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5. Caractérisation des gènes d’adaptation véhiculés par les ICE et les IME de streptocoques

5.3. Gènes d’adaptation détectés chez les ICE

En avant-propos, il est important de noter que lorsqu’un élément (ICE ou IME) portait un

gène d’adaptation et était intégré dans un autre élément (ICE ou IME), le gène d’adaptation

a été comptabilisé à la fois pour l’élément intégré et l’élément hôte. En effet, le transfert de

l’élément intégré seul est bien entendu possible, mais le transfert de l’élément composite

est également envisageable.

a. Résistances aux antibiotiques

Sur l’ensemble des 105 ICE et 26 dICE analysés, 59 éléments portent une ou plusieurs

résistances aux antibiotiques (Figure 15). L’essentiel de ces ICE codant une résistance à un

antibiotique (48/59) appartiennent aux familles Tn916 et Tn5252. La très grande majorité de

ces résistances conférent la résistance à la tétracycline (gène tetO) ou à l’érythromycine

(gène ermB). Les gènes conférant la résistance à la tétracycline sont généralement portés

par des éléments de la famille Tn916 (tous les éléments de cette famille la portent) et les

gènes conférant la résistance à l’érythromycine par les éléments de la famille Tn5252.

Quatre gènes conférant une résistance au chloramphénicol ont aussi été détectés, tous

portés par des ICE de la famille Tn5252. Sept ICE appartenant à la famille Tn1549 codent

également des résistances aux antibiotiques. Parmi eux, 3 codent une résistance à la

tétracycline procurée par un gène différent (gène tet32) de celui généralement porté par les

éléments de la famille Tn916 (gène tetO). Trois codent une résistance à l’érythromycine

procurée par un gène différent (gène ermA) de celui généralement porté par les éléments de

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la famille Tn5252 (gène ermB). Enfin, un ICE portait un gène conférant la résistance au

lincosamide, seul gène conférant cette résistance détectée au cours de cette étude.

Les 2 ICE appartenant à la famille VanG (famille ainsi nommée par référence au premier ICE

de cette famille qui portait le gène de résistance à la vancomycine vanG) portent également

des gènes de résistance à des antibiotiques. Cependant ces gènes ne conférent pas la

résistance à la vancomycine, mais à la tétracycline (gène tet32) pour ICE_SsuGZ1_lysS, et à la

tigécycline (gène mepA) pour ICE_Spy2096_rumA.

Enfin, un seul ICE de la famille ICESt3 (ICE_SgaUCN34_ftsK) et un seul ICE de la famille

TnGBS2 (ICE_ScoC1050_mutT) portent des gènes résistances à des antibiotiques. Dans le cas

d’ICE_SgaUCN34_ftsK, cette résistance à la tétracycline est due à l’intégration d’un ICE de la

famille Tn916. Dans le cas d’ICE_ScoC1050_mutT, le gène détecté confère potentiellement la

résistance à la polymyxine (gène pmrE), un antibiotique utilisé généralement contre les

bactéries Gram- (https://www.vidal.fr/substances/6857/polymyxine_b/). De plus, cet ICE est

le seul ICE que nous avons identifié codant à la fois un module de conjugaison appartenant à

la famille TnGBS2 et un module d’intégration comportant 3 intégrases à sérine. Cette

association atypique pour les éléments de la famille TnGBS2 résulte vraisemblablement d’un

réarrangement entre deux éléments, dont un de famille TnGBS2 et l’autre de famille Tn5252.

Ce réarrangement pourrait être à l’origine de la présence de cette résistance à la polymyxine

dans un élément de la famille TnGBS2.

a. Système de restriction-modification

Initialement, la base de données utilisée pour notre recherche de système R-M contenait :

les gènes impliqués dans les systèmes de restriction-modification de type I, II, IIG, III et IV ;

les gènes « S » contrôlant la spécificité de ces systèmes ainsi que les gènes « C » impliqués

dans la régulation des systèmes R-M. Cependant, l’utilisation de l’ensemble de cette base

montre que les gènes « S » et « C » détectent de nombreux faux positifs sans aucun rapport

avec les systèmes RM (par exemple les excisionases d’ICE) et ont donc été écartés de l’étude.

Au total, sur les 105 ICE et 26 dICE analysés, 59 éléments portent, au moins, une enzyme

pouvant appartenir à un système R-M. Ces éléments codent dans la plupart des cas, soit des

méthyl-transférase de type II isolées (qui pourraient ou non appartenir à un système R-M

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dont l’endonucléase de restriction aurait échappé à la détection), soit des

méthyl-transférase de type II associées à des enzymes de restriction de type II.

Résistance aux antibiotiques Système R-M

Résistance aux métaux lourds Bactériocine

Figure 15 : Fonctions d’adaptation portées par les ICE de streptocoques.Les ICE sont classés en famille autour du cercle. Un carré de couleur est indiqué lorsqu’au moins un gène impliqué dans la fonction d’adaptation a été détecté. En jaune : système de restriction-modification ou méthyltransférase isolée ; en vert : résistance aux antibiotiques ; en rouge : résistance aux métaux lourds (contient également des transporteurs d’ions) ; en bleu : synthèse de bactériocine.

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Parmi ces 59 ICE, on retrouve sans exception tous les éléments (29) de la famille Tn5252 qui

codent une, ou plusieurs, méthyl-transférase isolées de type II. Ceci suggère que ces

enzymes pourraient ne pas être appartenir à un système R-M mais plutôt intervenir dans le

cycle de vie des éléments de cette famille.

De même, 10 éléments de la famille TnGBS2 portent des gènes pouvant être impliqués dans

des systèmes R-M. Sept d’entre eux semblent coder des systèmes de restriction de type I,

tandis que 3 ne semblent coder que des méthyl-transférases de type II. De plus, 9 ICE de la

famille Tn1549 codent des enzymes impliquées dans des systèmes R-M de type II, 6 codant

des systèmes complets et 3 ne codant apparemment que la méthyl-transférase.Par ailleurs,

quatre éléments de la famille TnGBS1 codent des méthyl-transférases de type II dont une est

associée à une enzyme de restriction de type II. Enfin, les 2 éléments de la famille VanG,

ICE_SsuGZ1_lysS et ICE_Spy2096_rumA, codent respectivement une méthyl-transférase de

type IV et 2 méthyl-transférase de type II.

Bien que ICESt3, prototype de la famille du même nom, soit connu pour coder un système

R-M (Burrus et al., 2001; Johnson and Grossman, 2015), seulement 5 des 53 ICE/dICE de la

famille ICESt3 détectés dans les 124 génomes de streptocoques portent de tels gènes.

Quatre ICE semblent coder des systèmes R-M de type II complets, tandis qu’un ICE semble

coder une méthyl-transférase de type III isolée. Enfin, parmi les 59 éléments portant des

gènes pouvant être impliqués dans des systèmes R-M, on ne retrouve aucun élément de la

famille Tn916.

b. Synthèse de bactériocines et résistance aux métaux lourds.

Au cours de notre analyse du contenu en gènes d’adaptation des ICE, nous avons aussi

détectés, en plus petit nombre, des gènes impliqués dans la synthèse de bactériocines ainsi

que des gènes pouvant conférer une résistance aux métaux lourds.

Ainsi, 17 ICE appartenant à 3 familles portent des gènes pouvant être impliqués dans la

synthèse de bactériocines. La plupart de ces ICE appartiennent à la famille Tn5252 (12/17)

et, dans une moindre mesure, aux familles ICESt3 (3/17) et Tn1549 (2/17). Tous les gènes

détectés codent des bactériocines de classe I (lantibiotiques) pouvant être de 4 types

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différents (connus pour être synthétisés par les streptocoques) apparentées à la

macédovicine, thermophiline, salivaricine ou nisine sans que la présence d’aucune des 4 ne

puissent être corrélée spécifiquement à une famille d’éléments.

Enfin parmi les 131 ICE/dICE analysés, seulement 9 ICE portent des gènes pouvant coder une

résistance aux métaux lourds ou un transport d’ions métalliques. Parmi ces 9 ICE, 8 sont de

la superfamille Tn5252 (4 de la famille Tn1549, 2 de la famille Tn1549 et 2 de la famille

TnGBS2) et un de la famille ICESt3. Les 4 éléments de la famille Tn1549 codent tous un

transporteur du fer (Fe

3+

). Ces éléments étant retrouvés intégrés dans des souches pouvant

être pathogènes comme S. dysgalactiae et S. suis. Le fer libre étant en quantité limité dans

les hôtes de ces bactéries, il semblerait plus probable que ces transporteurs ne confèrent

non pas une résistance au fer, mais permette au contraire à la bactérie d’importer du fer

dans la cellule. Parmi les 5 autres gènes conférant une résistance aux métaux lourds

détectés, 4 confèraient une résistance aux ions Cd

++

(portés par 2 ICE de la famille Tn5252,

un ICE de la famille TnGBS2 et un ICE de la famille ICESt3). Enfin le dernier gène détecté,

porté par un élément de la famille TnGBS2, confèrerait une résistance à l’arséniate.