• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 1 : Les antibiotiques

A) Généralités sur les glycosides, méthodes de formation de liaisons glycosidiques

1) Groupements activateurs de la position anomérique et promoteurs de la réaction de glycosylation

La méthode de glycosylation la plus ancienne est la méthode de Fisher169 qui met en

jeu l’hémiacétal libre du sucre en présence d’un alcool comme nucléophile et d’un acide comme catalyseur (Schéma 33). Cette méthode nécessite toutefois des conditions acides drastiques incompatibles avec la synthèse de molécules complexes.

Schéma 33 : Méthode de glycosylation de Fisher

Des méthodes plus douces impliquant l’activation de la position anomérique du donneur de glycosyle et l'utilisation d'un promoteur ont donc été développées (Figure 52).

Figure 52 : Quelques groupements activateurs de la position anomérique

Les glycosides peuvent principalement être activés sous forme :

• D’halogénures de glycosyle (Cl, Br, I, F) : ce sont les premiers groupements utilisés pour activer la position anomérique des sucres. Ils ont été développés par Koenigs et Knorr170, donnant ainsi leur nom à cette méthode de glycosylation. Les procédures utilisées pour leur synthèse sont souvent contraignantes et requièrent notamment l'utilisation de chlorure d’hydrogène gazeux, d’acide bromhydrique ou d’halogénures de triméthylsilyle. A l’exception des fluorures171,172, les halogénures obtenus sont souvent assez peu stables173. De nombreuses conditions ont été développées pour promouvoir les réactions de glycosylation impliquant ces halogénures de ribosyle174. Parmi, celles-ci on peut notamment citer les sels d’argents (AgOTf, Ag2O, AgClO4…)

ou les sels de mercure HgX2 (X = Br, Cl, I). Des acides de Lewis tels que BF3.Et2O ou

des sels d’étain (SnCl4, ou Sn(OTf)2) sont également recensés174. En raison de

l’instabilité des bromures et chlorures de glycosyle, ils ont été écartés.

• De 4-penténylglycoside (Figure 52)175 : il s'agit d'un acétal mixte de l'alcool 4- pentylènique et son utilisation requiert la présence d’un électrophile ou d’un acide fort en quantité catalytique lors des réactions de glycosylation. La double liaison réagit

169 Fisher, E.; Fisher, H. Chem. Ber. 1910, 43, 2521. 170 Koenigs, W.; Knorr, E. Chem. Ber. 1901, 34, 957.

171 Pour une revue sur les réactions impliquant ces espèces voir :Toshima, K. Carbohydr. Res. 2000, 327, 15-26. 172 Mukaiyama, T.; Hashimoto, Y.; Shoda, S. Chem. Lett. 1983, 935-938.

173 Ginisty, N. Thèse, Université Paris Descartes, 2005. 174 Toshima, K.; Tatsuta, K. Chem. Rev. 1993, 93, 1503–1531.

avec ce dernier pour former un carbocation, qui conduit après réarrangement à un

oxonium. Ce dernier évolue ensuite vers l'oxocarbénium sur lequel s’additionne l’accepteur de glycosyle (Schéma 34).

O O PO OP PO Promoteur E+ou H+ E+ O O PO OP PO E O O PO OP PO E O PO OP PO Nucléophile O PO OP PO Nu

Schéma 34 : Mécanisme de glycosylation avec un groupement néopentyle

L’électrophile utilisé est souvent le N-iodo, le N-bromosuccinimide ou encore l’acide triflique.

Les réactions impliquant les 4-penténylglycoside sont souvent lentes175. Nous ne l'avons pas retenu.

• De séléno176, thio177, sulfinylglycoside178 ou xantate de glycosyle (Figure 52)179 : Toutes les réactions de glycosylation qui impliquent ces donneurs de glycosyle utilisent un agent alkylant ou un électrophile pour activer l’hétéroatome (sélénium ou soufre) présent sur la position anomérique et la rendre ainsi très électrophile. L’accepteur de glycosyle peut alors attaquer cette position après départ du groupement activant. Dans ces cas, l’oxocarbénium intermédiaire est formé par activation du groupe présent par un agent d’halogénation tel que le N-iodosuccinimide, par un acide tel que l’acide triflique ou encore par un agent alkylant (iodure de méthyle, triflate de méthyle). L’exemple du thioglycoside est donné ci-dessous (Schéma 35).

Schéma 35 : Mécanisme de glycosylation impliquant un thioglycoside

Ces conditions ne sont pas applicables à notre synthèse, les agents alkylants pouvant notamment réagir avec le cycle uracile de l’intermédiraire C, le modifiant de manière irréversible.

176 Mehta, S.; Pinto, B. M. J. Org. Chem. 1993, 58, 3269–3276.

177 Fügedi, P.; Garegg, P. J.; Lönn, H.; Norberg, T. Glycoconjugate J. 1987, 4, 97–108. 178 Kahne, D.; Walker, S.; Cheng, Y.; Van Engen, D. J. Am. Chem. Soc. 1989, 111, 6881-6882. 179 Marra, A.; Gauffeny, F.; Sinaÿ, P. Tetrahedron 1991, 47, 5149–5160.

• D’acétate de glycosyle (Figure 52)180: ces derniers ont été développés par Helferish et coll. L’acide de Lewis utilisé pour promouvoir la réaction de glycosylation peut être le tétrachlorure d’étain, très toxique, le triflate de triméthylsilyle ou le chlorure de fer (Schéma 37)181.

Schéma 36 : Glycosylation selon la méthode de Helferish et coll.

Une telle méthode présente l’avantage de pouvoir utiliser directement la grande variété de sucres peracétylés commerciaux. En outre, l’utilisation de donneurs de glycosyle peracétylés permet de bénéficier de l’assistance anchimérique de l’acétate en position 2 du sucre qui piège l'oxocarbénium intermédiaire pour conduire à un acétoxonium cyclique (Schéma 37).

La formation de l'acétoxonium contraint le nucléophile à attaquer en anti du cycle par un mécanisme SN2. Cela induit une sélectivité totale, lors de l'addition nucléophile, en

faveur d’une liaison glycosidique 1,2 trans.

Schéma 37 : Assistance anchimérique observée avec les groupements 2-O-acyle

• De trichloroacétimidate de glycosyle182 : leur utilisation présente de nombreux avantages comme la stabilité ou la possibilité d’introduction en fin de synthèse sur des molécules élaborées. De plus, les réactions de glycosylation dans lesquels ils sont impliqués utilisent des promoteurs tels que l’éthérate de trifluorure de bore, le dichlorure d’étain ou encore le triflate d’argent qui sont compatibles avec la réactivité de C.

• De diazéridine,183 d’époxyde anomérique,184 de glycal185 : ces groupements activateurs sont utilisés de façon plus marginale, notamment en raison de la difficulté à les introduire.

En prenant en compte les avantages et les inconvénients des différentes méthodes de glycosylation exposées, les donneurs de glycosyle compatibles avec les fonctions chimiques

180 Lemieux, R. U.; Shyluk, N. P. Can. J. Chem. 1953, 31, 528.

181 (a) Hanessian, S.; Banoub, J. Carbohydr. Res.1977, 59, 261, (b) Banoub, J.; Bundle, D. H. Can. J. Chem.

1979, 57, 2085, (c) Hanessian, S.; Banoub, J.;Methods Carbohydr. Chem. 1980, 8, 237-251.

182 (a) Schmidt, R. R.; Michel, J. Angew. Chem. Int. Ed. Engl. 1980, 19, 731–732, (b) Zhu, X. M.; Schmidt, R. R. Angew. Chem. Int. Ed. 2009, 48, 1900-1934.

183 Vasella, A. Pure & Appl. Chem., 1991, 63, 507-518.

184 Halcomb, R. L.; Danishefsky, S. J. J. Am. Chem. Soc. 1989, 111, 6661-6666. 185 Lemieux, R. U.; Levine, S. Can. J. Chem. 1964, 42, 1473.

présentes sur l'intermédiaire C sont le fluorure et le trichloroacétimidate de glycosyle ou encore le glycosyle peracétylé 103 (Figure 53).

Figure 53 : Groupements retenus pour activer la position anomérique de B

Nous allons maintenant nous intéresser au choix des groupements protecteurs de l’intermédiaire B.

2) Choix des groupements protecteurs et du groupe activateur en position