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Il convient de noter qu’il est impossible de rendre compte de toutes les com- posantes de la variation allomorphique du morphème causatif zilo en restant dans un cadre descriptif strictement synchronique. Il est donc impossible de déterminer la véritable forme sous-jacente du morphème causatif uniquement selon des cri- tères synchroniques. Néanmoins, compte tenu de la nécessité pratique d’élire une forme sous-jacente pour ce morphème — ne serait-ce que pour disposer d’une forme de citation —, nous proposons d’en déterminer une de manière partiellement conventionnelle selon un critère distributionnel.

Les allomorphes en latérale fricative ([oɬ] et [onɬ]) ne se produisent que dans un seul contexte morpho-phonologique : lorsque le causatif précède le su xe thématique de passé (en .i). À l’inverse, le su xe causatif se réalise systématiquement en sonante géminée dans tous les autres contextes, qui sont plus variés morpho- phonologiquement, ainsi que le montre le tableau . . En vertu de ce déséquilibre, nous supposons que la réalisation en latérale fricative -ɬ est conditionnée par le contexte spéci que de la position devant le su xe thématique de passé (en .i). On notera que cette distribution n’est conditionnée par aucune règle morphologique

ou phonologique active en synchronie. La décision d’écarter les formes en latérale fricative dans la détermination de la forme sous-jacente du morphème causatif est donc conventionnelle : si elle repose sur un critère distributionnel, elle n’est toutefois pas justi ée au sein du système morpho-phonologique synchronique du zilo.

Cependant, c’est en vertu d’une règle morpho-phonologique synchronique du zilo que les formes en sonante géminée ([oll] et [onn]) doivent également être considérées comme des réalisations secondaires. En e et, d’après le tableau . , le su xe causatif est réalisé de manière géminée lorsqu’il est suivi d’un autre morphème que le su xe thématique de passé en .i. Or, le tableau . montre qu’il n’est pas le seul morphème en sonante du paradigme verbal à se réaliser de manière géminée. Les autres morphèmes concernés sont les su xes thématiques de passé et de non-passé du paradigme nasal (p. ex. cl-ik.onn-ij, cl-ik.unn-u) lorsque ces derniers sont suivis d’une voyelle.

Cette réalisation de surface en sonante géminée est conditionnée synchroniquement par une règle morpho-phonologique fonctionnant uniquement dans le domaine verbal en vertu de laquelle les sonantes situées à la fois en nale de morphème et en position intervocalique sont réalisées de manière géminée . Cette règle concerne également les radicaux verbaux, chez lesquels une sonante nale n’existe jamais sous forme simple, p. ex. [k'amm.i] (eat.p ) comme réalisation de /k'am.i/, [qχell.i] (scratch.p ) comme réalisation de /qχel.i/. Ainsi, nous suggérons que la réalisation en sonante géminée est conditionnée par un contexte spéci que.

. Dans le domaine nominal, s’il est fréquent que les sonantes en position intervocalique soient géminées, elle peuvent souvent être prononcées aussi de manière simple, comme dans les mots [=bolo] / [=bollo] (particule conditionnelle) ou [elo] / [ello] ‘crème aigre, beurre’. Il existe également des noms dans lesquels la sonante intervocalique est toujours prononcée de manière simple, comme ila ‘mère’, Ali (prénom) ou Zilur ‘Zilo’. Par ailleurs, nous avons trouvé un seul contexte d’occurrence de sonante à la fois en position intervocalique et nale de morphème dans le domaine nominal : il s’agit des verbes factitifs dérivés à partir de bases nominales en sonante nale, comme rerts’om-ijd.i ‘rendre propre’ à partir de rerts’om ‘propre’, ruhunn-ijd.i ‘apprendre (quelque chose à quelqu’un)’ à partir de ruhun ‘habitué’ et bat’ol-ijd.i à partir de bat’ol (distinctly.pl). Dans ces verbes, la nale de la base nominale se trouve en position nale de morphème intervocalique. Or, si les deux verbes factitifs dérivés à partir d’une base en n nal que nous avons trouvés géminent ce dernier, ce n’est pas le cas des autres factitifs dérivés à partir d’une base en sonante nale. Notamment, tous les factitifs formés sur des bases au pluriel en -ol (p. ex. bat’ol-ijd.i, badol-ijd.i) semblent avoir un l simple devant le su xe factitif. Or, ces verbes spéci ques o rent un exemple contrastif éloquent par rapport aux verbes causatifs, qui, eux, ne peuvent jamais se réaliser en l simple.

. La variation libre de la forme causative des bases nasales : forme régulière vs. forme refaite

Aucune des réalisations allomorphiques du su xe causatif n’est donc éligible en tant forme sous-jacente. Compte tenu de la règle de gémination des sonantes énoncée précédemment, nous proposons une forme sous-jacente en sonante simple : aux réalisations vocaliques du su xe causatif une forme sous-jacente /-ol/, et à ses réalisations nasales une forme sous-jacente /onl/. Compte tenu de la distribution régulière du trait de nasalité chez les su xes verbaux en fonction de la nasalité sous-jacente de la base verbale (cf. . . . ), il est permis de supposer le processus sous-jacent //-ol// → /-ol/ en cas de base vocalique et //-ol// → /-onl/ en cas de base nasale.

Nous proposons donc un morphème causatif de forme sous-jacente //-ol// aux deux formes sous-jacentes ‘intermédiaires’ dépendant du trait de nasalité de la base — /ol/ et /onl/ — qui ont chacune une réalisation en latérale fricative et une réalisation en sonante géminée en distribution complémentaire détaillée dans le tableau du paradigme . ainsi que dans le tableau . , qui représente les di érentes réalisations du su xe causatif.

Tab. . : Réalisations phonétiques du su xe causatif

F. sous-jacente Base F. sous-jacente intermédiaire Contexte Réalisation //-ol//

vocalique → /-ol/ thème pautres → [-oɬ]→ [-oll]

nasale → /-onl/ thème pautres → [-onɬ]→ [-onn]

. La variation libre de la forme causative des bases