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CHAPITRE 5: DISCUSSION DES RÉSULTATS

5.2 FORCES ET LIMITES DE L ' ÉTUDE

Notre étude comporte quelques limites importantes qui se doivent d’être soulignées. Tout d’abord, l’utilisation de données secondaires crée certaines limites non négligeables concernant la disponibilité et la nature des données recueillies. En effet, puisque notre étude est limitée aux données recueillies par l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, nous sommes dans l’impossibilité de tenir compte de certaines variables absentes de cette étude, tels que d’autres facteurs professionnels, sociodémographiques et hors travail, jugés pertinents pour la nôtre et qui ont été rapportés dans l’état des connaissances en début de ce mémoire. Parmi ces facteurs, mettons en évidence l’ambiguïté et le conflit de rôle, la perception d’efficacité

individuelle, les évènements de vie stressants, la nature du travail, le type de profession, la position hiérarchique, la charge de travail et le niveau de contrôle à la maison, la personnalité des individus, etc. Une multitude de facteurs doivent être pris en considération dans l’étude de la détresse psychologique et tel qu’il apparaît dans la revue de la littérature, ces facteurs peuvent avoir un effet indépendant ou combiné pour expliquer la détresse psychologique.

Une seconde limite à notre étude est associée au devis de recherche, celui-ci étant de nature transversale. Notre étude est donc limitée en regard des relations de causalité entre les facteurs professionnels, la détresse psychologique et les problèmes cardiovasculaires. De plus, aucune conclusion ne peut être tirée de façon catégorique sur la causalité des associations observées entre la détresse psychologique et les problèmes cardiovasculaires. Par ailleurs, la littérature scientifique nous procure à de nombreuses reprises des résultats indiquant que la présence de problèmes de santé mentale (détresse, dépression) favorise l’apparition de problèmes cardiovasculaires (Gilmour, 2008; O’Connor et al., 2008).

Finalement, il est certain que l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes représente une limite importante à notre étude à cause de certains problèmes relatifs à l’erreur de mesure. D’une part, la plupart de nos variables indépendantes, soit les demandes psychologiques, les deux composantes de la latitude décisionnelle (l’usage des compétences et l’autonomie décisionnelle), l’insécurité d’emploi, les exigences physiques et la satisfaction au travail, ne sont mesurées que par un ou deux items (questions posées dans le questionnaire), ce qui peut réduire la validité des mesures. Aussi, nous retrouvons seulement deux questions en lien avec les problèmes cardiovasculaires. L’évaluation s’est donc faite en calculant le total des réponses positives aux deux questions. En conséquence, nous avons été limité à inclure « maladie cardiaque » et « hypertension » comme problèmes cardiovasculaires dans notre étude. D’autre part, certaines variables présentent des indices de cohérence interne assez faibles (ex : utilisation des compétences (0.53) ; exigences psychologiques (0.35) ; soutien social au travail (0.42)). Subséquemment, il résulte de nos analyses bivariées

(matrice de corrélation), que la grande majorité des variables indépendantes sont reliées entre elles, ce qui peut atténuer l’effet de chacune des variables sur la détresse psychologique et les problèmes cardiovasculaires. Ceci pourrait donc expliquer l’absence ou la faiblesse de signification statistique de certaines variables lors de nos analyses multivariées. Nous devons aussi mentionner le biais de variance commune, malgré que celui-ci soit sensiblement réduit grâce aux deux méthodes de collecte de données utilisées, soit l’entrevue téléphonique et l’entrevue face à face, mais ne négligeant toutefois pas le fait que les données proviennent de la même source. Ce biais peut aussi surestimer ou sous-estimer la corrélation entre les variables.

Outre ces limites, notre étude présente de grandes forces qui méritent d’être discutées. Débutons par un point fort important de cette recherche qui réside dans la taille et la représentativité de son échantillon tiré de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC, cycle 3.1). Notre échantillon compte 15 394 répondants et repose sur un échantillonnage aléatoire de cette enquête. L’échantillon utilisé est pondéré afin de s’assurer de la proportionnalité de celui-ci par rapport aux travailleur(se)s canadien(ne)s, âgés de 15 ans et plus, et ainsi s’assurer que la distribution des répondants est conforme à celle de la population visée par l’ESCC. Par le fait même, notre échantillon est représentatif de la population canadienne en emploi sur le plan de l’âge, du genre et de la distribution géographique du lieu de résidence. La validité externe de notre étude est donc considérable, ce qui nous permet de généraliser nos conclusions à l’ensemble des travailleurs et travailleuses du Canada.

De plus, malgré les limites qui ont été soulevées quant à l’utilisation du questionnaire, il reste qu’il a été construit sur la base des connaissances et de l’expertise de divers experts, du milieu de la santé et des services sociaux, ayant travaillé en étroite collaboration. Certaines sections ayant même été validées au niveau international. Afin de répondre à plusieurs questions et problèmes posés par le système d’information sur la santé : données fragmentées et incomplètes, non facilement partageable, analyses incomplètes, résultats des études réalisées qui n’atteignent pas de façon régulière la population canadienne; l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), Statistique

Canada et Santé Canada ont conjugué leurs efforts en vue de créer un Carnet de route de l’information sur la santé. L’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) a donc été conçue à partir de ce mandat. Le format, le contenu et les objectifs de cette enquête ont été définis après avoir mené des consultations approfondies auprès de spécialistes et d’intervenants fédéraux, provinciaux et de régions sociosanitaires communautaires en vue de déterminer leurs exigences en matière de données. L’objet de cette publication, est produit en réponse à l’exigence du mandat de recueillir des données fiables et pertinentes sur les services de santé, l’état de santé et les questions relatives à la santé revêtant une importance pour la population canadienne — à l’échelle régionale, provinciale et nationale — et de diffuser cette information au public (Statistique Canada, 2006 : Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, cycle 3.1-2005. Guide du fichier de microdonnées à grande diffusion). Ainsi peu de doutes peuvent êtres soulevés quant à la valeur de cet instrument de mesure. De plus, la méthode de collecte de données de l’ESCC est aussi une grande force de cette enquête produite à l’échelle canadienne. Les questions de l'ESCC ont été conçues pour être administrées selon la méthode d'interview assistée par ordinateur (IAO) et le mode d’administration du questionnaire a pris deux formes, soit par interviews téléphoniques assistées par ordinateur ou par interviews personnelles (face-à-face) assistées par ordinateur. Puisque les données ont été recueillies par questionnaire-entrevue, et non pas de façon auto-administrée, l’effet d’instrumentation s’en trouve réduit. Les interviewers ont participé à des séances de formation et d’exercices dans le but de se préparer à des cas de refus de la part de répondants ou tout autres obstacles lors de la prise de contact ou lors du déroulement de l’interview. Puis, notons aussi que Statistique Canada s’est également assuré de la validité du questionnaire en y investissant temps et argent afin de s’assurer de sa validité à grande échelle. Le taux de réponse de 78,9% du cycle 3.1 de l’ESCC témoigne aussi de la validité non négligeable des données recueillies.

Ensuite, notre modèle conceptuel présente également une solide validité puisqu’il s’appuie sur le modèle de Karasek et Theorell (1990). L’approche théorique de ces auteurs repose sur un important corpus théorique et empirique. Ainsi la validité des

mesures de nos variables indépendantes et de notre variable dépendante, soit la détresse psychologique, s’avère étonnante. De plus, une meilleure estimation de l’effet des facteurs professionnels sur la détresse psychologique et du développement de problèmes cardiovasculaires fut possible en raison de l’ajout d’un bon nombre de facteurs personnels inclus en tant que variables contrôles.

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