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La génomique fonctionnelle est l’étude de la fonction des gènes. C’est le fait d’assigner un rôle biologique aux gènes. Ces travaux sont complémentaires à l’annotation d’un génome. L’annotation ab initio ne permet pas la plupart du temps de découvrir la fonction d’un gène. L’étude de mutants joue dans ce cas un rôle important. Depuis les premiers travaux de Mendel, l’étude des variants isolés dans les populations naturelles ou induits par mutagénèse, ont permis de localiser et d’identifier des gènes pris individuellement, puis d’en déterminer la fonction biologique. Mais le gène muté était, jusqu’il y a peu, difficile à localiser. Il faudra attendre le début des années 90 pour que les premières expériences de mutagénèse insertionnelle chez les plantes puissent laisser entrevoir un avenir autre que théorique pour la génomique fonctionnelle.

1.3.1 La mutagénèse

Il existe 3 types de mutagénèse : la mutagénèse chimique (EMS), la mutagénèse physique (rayon X, neutrons, etc) et la mutagénèse insertionnelle. Alors que les deux premières pro- voquent des modifications de l’ADN par transformation ou délétion de bases, la mutagénèse insertionnelle introduit un élément d’ADN étranger dans le génome hôte. Cette dernière tech- nique s’est beaucoup développée parce que l’élément étranger sert d’étiquette afin de localiser directement la mutation (figure1.3). Dès lors, est venu l’idée de produire des collections de mu- tants, c’est à dire des ensembles de plantes indépendantes portant chacune une (de préférence) ou plusieurs insertions de l’élément mutagène. Plus la population de mutants est importante plus on augmente la probabilité d’inactiver chaque gène du génome. Cette saturation du gé- nome dépend de la taille moyenne d’un gène, de la taille et de l’organisation du génome de la plante utilisée et du nombre d’insertions dans la population [BH98]. Pour que la saturation soit efficace il est important que les insertions aient lieu au hasard et que leur nombre par lignée reste faible. Les populations peuvent être utilisées en crible direct - isoler un gène à partir d’un phénotype observé - et/ou en crible inverse - partir d’un gène connu inactivé pour en observer le phénotype. La génétique inverse à grande échelle permet d’isoler un grand nombre de lignées présentant des gènes affectés et d’étudier leur fonction biologique.

1.3.2 Les différents types de mutagénèse insertionnelle

1.3.2.1 L’ADN-T

L’ADN-T est une petite séquence d’ADN présente dans le plasmide Ti (tumor inducing) de la bactérie Agrobacterium tumefaciens (figure 1.3). Dans la nature, cette bactérie du sol phy- topathogène est capable de transférer et d’insérer ce fragment dans le génome d’une plante, déclenchant ainsi une tumeur. Cette fonctionnalité a été utilisée en laboratoire afin d’introduire de l’ADN étranger dans le génome des plantes (figure1.3). Les seuls éléments nécessaires aux transferts du fragment sont ses extrémités gauche et droite de 25-pb, le reste de la séquence est souvent remplacé par des éléments de sélection génétique. Le T-DNA peut être également équipé de gènes rapporteurs qui, lorsqu’ils s’expriment, permettent de visualiser sa localisation dans la plante (e.g. fluorescence pour le gène de la GFP, coloration bleu pour le gène GUS). Lorsque le fragment "étiquette"(ou "Tag") est inséré au hasard dans un gène, il provoque une mutation stable dans la descendance avec, éventuellement, des phénotypes observables. Les pre- mières expériences concluantes chez la sous-espèce japonica de riz ont été réalisées [CCH+93].

1.3. La génomique fonctionnelle

FIG. 1.3 – Schéma représentant le transfert d’ADN par Agrobactérium

Il faudra cependant attendre quelques années pour que ces protocoles soient appliqués dans des conditions de haut débit [SLR+03,TAI04]).

1.3.2.2 Les transposons

Également appelés éléments transposables, ce sont des séquences d’ADN endogènes ca- pables de se déplacer de manière autonome dans le génome par un mécanisme que l’on nomme transposition. Présents chez presque tous les organismes vivants, ils sont un des constituants im- portant des génomes eucaryotes. Par exemple ils représentent près de 70% du génome du maïs et sont en partie responsables de l’accroissement de la taille du génome des plantes. Le riz possède un transposon endogène Tos 17 qui se déplace dans le génome au cours de la transformation des cals par Agrobactérium. Une des méthodes de génétique inverse consiste à localiser les sé- quences Tos 17 qui ont bougé et perturbé l’expression de gènes. D’autres méthodes empruntées au maïs consistent à inclure dans le T-DNA des systèmes transposons tels que Ac/Ds (Activa-

tor/Dissociation) ou En/Spm (Enhencer/Suppressor-Mutator). Ces systèmes ont la particularité

en plus de l’insertion au hasard dans le génome procurée par le T-DNA d’être à nouveau excisé du gène interrompu. C’est l’étape de remobilisation du transposon. Par exemple, en présence d’une transposase apportée par croisement (enzyme provoquant la transposition) il est possible de remobiliser le système Ac/Ds (Activator/Dissociation), ce qui aura pour effet de générer de nouvelles insertions dans la zone proche de l’insertion de départ.

1.3.3 Utilisation des collections d’insertion pour la génétique directe et

inverse

Aujourd’hui l’enjeu biologique est différent de celui d’hier. Après l’obtention des séquences génomiques complètes ainsi que la localisation des gènes sur les chromosomes, il reste à définir leurs rôles dans l’organisme. Une séquence n’a de valeur que si elle est attachée à une infor-

mation. Il est possible d’attribuer une fonction putative à un gène par similitude avec des gènes connus mais si la comparaison de séquences avec celles des banques permet d’assigner le plus souvent la fonction biochimique, elle ne donne pas le rôle spécifique du gène dans l’organisme. Une fonction putative a pu être assignée à 70% des 26 000 gènes d’Arabidopsis mais celle de 30% d’entre eux reste encore totalement inconnue soit parce qu’ils n’ont aucune similitude avec des séquences connues, soit parce qu’ils sont similaires à des séquences inconnues (AGI, 2000). En complément des analyses in silico doivent donc être menées des études expérimen- tales. Par génétique directe, l’observation d’un phénotype mutant est le moyen le plus simple pour accéder à la fonction du gène muté. La mise en place de stratégie de crible direct sur des collections entières permet d’obtenir de nombreuses informations exploitables par la suite. Ces stratégies sont couplées également à des stratégies de génétique inverse, dans lesquelles toutes les insertions de la collection sont caractérisées et positionnées sur le génome [SGL+04]. Dans

ce cadre, la mise en place de systèmes d’information permet d’effectuer des recherches dans ces collections par génétique inverse [DRL+06] ou directe [LGL+07].