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les tiques de Guadeloupe et de Martinique

2. Matériel et Méthode

3.5. Analyse et reconstruction des génomes viraux

3.5.3. Génome du virus “Lihan tick virus-Like”

Six et quatre séquences contigs ont permis l’identification des segments L et S, respectivement, d’un nouveau virus proche du Phlebovirus Lihan tick virus (LTV). Dans un premier temps, les six contigs du segment L ont été assemblés, puis 19 475 reads ont été alignés sur la séquence consensus contig permettant ainsi de reconstruire la séquence du segment L du nouveau virus, appelé Lihan tick virus-Like (LTVL). De même, les quatre contigs du segment S ont été assemblés, puis 7 974 reads ont été alignés sur la séquence consensus contig permettant ainsi de reconstruire la séquence du segment S du LTVL.

107 Le LTVL présente un génome de type ARN segmenté et linéaire, avec un segment L de 6 529 nt et un segment S de 1 769 nt. Le LTV partage 95,1% et 96,7 % d’identité de séquences nucléotidiques avec les segments L et S du LTV respectivement, suggérant la présence d’un variant (ou nouveau génotype) du LTV. Lorsque l’on compare la taille des segments L et S entre le LTVL et le LTV (Tableau 8), les longueurs sont quasi similaires, les segments du LTVL étant légèrement plus longs, ce qui suggère que nous ayons reconstruit la totalité de la séquence de ces deux segments. Le génome du LTVL présente la même organisation génomique que le génome de référence pour chacun des segments, avec des ORF majoritaires structurés de façon similaire et de même taille (Tableau 8) : l’ORF présente sur le segment L code putativement pour l’ARN polymérase ARN-dépendante, et celle présente sur le segment S pour la protéine de nucléocapside (Figure 9).

Figure 9. Génome du Lihan tick virus-Like (LTVL) détecté en NGS.

Les séquences ORF ont été analysées à l’aide de l’algorithme blastx (Tableau 8). L’ORF qui correspond à l’ARN polymérase du LTVL partage 99% d’identité de séquences avec l’ARN polymérase du LTV (AJG39242.1). L’ORF correspondant à la protéine de nucléocapside du LTVL partage également 98% d’identité de séquences avec la protéine de nucléocapside du LTV (AJG39308.1). Les pourcentages d’identité de séquences protéiques

108 très élevés entre les deux protéines du LTVL et du LTV, suggèrent là encore la présence d’un variant du LTV dans nos échantillons de tique.

Tableau 8 : Comparaisons des génomes et des ORF du virus Lihan tick virus-Like (LTVL), détecté en NGS, et du génome de référence du Lihan tick virus (LTV).

Virus LTVL LTV

Génome

Nature ARN linéaire

segmenté ARN linéaire segmenté

Affiliation Phlebovirus Phlebovirus

Segment L Numéro accession / KM817672.1 Taille (nt) 6529 6517 Nombre de reads 19475 / % Identité (Alignement) 95,1% Segment S Numéro accession / KM817736.1) Taille (nt) 1769 1762 Nombre de reads 7974 / % Identité (Alignement) 96,7% ORF ORF ARN polymérase Localisation Segment L

Nom ORF ORF 1 (frame 2) AJG39242.1

Taille (nt) 6456 6456 Position 44-6499 21-6476 % Identité (blastx) 99% ORF Nucléocapsides Localisation Segment S

Nom ORF ORF 1 (frame 3) AJG39308.1

Taille (nt) 1434 1434

Position 27-1460 29-1462

% Identité (blastx) 98%

Le LTV a été classé parmi le genre Phlebovirus transmis par les tiques, et plus particulièrement au groupe « Uukuniemi virus » (38,6% d’identité de séquence protéique), suggérant que le LTVL décrit dans cette étude serait également un Phlebovirus. Les Phlebovirus font partie de la famille des Bunyaviridae, qui présente un génome à trois segments, avec le Segment L codant la polymérase, le segment M les glycoprotéines et le

109 segment S la protéine de nucléocapside. Cependant, à l’instar de l’étude de Li et al., 2015, aucune séquence de notre jeu de données n’a permis d’identifier le segment M, que ce soit en analysant les séquences nucléotidiques par blastn ou les séquences protéiques traduites par blastx. Sachant que nous annotons nos séquences contigs par recherche d’identité de séquence sur les bases de données, on peut penser que soit (1) le LTV et LTVL ont une séquence nucléotidique du segment M tellement polymorphe que la recherche par identité ne permet pas de l’identifier, soit (2) le LTV et LTVL ne sont pas des Phlebovirus.

De plus, les séquences des segments L et S du LTV et du LTVL ne comportent pas les séquences clés des Phlebovirus normalement présentes en 5’-UTR (ACACAAAG) et 3’-UTR (CUUUGUGU = CTTTGTGT) (Elliott and Brennan, 2014). Là encore, soient les séquences clés ne sont pas présentes, ce qui tend à penser que les LTVL et LTV ne sont pas des Phlebovirus mais des virus proches, soient les génomes des segments L et S ne sont pas complets et nous n’avons donc pas les séquences 5’ et 3’ UTR.

De plus, les Phlebovirus, présentent sur le segment S une séquence codante ambisens : la nucléoprotéine est codée dans le sens négatif, et les protéines NSs (facteurs de virulence) sont codées dans le sens positif. Cela signifie, que le segment S est directement transcrit puis traduit en nucléocapsides, et en parallèle le segment S est répliqué, donnant ainsi un anti génome qui est transcrit à son tour puis traduit en protéine NSs. Or la séquence du segment S du LTVL ne montre pas d’ORF de type NSs (Figure 10).

Figure 10. Comparaison de la structure génomique du segment S du Lihan Tick Virus-Like, avec celle de deux Phlebovirus, le Uukuniemi virus et le Rift Valley Fever Virus.

110 La présence du facteur de virulence porté par la protéine NSs chez les Phlebovirus semble liée à la capacité du virus à devoir s’adapter et se répliquer dans différents hôtes. Ainsi, en absence d’alternance d’hôte, le virus va avoir tendance à perdre ses facteurs de virulence. Cela a été démontré pour le virus de la fièvre de la Vallée du Rift, qui cultivé en continu sur des cellules de moustique présentait une délétion dans la séquence codante de la NSs et une perte de virulence (Moutailler et al., 2011). Ainsi, si le LTVL est un Phlebovirus, l’absence d’ORF codant la protéine NSs suggérerait une adaptation de ce virus à son hôte, avec une réplication virale uniquement chez la tique, et donc une absence probable de virulence.

Pour conclure, la classification du LTVL en tant que Phlebovirus, reste encore à être prouvée. On peut noter que le LTV avait été retrouvé dans des tiques Rhipicephalus microplus en Chine, la même espèce de tique qui est présente dans nos échantillons de Guadeloupe et Martinique (Li et al., 2015).

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