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Fracture interfaciale

Dans le document Des fractures et des plis (Page 35-40)

1.4 G´en´erations de fractures : cas isotrope

1.4.3 Fracture interfaciale

L’´etude pr´ec´edente a mis en ´evidence la formation hi´erarchique de frac-tures d´elimitant des domaines plus ou moins r´eguliers. Cependant, le sol-vant pr´esent dans les interstices de la matrice continue de s’´evaporer. Le gel

continue d’ˆetre le si`ege de contraintes d’origine capillaire. Ces contraintes pr´esentent une distribution dissym´etrique dans un profil d’´epaisseur du gel : proche de la surface d’´evaporation la r´etraction du gel est importante alors qu’elle est nulle `a l’interface gel/substrat. Cette dissym´etrie est en faveur d’une d´eformation hors du plan du revˆetement. Cet effet cependant doit ˆetre suffisamment important pour vaincre l’adh´esion du gel sur le substrat7

. Dans l’´evolution du gel en cours du s´echage, ce m´ecanisme intervient `a la fin du r´egime capillaire (deuxi`eme trait vertical en pointill´es sur la Figure 1.12(b)).

Le ph´enom`ene de d´ecollement (d´e-adh´esion) d´ebute pr´ef´erentiellement `a par-tir des coins puis des bords d’un polygone du fait d’une concentration plus forte des contraintes m´ecaniques dans ces r´egions [13]. Le gel collo¨ıdal ´etudi´e ´etant transparent, une mise au point sur le substrat permet d’observer le front de d´elamination entourant la r´egion d’adh´esion gel/substrat (Figure 1.16). temps (s) a b 0 0.5 1 0.3 0.6 0.9 1.2 0 30 60 90 120 A adh(r)/A cell l(mm) Aadh f cell A

Fig. 1.15 – Cin´etique du processus de d´elamination en vue de dessus. (a) Superposition d’images montrant la propagation du front de d´elamination surlign´e en rouge, au cours du temps. (b) Variation, en fonction du temps, de l’aire et de la p´eriph´erie de la r´egion d’adh´esion d’un domaine.

A la fin du processus de d´ecollement chaque polygone est partielle-ment d´ecoll´e (Figure 1.15). Les r´egions d’adh´esion sont entour´ees de franges d’interf´erence. Ces franges traduisent l’existence d’un coin d’air, qui s’est d´evelopp´e entre le gel et le substrat au cours de la propagation de la frac-ture interfaciale. Ces franges d’interf´erence lumineuse permettent une mesure pr´ecise de la courbure de chaque polygone. Pour un gel donn´e, cette derni`ere quantit´e d´epend des conditions de s´echage et de l’´epaisseur du polygone.

7

R h u susbtrat r r

Fig. 1.16 – Figure finale pr´esentant des polygones partiellement d´elamin´es : les franges d’interf´erence observables du fait de la transparence du gel per-mettent de mesurer la courbure de la r´egion d´elamin´ee des polygones (´echelle : 500µm). A gauche : sch´ema en vue de profil d’un polygone selon l’axe r.

L’aire finale de la r´egion d’adh´esion est fix´ee par plusieurs param`etres : la physico-chimie du gel collo¨ıdal d´efinissant, entre autre, sa rigidit´e, l’´epaisseur de la couche, les conditions de s´echage, l’adh´esion gel/substrat. Si, dans le cas d’une couche de faible ´epaisseur (partie gauche de l’image Figure 1.17), la d´elamination est quasi inexistante ou localis´ee proche des bords des fractures, pour des couches d’´epaisseur plus importante (partie droite de l’image Figure 1.17), les r´egions adh´erant au substrat sont de pr´ef´erence circulaires `a la fin du processus. Ainsi des statistiques sur le rapport entre l’aire, Aadh, d’une r´egion d’adh´esion et l’aire, Acell, du polygone entier ont ´et´e ´etablies. Les r´esultats sont r´esum´es sur le graphe de la Figure 1.17 pour diff´erentes conditions de s´echage : s´echage lent, i.e. r´ealis´e `a une hygrom´etrie RH = 70% et s´echage rapide, i.e. RH = 46% (chaque point correspond `a une statistique d’environ 50 domaines polygonaux). L’influence du solvant a ´egalement ´et´e ´etudi´ee : ainsi une suspension collo¨ıdale `a laquelle a ´et´e ajout´ee une quantit´e contrˆol´ee en ´ethanol, a s´ech´e dans un environnement `a RH = 46%(Figure 1.17).

Un mod`ele th´eorique permet d’expliquer, en partie, ces r´esultats exp´erimentaux. Le processus qui conduit au d´ecollement d’un polygone est dˆu `a la comp´etition entre deux ph´enom`enes.

- D’une part un processus ´elastique qui conduit `a un d´eplacement d’une r´egion du gel hors du plan du substrat : processus similaire au flambement induit par les contraintes internes du gel.

- D’autre part un processus de d´e-adh´esion gel/substrat li´e `a la propagation d’une fracture interfaciale entre le gel et le substrat.

Le processus de d´elamination s’arrˆete lorsqu’il y a ´equilibre des forces en comp´etition. Ces derni`eres s’obtiennent `a partir des ´energies des processus

adhesion compl ète de-adhesion compl ète

A

cell (m )2 adh

/

A A

cell RH=70% RH=46% RH=46% - ethanol/water 10-3 10-2 10-1 1 10-10 10-9 10-8 10-7 f gradient d'épaisseur

Fig. 1.17 – Image prise `a la fin du s´echage d’une couche de particules de nanolatex comportant un gradient d’´epaisseur. Lorsque l’´epaisseur est faible la r´egion d´elamin´ee est concentr´ee proche des fractures tandis que lorsque l’´epaisseur est plus importante la r´egion d’adh´esion de chaque domaine est circulaire. Le graphe en ´echelle log-log pr´esente les mesures de l’aire des r´egions d’adh´esion, Aadh, en fonction de l’aire des domaines, Acell, pour diff´erentes couches, `a la fin du s´echage. La loi d’´echelle obtenue avec le mod`ele th´eorique donne la pente en pointill´es.

mis en jeu.

- L’´energie ´elastique de flambement d’une plaque mince [14] s’exprime sous la forme suivante, dans le cas d’un pli axisym´etrique [15] :

Ubuckling = 2C 3[12(1 − ν2 )]3/4Y  h R 5/2 r3 (1.1)

o`u le pr´efacteur est de l’ordre de l’unit´e, Y est le module d’Young du gel (un ordre de grandeur de Y est mesur´e par un proc´ed´e d’indentation via des exp´eriences que je n’expliciterai pas ici), h l’´epaisseur du gel et R le rayon de courbure du polygone (mesur´e `a l’aide des franges d’interf´erence). Cette ´energie est principalement concentr´ee sur le pli de rayon r limitant la r´egion d’adh´esion du polygone. Cette contribution est donc favoris´ee lorsque la longueur du pli est minimis´ee, `a savoir lorsque le pli s’inscrit sur un cercle. - L’´energie li´ee `a la propagation de la fracture interfaciale (crit`ere de Griffith [16]) :

Uadh = 2Γgel/sub(Acell−Aadh(r)) (1.2)

o`u Γgel/substrat est l’´energie d’adh´esion gel/substrat (´energie par unit´e de

surface). Cette contribution traduit le coˆut d’´energie pour cr´eer de nouvelles interfaces dans le syst`eme.

Afadh(Acell) ∝  Γgel/sub Y 2  R(Acell) h(Acell) 5 (1.3)

L’ajustement de ce mod`ele aux r´esultats exp´erimentaux permet de d´eduire Γgel/substratdans diff´erentes conditions exp´erimentales. En particulier, plus l’´epaisseur de la couche est faible et plus le processus de d´elamination est difficile. De plus, en abaissant la tension superficielle du solvant par ajout d’´ethanol dans la suspension, l’´energie d’adh´esion d´ecroˆıt.

Ces derniers r´esultats sugg`erent l’existence possible de ponts capillaires au niveau de l’interface gel/substrat. Ces derniers peuvent ˆetre form´es au cours de l’entr´ee d’air au niveau de l’interface gel/substrat pour compenser la perte de solvant par ´evaporation. La pr´esence d’un pont capillaire engendre une pression suffisamment importante pour maintenir une adh´esion entre gel et substrat jusqu’`a ce que le solvant soit totalement ´evacu´e. Apr`es une dur´ee suffisante pour que la totalit´e du solvant soit ´evapor´ee, les domaines n’adh`erent plus au substrat mˆeme si leur forme courbe persiste.

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