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B. Visibilité et attractivité de la santé scolaire selon les médecins de l’éducation

2. Les freins

•••• La méconnaissance de la santé scolaire

Certains médecins ont souligné le manque de connaissance du métier comme frein évident à son défaut d’attractivité. L’un d’entre eux dit même devoir « justifier son existence ».

M 15. « Ce qui est frustrant, c’est que j’ai l’impression qu’en tant que mEN, on est obligé « d’expliquer notre existence », de se justifier auprès des partenaires… Quand

55 on est spécialiste, on peut s’installer n’importe où, ce type de problème ne se pose pas… on est connu et reconnu de tous... Je pense que ce manque de connaissance (insiste) de nos compétences est à l’origine d’un manque de reconnaissance

(insiste). »

•••• Le manque de reconnaissance de certains confrères

Plusieurs médecins évoquaient la satisfaction qu’ils avaient face à la reconnaissance des familles et des partenaires institutionnels. Cependant, il apparaît dans quelques entretiens que cette reconnaissance n’est pas retrouvée auprès de certains

confrères.

M 3. « Le manque de reconnaissance de notre statut de « médecin » par certains de nos confrères est aussi très frustrant et déstabilisant. Par exemple, pour les PAI, lorsque certaines précisions manquent, que j’essaie d’appeler le médecin traitant, certains ne me considèrent pas. C’est un peu frustrant, parce que nous ne sommes pas reconnus en tant que médecins par les professions médicales. »

Certains vont même jusqu’à préciser qu’ils ne se sentent pas considérés comme de « vrais médecins ».

M 7. « Auprès des confrères, j’ai déjà entendu que nous n’étions pas de vrais médecins ! »

Selon un médecin, ce manque de considération pourrait s’expliquer par l’absence de technicité médicale pure et par l’absence de prescription.

56 M 4. « Le regard de nos confrères est parfois lourd à porter. […] Nous ne prescrivons plus, ne faisons pas d’acte clinique et ne sommes donc pas considérés comme de vrais médecins »

•••• L’image dévalorisée de la médecine de prévention

L’un des médecins regrette le manque de valorisation de la médecine préventive, au profit de celle du soin.

M 4. « L’image de la médecine de prévention est assez négative en France, on peut s’identifier à la médecine du travail, un peu dénigrée également, alors que nous faisons des choses extraordinaires, mais c’est peu connu ! On ne met pas

suffisamment en avant que la médecine, ce n’est pas que prescrire, c’est aussi de la prévention. La médecine de soins prime aujourd’hui. »

M 11. « Malheureusement, il y a tout le problème de la prévention en général dans le milieu médical, qui est un peu une « seconde médecine » pour beaucoup. C’est la vision de la prévention en général… On a envie de faire un métier qui est reconnu et la prévention n’est pas toujours vue sous cet angle … »

•••• L’évolution des secteurs et des missions

M 13. « Nos missions ont changé, elles ont été redéployées… […] Nous sommes centrés sur le primaire. Nous ne faisons plus de second degré depuis 2 ans, hormis pour les urgences. Nos périmètres d’exercice se sont plus qu’élargis… […] Cela double nos effectifs d’élèves. Actuellement, j’effectue le travail qui était autrefois fait par deux médecins… »

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•••• La charge administrative et les problématiques matérielles

Certains médecins regrettent la lourdeur administrative et les difficultés matérielles parfois vécues.

M 8. « Je dirais la lourdeur administrative, la mise à disposition du matériel est parfois compliquée… »

M 12. « Parfois aussi les conditions matérielles : c'est-à-dire que si nous n’avons pas de CMS pour travailler confortablement et accueillir les familles, un bureau, des locaux et du matériel convenable, nous ne sommes pas attractifs non plus. Parfois aller dans des écoles maternelles où nous sommes assis sur des chaises à 30 cm du sol… ça n’attirera pas les jeunes médecins. »

•••• L’absence de prescription

Le fait d’être très restreint dans les prescriptions a très souvent été évoqué.

M 3. « Le fait d’être non prescripteur est aussi un frein majeur. On reste médecin mais sans prescrire. Il est logique que nous ne puissions pas tout prescrire, mais il devrait y avoir au moins un minimum… On est entre le pédagogique et le médical. Mais on est dans le médical ! Il faut réaffirmer notre place en tant que médecins [...] »

M 10. « […] Le fait de ne pas pouvoir prescrire constitue peut être aussi un frein pour certains. Cela peut être frustrant de se dire « Voilà, j’ai fait mes études de médecine et finalement je ne peux pas prescrire ». Mais on peut prescrire pour nous même, pour nos proches… »

58 L’un des médecins interrogés va même plus loin en se qualifiant de médecin

« exécutant ».

M2. « Je pense qu’il est important de souligner le côté très frustrant de ne plus être médecin prescripteur et de devenir « l’exécutant. »

•••• Le salaire

Parmi les médecins interrogés, beaucoup considèrent la rémunération comme étant insuffisante, surtout au regard de leurs compétences.

M8. « Le salaire serait aussi à réévaluer. Même si avec les années nous montons en échelon, cela reste inférieur à certains confrères. »

D’autres médecins le considèrent correct mais évoquent plutôt la problématique de l’image qu’il renvoie de la santé scolaire.

M 10. « Je pense gagner décemment ma vie. Quand j’étais interne, je gagnais moins bien ma vie que maintenant. Évidemment, ce n’est pas un salaire de chirurgien mais je pense vivre correctement… »

M11. « Par rapport à ma vision personnelle, je pense que ce n’est pas tant le salaire mais que c’est aussi l’image du salaire… c’est-à-dire que nous faisons partie des salaires les plus bas, et cela a un côté péjoratif… Par rapport à nos confrères, notre catégorie est la plus basse. »

59 Plusieurs médecins se disaient intéressés par diverses formations en lien avec leur pratique mais regrettent qu’elles ne soient pas toujours financées.

M 3. « Il faudrait aussi enrichir l’accès que nous avons aux formations, et disposer de financements pour les formations pratiques. »

M 12. « Enfin, je regrette le peu d’accès aux formations qui sont rarement

remboursées par le service : le DU des troubles des apprentissages, les journées neuropédiatriques… »

•••• Le manque de collaboration avec l’infirmier

La difficulté à mettre en lien le médecin et l’infirmier de l’éducation nationale a été soulevée. Selon l’un des médecins interrogés, cette absence de collaboration est parfois un véritable frein pour le métier.

M12. « Le manque de lien voire de collaboration avec l’infirmière. Je pense que nous sommes l’une des filières de médecins où il y a le moins de rapport avec l’infirmière, et c’est bien dommage. Aussi bien pour les projets de santé qu’elles mènent en établissement, pour les dépistages, pour les suivis... Nous ne sommes pas du tout en lien et c’est très dommage, cela dessert le service [...] »

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