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10. DISCUSSION

10.2. FORCES ET LIMITES DE L'ÉTUDE

Une des principales forces de notre recherche est le fait qu'il s'agit d'une étude multicentrique pancanadienne. En effet, comparativement aux études conduites dans un centre unique, celles incluant plusieurs établissements ont l'avantage d'avoir un échantillonnage de participants plus large et plus hétérogène et de ce fait, davantage représentatif de la population étudiée (244). Avec l'objectif d'obtenir un nombre appréciable de participants, soit 660 patients au total, il sera possible d'avoir un aperçu du statut nutritionnel assez représentatif de la proportion de sujets hospitalisés dans multiples unités pédiatriques canadiennes. De plus, grâce à ce projet conduit à

l'échelle nationale, il sera possible de déterminer s'il existe des disparités concernant la prévalence et le risque de la dénutrition entre les différentes institutions canadiennes.

Un second attribut est qu'à notre connaissance notre étude est la première à évaluer la prévalence du risque de la malnutrition, l'état nutritionnel du patient à l'admission et lors du séjour à l'hôpital ainsi que les conséquences sur son état clinique, et cela dans multiples hôpitaux pédiatriques canadiens. Peu d'études ont été effectuées au Canada en ce qui a trait à la prévalence de la malnutrition chez les enfants. Nous serons donc en mesure d'avoir un portrait global de la situation actuelle en milieu hospitalier dans un cadre national. Dans cette recherche de type longitudinale, les patients sont suivis lors de la totalité de leur séjour à l'hôpital et non seulement à l'admission. Plus rares sont les études pédiatriques étudiant le changement de l'état nutritionnel (74). Également, étant donné que la malnutrition entraîne souvent de lourdes conséquences chez le patient, il nous semblait nécessaire d'analyser l'impact d'un faible statut nutritionnel sur le développement des complications, la durée de séjour et le nombre de réadmissions imprévues à l'hôpital.

Puis, nous avons décidé d'enregistrer la consommation alimentaire des enfants en plus de ceux recevant un soutien nutritionnel (nutrition entérale ou parentérale). D'une part, nous serons en mesure d'estimer le pourcentage des sujets ne comblant pas leurs besoins protéino-énergétiques. D'autre part, grâce à notre questionnaire, nous pourrons aussi évaluer la satisfaction et l'expérience à l'égard des repas chez la population hospitalisée. Il sera par la suite possible d'observer la relation entre l'apport alimentaire, le soutien nutritionnel et l'appréciation des repas avec le degré de sévérité de la malnutrition ou du risque de dénutrition.

Un autre point positif est l'envergure de notre recherche qui comprend deux autres phases indispensables : 1) connaître les perceptions et attitudes des pédiatres et du personnel infirmier sur la place de la nutrition et des soins nutritionnels dans leur pratique hospitalière ; et 2) documenter les recommandations et les faiblesses perçues par les diététistes au niveau de l’organisation et la qualité des soins nutritionnels offerts aux enfants hospitalisés. Ces aspects nous permettront de récolter des données qualitatives qui viendront approfondir et enrichir nos

observations. À travers les trois phases de notre étude, nous aurons étudié le sujet de la malnutrition auprès de divers répondants, soit le personnel infirmier, les diététistes et techniciennes en diététique, les pédiatres ainsi que les enfants et leurs parents.

Bien évidemment, notre étude contient aussi certaines faiblesses. Étant donné que notre recherche se déroule au sein de plusieurs établissements de santé, une des limites relève du fait que les mesures anthropométriques ont été prises par différents évaluateurs. Par contre, afin de minimiser les variations dans l'étude, dans chacune des institutions, une seule personne était responsable de la collecte des données pour tous les participants dans chaque milieu. De plus, pour limiter les risques d'erreur de prise des mesures et afin de s'assurer de la bonne compréhension du déroulement du projet, des sessions de formation ont été conduites. Avant d'entreprendre la collecte des données, les coordonnatrices avaient également l'obligation de se familiariser avec le guide de formation du protocole de recherche. Ainsi, nous croyons avoir été capables de minimiser les biais dans l'enquête et d'accroître la qualité des données.

Une deuxième limite fut soulevée lors du recrutement des participants à l'hôpital mère-enfant de Montréal. En effet, nous avons remarqué qu'une des principales raisons pour laquelle les parents ne consentaient pas à la participation de leur enfant à l'étude s'attribuait à l'état de ces derniers (ex. : « mon enfant est gravement malade et nécessite du repos »). On doit se rappeler que la sévérité de la maladie est un important facteur lié à la malnutrition (13). Ceci étant dit, on pourrait supposer que certains des enfants très malades n'ont pas fait partie de l'échantillon ce qui pourrait avoir un impact sur nos résultats. Dans ce contexte, la prévalence de la dénutrition pourrait être sous-estimée.

Ensuite, une des difficultés encourues au CHU Sainte-Justine concernait l'hospitalisation des patients qui était souvent de courte durée. Ceci étant dit, il est difficile d'évaluer un changement au niveau de l'état nutritionnel sur une courte période de temps. Dans ce cas, une altération au niveau du poids pourrait être plutôt attribuable à l'état d'hydratation du patient versus une réelle modification de son statut nutritionnel (30, 38, 241). Il se peut que l'échantillon des participants dans les centres indépendants soit trop faible pour évaluer de façon significative le changement nutritionnel. À cet égard, pour s'assurer d'obtenir un échantillon dit « représentatif », il pourrait

être nécessaire de combiner les données des différents centres hospitaliers, ce qui permettrait d'augmenter l'étendue de l'échantillon. Néanmoins, il serait intéressant de comparer la durée d'hospitalisation moyenne entre les différentes institutions canadiennes afin d'en tirer des conclusions.

Aussi, nous avons longuement considéré l'inclusion des enfants de l'unité des soins intensifs dans notre protocole de recherche. Cependant, comme la majorité des études sur la prévalence de la malnutrition dans les hôpitaux, nous avons décidé d'exclure cette participation. En effet, il est plus difficile d'obtenir des mesures de poids et de taille chez ces patients qui sont souvent confinés au lit et sous intubation. De plus, d'importantes variances au niveau du poids sont souvent observées dû à la présence d'oedème (38, 241). Pour l'inclusion des enfants admis aux soins intensifs, nous croyons que le protocole devrait être plus précisément adapté à cette population. Bref, le fait de ne pas avoir inclus ces enfants malades dans notre échantillon pourrait sous-estimer la prévalence de la malnutrition étant donné que plusieurs écrits démontrent un risque élevé de dénutrition chez ces derniers (77, 187). On peut supposer, une durée de séjour plus élevé chez les enfants admis à l'unité des soins intensifs étant donné la sévérité de leur état médical. Ainsi, l'avantage d'inclure cette clientèle est que cela nous aurait permis d'observer le changement du statut nutritionnel sur une plus longue période.

Finalement, il est possible que l'équipe médicale ait été influencée dans son intervention par la connaissance de l'inclusion du patient dans l'étude. Nous avons été dans l'obligation d'informer les infirmiers et infirmières des participants recrutés afin qu'ils puissent nous avertir de ceux ayant reçu leur congé de l'hôpital. Cependant, nous avons fait des efforts pour dissimuler cette information aux autres professionnels de la santé. Outre le personnel infirmier, les autres membres des équipes des soins, tels que les médecins et les diététistes, ne devaient pas être informés des enfants prenant part au projet (ex. : aucune pancarte sur la porte de la chambre indiquant que le patient était inclus dans l'étude, aucune déclaration dans le dossier médical commun du patient, etc.)