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Préambule

En France, l’actualité sociale du début de l’année 2018 a été marquée par un mouvement de grève inédit : celui des personnels des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes. Infirmiers et aides-soignants réclament davantage de moyens financiers, à la fois pour améliorer leurs conditions de travail et pour permettre un accompagnement des résidents qui soit garant de leur dignité et d’une meilleure qualité des soins. Cette vague de revendications a surpris sans surprendre. Si elle est portée par des professionnel·le·s d’un secteur structurellement peu enclin aux mobilisations collectives, elle fait écho à un senti- ment largement partagé par l’opinion publique : nous ne faisons pas assez pour nos aînés les plus fragiles.

Sous cet apparent consensus, se font rapidement jour des questionnements fondamen- taux sur le sens à donner à ce diagnostic et les réponses à y apporter. Qui devrait être da- vantage mobilisé pour améliorer l’accompagnement des personnes en situation d’incapa- cités, en particulier au grand âge : la puissance publique ? Dans ce cas, à quels arbitrages budgétaires faudra-t-il consentir ? Doit-on attendre davantage des familles ? Celles-ci, déjà largement impliquées dans l’accompagnement des personnes handicapées et dépendantes, se trouvent reconfigurées par la baisse de la fécondité et l’évolution des comportements en matière d’unions et de participation au marché du travail. Doit-on alors en appeler davan- tage à la responsabilité individuelle et aux solutions proposées par le marché ?

Au niveau individuel, le développement d’incapacités physiques, sensorielles ou cogni- tives à l’âge adulte est un risque, dont la probabilité d’occurrence augmente avec l’accrois- sement de la longévité. A l’échelle des sociétés ayant achevé leur transition démographique, c’est en revanche une certitude qui s’impose : celle de voir le nombre de personnes âgées augmenter fortement et représenter une proportion croissante de la population totale. Au vieillissement démographique s’est ajoutée la double crise économique et des finances pu- bliques dans les pays de l’Organisation de co-opération et de développement économique

(OCDE), produisant un contexte dans lequel le rôle des pouvoirs publics dans l’organisation et le financement de l’accompagnement des personnes en situation d’incapacités est mis en question. La question des ressources humaines et financières à consacrer aux personnes âgées dépendantes surgit dans l’intimité des familles comme sur les bancs de l’Assemblée Nationale ; elle constitue une des grandes questions sociétales et politiques de notre époque. Sans évidemment prétendre constituer la seule approche disciplinaire pertinente, la science économique, par ses outils conceptuels et empiriques, peut apporter des éclairages précieux sur les politiques d’accompagnement de la dépendance. Elle se révèle particuliè- rement bien outillée pour aborder la question suivante : dans quelle mesure les dispositifs publics de prise en charge des soins de longue durée existants sont-ils efficients et équi- tables ? C’est à cette interrogation générale que cette thèse entend apporter des éléments de réponse et contribuer ainsi au débat public. Pour ce faire, elle s’appuie sur un ensemble d’analyses empiriques. Comment les dispositifs existants influencent-ils les aides reçues par les personnes en situation d’incapacités ? Observe-t-on des inégalités socio-économiques dans le recours aux aides médico-sociales ? L’allocation de ces aides est-elle équitable ? Les contributions financières demandées aux bénéficiaires des aides publiques le sont-elles ? Ces contributions sont-elles compatibles avec une bonne couverture du risque financier as- socié à la dépendance ? Sous quelles conditions des réformes peuvent rendre les dispositifs existants plus justes et plus efficients ?

Nous proposons pour commencer une introduction générale à la thèse, qui s’organise en trois grandes parties. La première partie vise à préciser l’objet d’étude, à partir des défi- nitions des concepts d’incapacité, de dépendance et de soins de longue durée. Elle présente également le contexte dans lequel s’insèrent nos questionnements, en offrant une vue d’en- semble des tendances démographiques et épidémiologiques et des politiques publiques de prise en charge des soins de longue durée dans les pays de l’OCDE. La seconde partie situe la problématique de la thèse dans la littérature économique existante. Elle met en outre en regard les systèmes de prise en charge des soins de longue durée des deux pays sur lesquels portent nos analyses, la France et les Pays-Bas, et montre l’intérêt de leurs contextes institu- tionnels au regard de notre problématique. La dernière partie passe en revue les questions de recherche soulevées dans les différents chapitres, les principaux résultats obtenus et leurs implications. Elle précise également les outils conceptuels et les méthodes utilisés, les don- nées mobilisées ainsi que les définitions empiriques des soins de longue durée, du besoin d’aide et des principes d’équité qui sont utilisées dans la thèse.

Preamble

In France, the year 2018 started with an unprecedented strike hitting the news: that of the employees of nursing homes. Nurses and other professional caregivers are claiming more financial resources from the government, in order to improve their working conditions, in- crease the quality of care and guarantee the elderly residents’ dignity. Although the protest was unexpected, it did not come as a surprise. Even though the strike was led by the work- ers of a sector that is structurally little prone to collective protests, it echoes a feeling largely shared by the public opinion: too little is done to help our most fragile elders.

Behind this apparent consensus, many fundamental questions arise, relating to the sense that we should give to this diagnosis and the remedies to offer. Who should be more involved in supporting the disabled individuals, in particular the elderly: the government? In such a case, which budgetary trade-offs have to be accepted? Should we rather expect more from the families? Those are already greatly involved in the provision of informal care; in addition, they are being reconfigured by lower fertility rates and the evolution of behaviors in terms of unions and females’ labor market participation. Should we then call for more individual responsibility and more room for market-based solutions?

At the individual level, the onset of physical, sensory or cognitive limitations in adult life is a risk, whose probability can increase along with the rise of longevity. At the level of the countries that have completed their demographic transition, it is certain that the number of the disabled elderly will keep increasing and represent a growing share of total population. In the countries of the Organization for economic co-operation and development (OECD), the economic and public finance crisis came on top of population aging; this has resulted in a context in which the role of the government at large in the financing and in the organization of care provision for disabled individuals is being challenged. The question of the human and financial resources that should be devoted to long-term care arises both in the intimacy of families but also in Parliamentary discussions; it is one of the major societal and political questions of our time.

Thanks to its conceptual and empirical tools, economics can shed light on this question, even if it is certainly not the only relevant disciplinary approach to it. It shows well adapted to tackle the following question: to what extent are public long-term care policies efficient and equitable? This is the general issue that this thesis intends to address and thereby contribute to the public debate.

The thesis starts with a general introduction. The first part aims at exposing the general topic, starting with definitions of the concepts of disability, dependency and long-term care. It also offers a broad overview of the demographic and epidemiological trends as well as of the long-term care policies in OECD countries. The second part relates the general question

addressed in the thesis to the existing economic literature. It also presents the long-term care systems in the two countries under investigation in the empirical analysis, France and the Netherlands, and highlights the interest of their institutional features with respect to the questions being discussed. The third section reviews the specific research questions that are tackled in each Chapter, the main results and their implications. It also presents the conceptual tools, the empirical methods, the data as well as the empirical definitions of long- term care, care needs and the equity principles that are used in this thesis.

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