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Phase aqueuseGaz

1.3.2. R EACTIVITE DES COV EN PHASE AQUEUSE

1.3.2.2. Formation d’Aérosols Organiques Secondaires (AOS)

1.3.2.2.1. Répartition des composés organiques semi-volatils entre phases gazeuse et particulaire

Les processus d’oxydation décrits précédemment aboutissent à la formation de composés plus oxygénés, à plus faible volatilité. Ces composés peuvent alors contribuer par condensation à la formation de nouvelles particules d’aérosol organiques (AOS) après évaporation des gouttelettes de nuage (Blando et Turpin, 2000). Cette voie de formation d’AOS se produit dans le cas de solution diluée en composés organiques (Ervens et al., 2011). Pour les composés organiques semi-volatils, la distribution gaz/particules est contrôlée par un processus d’absorption représenté par un équilibre de phases entre la phase gazeuse et la phase condensée (Pankow, 1994). Lorsque l’équilibre du composé organique entre phases est atteint, la loi de Raoult est appliquée. Elle définie la pression partielle d’un composé dans une solution comme étant

saturante) et à sa fraction molaire dans la solution. Pour pouvoir tenir compte du nombre important de COV différents et des interactions complexes existantes entre ces composés, des modèles de partitionnement entre phases ont été développés. Le plus connu est celui de Donahue et al. (2006). Ils ont proposé une manière originale de représenter les composés organiques oxygénés en fonction de leur volatilité: la Volatility Basis Set (VBS). Cette approche permet de regrouper les composés, en phases gazeuse et aqueuse, dans 10 classes de volatilité différentes. Elle tient compte du rapport O:C qui informe sur le degré d’oxydation des composés organiques (Jimenez et al., 2009 ; Donahue et al., 2011). Ce modèle a récemment été couplé au modèle de chimie-transport WRF-CHEM (Shrivastava et al., 2011). Les auteurs concluent néanmoins que la représentation des AOS n’est pas correctement simulée. En effet, l’interprétation de la partition des COV est encore entachée d’incertitudes associées à plusieurs facteurs. Par exemple, les erreurs expérimentales (température et très faible concentration de COV) et la non prise en compte des processus réactionnels dans les modèles de partition (Hallquist et al., 2009) induisent encore des biais importants.

Les AOS peuvent également être formés à partir de réactions chimiques se déroulant en phase aqueuse ou plus précisement dans la particule d’aérosol humide, siège d’une réactivité particulière compte tenu des très fortes concentrations dans ces milieux. Il s’agit de voies réactionnelles alternatives à l’oxydation des COV car elles permettent de former des composés de plus haut poids moléculaire. La partie suivante aborde brièvement les différents processus mis-en-jeu dans la formation d’AOS.

1.3.2.2.2. Formation de composés de plus haut poids moléculaire: les LMC

Pour des solutions concentrées, des composés de plus haut poids moléculaire (LMC sur la

Figure 5) peuvent être formés (Lim et al., 2010). Cette situation a lieu dans le cas de particules

d’aérosols « humides » et au cours de l’évaporation des gouttelettes de nuage (Hallquist et al., 2009). Il semble néanmoins que la formation de LMC, généralement polaires et très solubles, pourrait également se dérouler dans les gouttelettes de nuage (Fuzzi et al., 2001).

Des études récentes ont montré le rôle potentiel de ces voies de production d’AOS par la réactivité aqueuse. La formation de LMC de type oligomère par des voies photochimiques à partir de précurseurs comme le glyoxal (Carlton et al., 2007; Lim et al., 2010; Volkamer et al., 2007), le méthylglyoxal (Altieri et al., 2008 ; Guzmàn et al., 2006),et l’acide pyruvique (Altieri et al., 2006) a été mise en évidence. Les oligomères sont issus de précurseurs complexes i.e. des composés organiques ≥ C2 en majorité poly-fonctionnalisés. Les espèces carbonylées ont été les composés les plus étudiés en phase aqueuse en raison de leur forte solubilité en phase aqueuse

(de l'ordre de 103 à 105 M.atm-1) et de leur hydratation (Ervens et al., 2011). Ces composés

présentent une réactivité en phase aqueuse très différente de celle en phase gazeuse en raison de cette hydratation. La réactivité de ces composés en phase aqueuse est également dépendante

de leurs niveaux de concentration. Le glyoxal (CHOCHO qui s'hydrate en CH(OH)2CH(OH)2) a

servi de modèle afin d'évaluer la contribution des espèces carbonylées dans la formation d'oligomères.

L’oxydation du glyoxal par le radical hydroxyle HO a été largement étudié (Ervens et Volkamer,

situ dans le nuage < 1 mM), l’oxydation du glyoxal conduit préférentiellement à la formation

d’acide glyoxylique (Leitner et Doré, 1997). Carlton et al. (2007) sont les premiers à observer des composés de plus haut poids moléculaire au cours d’expériences de photooxydation du glyoxal en concentrations largement supérieures à celles retrouvées dans l’eau du nuage (2 mM).

Une réactivité similaire a été observée pour le méthylglyoxal (CH3COCHO) et un de ses produits

d’oxydation, l’acide pyruvique (CH3COCOOH). Pour des solutions diluées, la formation de

composés moins volatils et avec des fonctions acides (acides acétique, oxalique et glyoxylique) est favorisée (Tan et al., 2010). Pour des concentrations plus fortes de l’ordre du millimolaire, la formation de LMC de type oligomère a été observée (Altieri et al., 2006, 2008; Perri et al., 2009; Tan et al., 2010, 2012). Des expériences similaires ont été effectuées sur des produits de l'oxydation de l’isoprène comme la métacroléine (MACR) et le méthylvinylcétone (MVK). Ces composés, oxydés par le radical hydroxyle en phase liquide aboutissent à la formation de LMC en tant qu’intermédiaires réactionnels (Huang et al., 2011; Liu et al., 2011; Zhang et al., 2010). Le radical hydroxyle est un oxydant susceptible de conduire à la formation d’oligomère. Toutefois, des réactions d’oligomérisation de composés carbonylés pourraient avoir lieu en l’absence d’oxydants photochimiques, notamment pour le glyoxal et le méthylgloyxal (De Haan et al., 2009a, b, 2011; Nozière et al., 2009; Yasmeen et al., 2010). Les résultats semblent indiquer que ces processus seraient peu significatifs pour plusieurs raisons: (1) les vitesses de formation d'oligomères sont faibles en comparaison de celles mesurées en présence de lumière; (2) les produits observés sont principalement des petites molécules i.e. tri- ou des quadri-mères; (3) ces oligomères auraient tendance à se décomposer lors de l’évaporation des gouttelettes (Ervens et Volkamer, 2010).

Deux mécanismes différents ont été proposés pour expliquer les voies de formation de LMC en phase aqueuse: des processus chimiques d'accrétion par catalyse acide et des processus radicalaires. Les processus chimiques par catalyse acide en phase gazeuse et aqueuse sont présentés sur la Figure 6 extraite de l'article de Hallquist et al. (2009).

Figure 6: Réactions chimiques possibles de formation de composés LMC en phase gazeuse et aqueuse (via catalyse acide) d’après Hallquist et al. (2009).

En phase gazeuse, il existe des voies de formation de composés de plus haut poids moléculaire

via un précurseur organique « di-radicalaire » (voie 1). Ce radical permet la formation de LMC

par une addition d’alcool, d’acide carboxylique ou d’aldéhyde et par self-reaction. Les composés LMC formés sont polaires donc solubles dans l’eau du nuage. Les principales voies de formation d’oligomères en phase condensée par accrétion, favorisée en milieu acide, sont indiquées par les voies 2 à 4 sur la Figure 6. La réaction d'addition aldolique et formation d'un acétal à partir de précurseurs de type aldéhyde et cétone (voie 2) est une des voies importante de formation d'oligomères (Liggio et Li, 2006a, b; Nozière et al., 2007). D'autres études ont montré que la formation d’oligomères peut résulter d’autres voies chimiques notamment par estérification d’acides carboxyliques et d’alcool (voie 4) (Hamilton et al., 2008; Müller et al., 2007, Reinnig et al., 2008; Surratt et al., 2006; Szmigielski et al., 2007), par formation de composés organosulfates (voie 3) (Liggio et al., 2005; Galloway et al., 2009; Perri et al., 2010) ou encore par addition d'un alcool sur un intermédiaire de Criegee (non présentée sur la Figure 6, Sadezky et al., 2006). Des réactions radicalaires sont également des sources potentielles d'oligomères en phase condensée. Des mécanismes radicalaires de formation d’oligomères à partir de la recombinaison

de deux radicaux alkyle Rissus de l'oxydation du glyoxal et du méthylglyoxal ont été proposés

(Lim et al., 2010; Tan et al., 2010). L’étude de solutions contenant de l’acide oxalique et pyruvique a également montré la formation d’oligomères en présence d’ozone sous irradiation UV (Grgić et al., 2010). Dans ces expériences, il a été suggéré que l’acide pyruvique agit comme un photo-sensibilisateur qui accélère l’oxydation de l’acide oxalique pour former des oligomères.

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Actuellement, le méthylglyoxal est un des composés carbonylés le plus étudié en raison de son rôle en tant que source d’AOS en présence d’aérosols humides et/ou de gouttelettes de nuage (Ervens et al., 2011). Il est alors devenu possible de mettre en parallèle à la fois l’oxydation et les processus d’oligomérisation de ce composé.

Les principaux mécanismes traitant de la réactivité du méthylglyoxal dans ce milieu peuvent se résumer comme suit:

· oxydation pour former des composés peu volatils tels que les acides glyoxylique, pyruvique et oxalique (Ervens et al., 2004b; Sorooshian et al., 2006; Warneck et al., 2005);

· formation d'oligomères par processus chimiques d'accrétion par catalyse acide (Galloway et al., 2009; Kalberer et al., 2004; Liggio et al., 2005; Nozière et al., 2009; Shapiro et al., 2009; Sareen et al., 2010; Zhao et al., 2006);

Ces processus de formation d’AOS en phase condensée sont encore à l’état exploratoire en raison d’un manque de connaissances des données cinétiques, des produits réactionnels et du transfert de masse. Toutefois, ces résultats mettent en avant l’importance de considérer les mécanismes d’oxydation en phase aqueuse des COV, de disposer d’intermédiaires réactionnels produits par oxydation et susceptibles de former des AOS.

En conclusion, l’oxydation des COV peut participer à la pollution photooxydante atmosphérique et met en jeu des milliers d’espèces. Des expériences en laboratoire sont nécessaires pour déterminer leur réactivité dans les phases gazeuse et aqueuse et leurs propriétés physico-chimiques telles que leur solubilité. Certains de ces composés comme les acides carboyxliques et les aldéhydes sont documentés par les mesures in situ mais de nombreuses espèces ne sont pas encore mesurées en raison de leur faible temps de vie comme les radicaux (peroxyles, alkoxyles) ou de leur structure moléculaire complexe difficilement identifiable. Pour compenser les incertitudes expérimentales, des modèles incluant des mécanismes chimiques de plus en plus complexes sont développés. Ces mécanismes tiennent compte de données de laboratoire et décrivent la complexité de la chimie des COV non documentés en laboratoire à partir de d'hypothèses et de paramétrisations telles que les analogies SAR. Ce sont ces modèles de chimie du nuage qui sont décrits dans le paragraphe suivant.

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