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1.2.1 Statistique sur le rayon

Le procédé de fabrication des gouttes que nous avons utilisé impose que les lots de gouttes présentent une polydispersité de ±15% sur leur diamètre. Ainsi, pour des gouttes de diamètre moyen égal à 5 µm , la taille s’échelonne donc entre 3 et 7 microns. Indépendamment de cette polydispersité, les gouttes d’émulsions sont caractérisées précisément à l’aide d’un cytomètre en flux, qui permet de donner la densité en streptavidine pour chaque taille de goutte (cf. Chapitre 1.2).

Nous avons configuré la technique de mesure au microscope de manière à acquérir les angles de contact de plusieurs dizaines voire centaines de gouttes pour une même condition expérimentale. Loin d’être un désavantage, la polydispersité des gouttes peut être utilisée à bon escient pour connaître l’évolution du rayon d’adhésion et donc de l’angle de contact en fonction de leur diamètre.

Fig. 1.5 – Représentation du rayon de contact ρ en fonc-tion du rayon de la goutte R pour deux émulsions de soja stabilisées par du Pluronic F127 et du Tween20. Les courbes sont des droites dont les pente sont proportionnelles à l’éner-gie d’adhésion dont la valeur est de l’ordre de 10−5− 10−4

J/m2. Cette énergie est supérieure dans le cas du Tween20 à celle du cas Pluronic F127.

Nous avons représenté sur la figure 1.5 les courbes ρ(R) mesurées pour des gouttes d’émulsions de soja mouillant des lamelles de verre fonctionnalisés uniquement par du PEG-2000 . Notons que le lot d’huile de soja que nous avons utilisé dans ce chapitre pour valider notre technique de mesure est différent de celui que nous utiliserons pour les expériences d’adhésion spécifique proprement dites. L’allure générale de chaque courbe est linéaire, ce qui est conforme avec l’expression de ρ(R) donnée par l’équation 1.3. La pente de la droite correspondant aux gouttes stabilisées par

du Tween20 (bleu) est plus grande que celle des gouttes stabilisée par du Pluronic F127 (rouge). L’énergie d’adhésion, qui varie comme la pente, est donc plus grande dans le cas du Tween20 que dans le cas du Pluronic F127 .

1.2.2 Précision de la mesure : Tension de ligne

Si l’on observe bien la figure 1.5, on remarque qu’aucune des deux courbes n’a une ordonnée à l’origine nulle comme l’imposerait la loi de Young-Dupré.

Nous avons tracé sur la figure 1.6-a les courbes de variation de cos θ en fonction de l’inverse du rayon de contact. Il apparaît clairement, au moins pour la courbe correspondant au cas du Pluronic F127 , que le cos θ dépend linéairement de 1/ρ.

La loi d’Young-Dupré peut être modifiée de manière à intégrer l’influence du périmètre de la zone d’adhésion sur l’angle de contact : il faut prendre en compte un terme de tension de ligne τ qui s’exprime dans le cosinus de l’angle à l’équilibre (Drehlich) :

cos θ = cos θ0±τ γ

1

ρ (1.4)

Le terme θ0 correspond à l’angle de contact en l’absence de terme de tension de ligne τ . La tension de ligne τ s’exprime en J/m et son signe peut être positif ou négatif suivant l’influence mouillante ou démouillante de la ligne de contact sur l’angle.

A partir de l’expression du sinus de l’angle de l’équation 1.3 et de la nouvelle expression du cosinus faisant intervenir τ (selon l’équation 1.4), on peut exprimer la nouvelle relation liant le rayon d’une goutte R au rayon de la zone de contact ρ :

R2 = ρ 4 1 − ρ2cos θ0− 2ρτ γ cos θ0− ( τ γ) 2 (1.5)

Sur la figure 1.6-b, nous avons représenté la courbe ρ(R) dans le cas des gouttes stabilisées par du Pluronic F127 ainsi que la courbe définie selon l’équation 1.5 et les paramètres suivants : γ=1mN/m et τ = −6, 8.10−12 J/m. La tension de surface γ a été mesurée par la technique de la goutte pendante et la tension de ligne est l’unique paramètre ajustable. La valeur de la ten-sion de ligne ajustée est conforme aux valeurs théoriques qui s’échelonnent de 10−12à 10−10J/m. L’huile de soja n’étant pas un liquide simple comme pourrait être une huile minérale de type dodécane, on ne peut isoler les effets de tel ou tel composant sur la tension de ligne et conclure

Fig. 1.6 –Gauche : Représentation de cos θ(1/ρ) pour une émulsion de soja mouillant sur un substrat de verre

fonctionnalisé par du PEG-2000 dans un tampon Phosphate/Tween20 (bleu) et un tampon Phosphate/F127 (rouge). – Droite : Représentation de ρ(R) du cas Phosphate/F127 . Le cosinus de l’angle de contact varie linéairement avec 1/ρ, ce qui implique une déviation à la loi d’Young.

quant à son origine microscopique. Toutefois, il est possible de calculer une distance caractéris-tique δ =| τ /ε |> 0 à partir du ratio entre l’énergie d’adhésion et la tension de ligne. On peut grossièrement estimer δ ' 100 nm à partir d’une énergie d’adhésion typique de notre système ε ' 5.10−5 J/m2 et de la valeur de la tension de ligne ajustée τ ' 5.10−12 J/m. Cette valeur δ est bien supérieure à la longueur d’extrapolation λ ∼ 1 nm pour notre système, ce qui indique que l’effet de ligne n’est pas lié, au moins directement, à l’existence d’une courbure de l’interface le long de la ligne de contact.

Nous verrons dans les chapitres suivants que le lot d’huile de soja qui nous a servi à fabriquer des émulsions fonctionnalisées et que nous avons utilisé pour toutes les expériences d’adhésion a des propriétés différentes : dans le cas du mouillage non spécifique, et à la différence du cas présent, l’angle de contact ne présente plus de déviation à la loi d’Young qui nécessite la prise en compte d’une tension de ligne. Nous avons préféré travailler avec ce lot qui nous permettra de voir l’effet de la formation de liens spécifiques sur le terme de tension de ligne.

Mouillage Non Spécifique

Nous avons discuté dans un des paragraphes précédents la nécessité, pour étudier l’effet des interactions spécifiques uniquement, de toujours réaliser des expériences différentielles entre une première qui fait intervenir la somme de toutes les interactions, spécifiques et non spécifiques, et une seconde qui ne fait intervenir que les interactions non spécifiques. Ce problème a priori anodin se révèle plus ardu lorsqu’on est confronté à la définition exacte de la bonne expérience témoin.

2.1 Définition de l’expérience témoin

L’angle de contact des gouttes dans les expériences témoins doit être minimal pour laisser la plus grande plage de mesure accessible lors de la formation de liens spécifiques. Parmi les diverses possibilités qui s’offraient à nous, nous en avons choisi deux, dont les résultats sont équivalents en terme d’énergie d’adhésion :

1. La première est réalisée à partir de gouttes réactives sur des substrats inertes : les gouttes ont une densité Γgsa de streptavidine et les surfaces de verre sont uniquement fonctionna-lisées par du PEG-2000 (Γlbiot=0 µm−2 ).

2. La seconde est réalisée à partir de gouttes inertes sur des surfaces réactives : les gouttes ayant une densité Γgsa en streptavidine ont été préalablement passivées par une étape d’incubation dans un excès de biotine libre. Les substrats de verre sont fonctionnalisés par un mélange de polyéthylène glycol à une densité de Γlbiot en PEG-3400-Biotine .

Ces deux expériences témoins ont l’avantage, d’être réalisées à potentiel de surface des gouttes et des lamelles constants, puisque la densité en streptavidine Γlbiot est fixée.

Fig. 2.1 –Comparaison entre les angles de contacts des deux expériences témoins (gauche et droite) avec une expérience laissant se développer des interactions spécifiques (centre). Les expériences témoins font soit intervenir des gouttes ré-actives sur des substrats inertes (gauche), soit des gouttes inertes sur des substrats réactifs (droite). Les deux expé-riences témoins sont équivalentes.

Nous avons représenté sur l’histogramme 2.1 les angles de contacts obtenus pour les deux condi-tions témoins (gauche et droite) et une condition d’adhésion spécifique (centre) pour des gouttes dont la diamètre est de 5 microns. La densité en PEG-3400-Biotine pour les conditions du centre et de droite est fixée à environ Γlbiot=6000 µm−2 et la densité de streptavidine est de Γgsa=325 µm−2 .

Les deux conditions témoins sont équivalentes en terme d’angle de contact, celui ci étant de l’ordre de 10˚. Alors que dans les expériences faisant intervenir des liposomes, il est possible d’annuler l’angle de contact, avec nos émulsions, il y a toujours une adhésion minimale sur les substrats que nous utilisons.

L’angle de contact lié à l’existence d’interactions spécifiques est de l’ordre de 25˚. Cela montre que nos deux expériences témoins sont satisfaisantes, et que dans le cas dit "spécifique" nous mesurons bien l’effet de l’interaction streptavidine/biotine