825 à 1885. Toutefois, la durée de vie moyenne de ceux-ci n’était que de trois ans (Weiner, 2005, p. 2-3). Les universités Harvard et Yale ont été les premières à demander formellement des dons, ce qui a entraîné une rapide croissance des collections : de 1856 à 1876, la collection de la bibliothèque de Harvard augmentait de 63 % annuellement. Même si les bibliothèques dépendaient principalement des dons pour développer leurs collections, une bibliothèque typique d’un petit collège américain contenait entre 6 000 et 20 000 volumes et l’accent était mis sur les documents soutenant l’enseignement plutôt que la recherche (Weiner, 2005, p. 3- 4). Des écoles de bibliothéconomies ont vu le jour aux États-Unis à la fin du XIXe siècle. L’accent qu’on y mettait portait sur le rayonnement des bibliothèques, l’amélioration des services et le développement des collections. Cependant, le développement des collections ne portait pas sur le choix des documents à acquérir, mais sur la manière de les acheter et comment les rendre accessibles (Schmidt, 2004, p. 361). Toujours à la fin du XIXe siècle, après la création du premier programme de doctorat aux États-Unis (Yale), les bibliothèques universitaires se sont positionnées en tant qu’outils d’aide à la recherche et au début du XXe siècle, la majorité des bibliothèques universitaires avaient un comptoir de référence (Weiner, 205, p. 5-6). En 1942, le Farmington Plan, valide de 1948 à 1972, a mis l’accent sur le développement de collections coopératif en stipulant qu’au moins un exemplaire de chaque ouvrage paru dans le monde devait être acquise et rendue disponible par au moins une des bibliothèques qui y adhérait (Schmidt, 2004, p. 363; Weiner, 2005, p. 8). La tendance à créer une bibliothèque séparée pour les usagers de premiers cycles a été remarquée dans les années 1970, mais n’a pas été poursuivie et a presque disparu à la fin des années 1980, notamment à cause des coûts reliés à la duplication des ressources et du personnel nécessaire (Weiner, 2005, p. 6).

Ce court portrait met en lumière la relation qui existe entre les universités et leurs bibliothèques; les collections s’adaptent, entre autres, aux méthodes d’enseignement. Au départ, les collections des bibliothèques n’étaient pas développées de manière systématique, la rareté des livres faisait en sorte qu’elles étaient constituées majoritairement de dons. Toutefois, l’importance du rôle des bibliothèques sur les activités universitaires et la préservation de l’héritage intellectuel a été mise de l’avant dans différents documents et rapports, justifiant ainsi leur existence. La prochaine section porte sur les transformations des collections des bibliothèques universitaires qui ont eu lieu à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle. Ces transformations ont un impact important sur le développement de collections contemporain et occasionnent encore parfois des frictions.